La vie n’est qu’une succession de moments où l’on réfléchit, où l’on échange et où l’on agit. Ces moments se nourrissent mutuellement et s’enrichissent les uns les autres.
Si l’on ne souhaite pas rentrer dans le détail, observons tout de même que la réflexion apporte la décision à l’action et l’expression à l’échange, que l’échange apporte la connaissance à la réflexion et l’efficacité à l’action, et que l’action apporte l’expérience à la réflexion et la tolérance à l’échange. En allant même un peu plus loin on s’aperçoit que toutes ces qualités s’organisent différemment suivant les tempéraments. Le professeur va partir de la connaissance pour décider en s’efforçant de rester tolérant alors que l’entraîneur pour être efficace va exprimer son expérience. Les deux se complètent, se contrôlent et s’harmonisent mutuellement.
Mais depuis un demi-siècle, dans un emballement général que les dérèglements de l’administration et de la monnaie ont permis, l’action a été concentrée chez les Politiques, la réflexion à l’université et l’échange dans les médias. Ils nous ont construit à trois un monde imaginaire qui a perdu le contact avec le réel et qui ne tient provisoirement que par la fausse monnaie légale créée par la finance et par la lourdeur d’une administration pléthorique qui, telle la seiche, lâche son encre pour que personne, y compris elle-même, n’y comprenne plus rien (organigramme de l’agence régionale de santé Grand Est). Cet attelage qui utilise la finance comme accélérateur et l’administration comme frein (les deux coûtant très cher), nous conduit au désastre en nous promettant la lune.
Avant de regarder de plus près, observons que quiconque ne se pâme pas d’admiration devant cette troïka est décrété populiste suivant le principe des animaux malades de la peste. Pour l’instant parmi tous les populismes de plus en plus nombreux qui se réveillent de notre léthargie, aucun ne semble malheureusement avoir le courage ou la distance nécessaire pour donner un sens à la vie, pour accueillir la mort avec naturel et pour analyser sereinement les trois chevaux de trait qui nous dirigent.
Remercions le Covid 19 pour avoir aussi clairement montré la réalité de cette troïka aussi coûteuse que nocive puisqu’elle ne fait que s’agiter, se justifier ou désespérer.
L’université est sûrement la plus coupable tellement sa mission était noble et tellement elle y a renoncé en nous rejouant La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf. La vraie université permettait à une toute petite minorité d’avoir accès au savoir de quelques rares personnages d’exception appelés professeurs et qui décernaient un diplôme à ceux qui avaient compris ce qu’ils disaient. Un professeur faisait son cours et seul l’examen final lui permettait de séparer ceux qui étaient venus se construire en travaillant et qui avaient compris, de tous les autres, ceux qui étaient simplement venus passer le temps comme ceux qui n’avaient rien compris. Encore en 1910 il n’était pas rare qu’un professeur d’université n’ait que dix élèves. Mais, par la décision politique ridicule de mettre à l’université 80% de chaque classe d’âge, décision rendue malheureusement efficace par l’intoxication des médias et la veulerie de l’administration, l’université est devenue un parking gratuit où ne s’y échange plus que des rêves et des fantasmes. Le rêve de détenir la vérité chez les nouveaux professeurs qui ne le sont plus que par leur capacité à intriguer, et le fantasme des étudiants qui veulent croire qu’un diplôme les fera s’enrichir. Cette double folie n’a été possible que par la montée en puissance des arrivistes et des courtisans que les Politiques ont appelés « professeurs » et que les médias ont appelé « experts ». La manne financière et le brouillard administratif ont interdit toute réaction saine. Pendant quelques lustres les grandes écoles ont sauvé l’université du désastre immédiat avant de sombrer dans les mêmes erreurs. Remercions le Covid 19 d’avoir mis au grand jour la nullité prétentiarde de la majorité des professeurs que les médias nous infligent.
Le monde politique est détenteur de la violence légale. Il était auparavant équilibré par deux autres mondes qui s’interdisaient de faire de la politique : le monde de la haute administration (les grands commis de l’État) et le monde de l’économie avec ses capitaines d’industrie (Peugeot, Wendel, Michelin, Renault …). Mais depuis un demi-siècle les énarques ont phagocité ces trois mondes qui n’en forment plus qu’un, auto-satisfait et simplement garni de courtisans inutiles. Ce nouveau monde utilise la violence légale d’une façon de moins en moins légitime pour ses deux seules activités : se maintenir lui-même en place et faire payer aux autres son incompréhension des problèmes. Comme tout troupeau il se croit plus fort quand il s’assemble tout en n’en faisant qu’à sa tête. L’Union européenne en est un exemple parfait où l’on s’assemble pour se prétendre fort, façon Les habits neufs de l’empereur, mais où chaque pays ne cherche qu’à faire payer les autres à sa propre manière. L’Allemagne sous-traite sa production à ses machines fort coûteuses en laissant vieillir et se paupériser sa population. Elle prête de l’argent pour que les autres pays lui achètent sa production et elle espère contre tout bon sens en être un jour remboursée, personne ne sait comment ni avec quoi, si ce n’est avec une nouvelle forme d’esclavage. L’Irlande, le Luxembourg ou les Pays-Bas sous-traitent plus intelligemment aux multinationales leur récupération de l‘argent des autres pays. Ils les attirent en étant des paradis fiscaux. L’Italie et la France rêvent de faire payer le futur en empruntant à tout va la fausse monnaie légale que leurs banques fabriquent, tout en appauvrissant leurs peuples par une montée sans fin de l’impôt. L’Espagne et les pays de l’est, beaucoup plus pragmatiques, se contentent de recevoir plus qu’ils ne donnent à cette prétendue union dont ils n’attendent rien d’autre et dont ils partiront dès que leur solde ne sera plus positif. Toutes ces stupidités sont possibles parce que les professeurs d’université affirment qu’il est intelligent de croire que nous créons des richesses, parce que les médias produisent à la pelle des experts qui le confirment, et parce que les banques créent l’argent nécessaire pour reporter tous les problèmes en faisant monter la dette que l’université justifie et que les médias estompent et édulcorent. Remercions le Covid 19 d’avoir mis au grand jour la nullité des Politiques quand le problème qu’ils ont à résoudre est concret, immédiat et visible.
Les médias ont une façon bien à eux de manipuler l’opinion. Ils galvanisent ou ils atterrent les foules en limitant l’espace et le temps au détail qu’ils éclairent outrageusement. L’essentiel n’étant pas éclairé n’existe plus. Actuellement en France l’AFP choisit les sujets dont il faut parler et les médias s’y engouffrent en répétant à l’envi le nom de leurs « journalistes » d’une façon suffisamment lancinante pour qu’ils puissent à la longue arrondir leurs fins de mois par des « ménages » en politique ou à l’université. Seul le Canard enchaîné, grâce à la délation systématique des envieux, a dans ses cartons de quoi faire tomber quiconque ne rentre pas dans la doxa du moment. Il représente à lui tout seul le quatrième pouvoir plus efficace que le ministère de l’intérieur. Il le peut car il est le seul à ne pas vivre des subventions des Politiques mais des ragots de toute la troïka. Les médias créent en permanence des épidémies de haine, de peur, de honte ou de simple excitation en survalorisant tel détail bien choisi. Remercions le Covid 19 d’avoir mis au grand jour la capacité des médias à générer une épidémie artificielle de peur panique en taisant soigneusement la réalité du paysage général que le graphique de l’INSEE des décès mensuels en métropole montre clairement à ceux qui acceptent de le regarder. Les 60.400 décès de mars 2020 sont dans la moyenne des décès d’un mois d’hiver et sont moins nombreux que les 66.990 décès de janvier 2017, beaucoup moins que les 87.861 décès de janvier 1949, les 74.725 décès de décembre 1969 ou les 73.023 décès de février 1953 qui n’ont chaque fois traumatisé que les familles concernées. Ces morts n’ont pas entraîné les réactions infantiles actuelles universitaires et politiques dont il faudra bien un jour comprendre les vraies raisons.
Ces trois mondes, à force de s’isoler dans leurs tours d’ivoire, sont devenus, autistes pour les Politiques, maniaques à l’université et délirants dans les médias. Ils sont deux à deux les béquilles du troisième. Leurs seules portes d’entrée sont le formatage et l’intrigue et ils ne sont plus composés tous les trois, que d’intrigants ou de personnages qui n’ont jamais connu autre chose et ne sont donc pas vraiment responsables de leur déconnexion du réel. Ayant abandonné la réflexion saine, l’action saine et l’échange sain, ils appellent santé, ce qui n’est que déresponsabilisation, intelligence, ce qui n’est que leur vision biaisée, et solution, ce qui n’est que déplacement d’un problème qu’ils sont incapables de résoudre et même d’affronter.
Devant un tel constat on peut observer la proposition stupide de cette troïka de vaincre le temps et l’espace par l’énergie monétaire de la fausse monnaie légale. Les 6 minutes que nous a offert Emmanuel Macron le 24 avril lors d’une prétendue « initiative mondiale sur les diagnostics, les traitements et les vaccins contre le Covid-19 » l’illustrent malheureusement parfaitement sans avoir même besoin d’être commentées. Mais on peut aussi être tenté par des culs-de-sac intellectuels car la tentation est grande devant tant d’impéritie et d’incurie, de proposer avec son propre bon sens une vision personnelle de ce que devrait être l’organisation de nos lendemains. Cela soulage sûrement mais ne sert rigoureusement à rien tant que les trois essentiels que sont l’action, la réflexion et l’échange sont aux mains de gens qui n’ont aucun intérêt à les rendre cohérents.
Pour changer cela, la seule solution est d’enlever à la monnaie son côté accélérateur gratuit qui permet toutes les utopies et d’enlever à l’administration son côté cul-de-plomb qui empêche toutes les réalisations. Si cela est fait, université, médias et Politiques s’effondreront alors comme neige au soleil et les idées pour reconstruire seront alors les bienvenues. Malheureusement le parti politique qui aura le courage d’affronter ces deux puissants outils du mensonge, ne semble pas encore né mais il est très attendu.
Le cardinal africain Robert Sarah a tout résumé dans son livre d’entretiens avec Nicolas Diat paru en mars 2019 Le soir approche et déjà le jour baisse. Il nous y a gratifiés de cette très heureuse formule qui ne peut laisser indifférent : « Les Barbares ne sont plus aux portes des cités et sous les remparts, ils sont aux postes de gouvernement et d’influence ».
Bonjour M. Dugois
Merci pour ce travail qui permet aux vrais chercheurs d’essayer de comprendre les réflexes intellectuels adéquats dont la réflexion a besoin pour avancer.
Il est incroyable d’observer que le cheminement a été le même dans tous les domaines des sciences. Je me souviens de mon maître de thèse qui par sa hauteur de vue m’accompagnait afin que je puisse me poser les bonnes questions ! Cet homme à qui je rends hommage avait été mis au placard car non conforme à la doxa (1987) malgré son triple doctorat et sa vieille expérience; on ne lui pardonnait pas de préférer l’honnêteté intellectuelle et l’humilité aux projecteurs de la vanité.
Il nous faut maintenant envisager des solutions pratiques afin d’amorcer un atterrissage dans la réalité qui sera sans doute brutal et les mesures pratiques initiales qu’il va falloir prendre nationalement ou localement.
Auriez vous des pistes de travail sur la façon de s’y prendre pour les temps futurs connaissant les intentions ou les « réflexes » qui ne sont plus à présent cachés.
Mon sentiment personnel est que tout part d’une mise à plat de la richesse et de la monnaie et que c’est un travail immense tellement tant de gens croient avoir tout compris.
La richesse n’est qu’un regard et en aucun cas un état ni un fait. Elle est subjective. La monnaie est un titre de créance sur n’importe quel membre du groupe qui utilise cette monnaie et la cause de cette créance ne peut être que dans le passé et en aucun cas dans le futur pour être objective. Toute construction qui ne s’appuie pas sur l’objectivité retrouvée de la monnaie et sur la subjectivité retrouvée de la richesse, repose sur du sable.
Tout est là, cher Marc, mais quand tu penses au temps qu’il a fallu pour arriver à cette synthèse:
« La monnaie est un titre de créance sur n’importe quel membre du groupe qui utilise cette monnaie et la cause de cette créance ne peut être que dans le passé et en aucun cas dans le futur. »
La route risque d’être longue, même si j’ai pu espérer, moi aussi, effectivement, que le covid19 aurait pu aider à cette révélation. Mais que la BdF ait à injecter 300 milliards d’euros dans les caisses des banques et de l’état pour compenser le manque d’activités, et donc de dépenses, ne semble pas émouvoir grand monde, et sûrement pas mon presque homonyme.
Bonjour Marc,
Connaissant relativement bien tes idées sur la monnaie (et ta dénonciation du PIB), et étant d’accord en ce qui concerne l’endogamie extrême entre politiques, membres de feu l’Université, de la « Haute administration » et des médias, je ne retiendrai qu’un point de ton article : comment se fait-il que si peu de gens aillent consulter (je le fais plusieurs fois par semaine), les statistiques de l’INSEE ? Il suffit, comme tu l’écris, de comparer les chiffres !
Comme le dit à peu près le Pr. Raoult, nous sommes devenus une société qui a peur et, par médias interposés, se fait peur… Je comprends que ce scientifique soit sur la même longueur d’ondes que Michel Onfray. Qu’en penses-tu ?
Cordialement, Pierre
Je pense que le bon sens renait de partout mais qu’il a encore un mal fou à s’agglomérer. L’initiative de Michel Onfray de regrouper dans un journal Front populaire, les souverainistes de droite et de gauche, me parait très utile et le Pr Raoult y a aussi souscrit.
Mon prochain article sera sur la fausse guerre fabriquée pour masquer la vraie guerre où les souverainistes sont unanimes à vilipendier les mondialistes mais n’ont pas encore sérieusement réfléchi à ce qu’ils proposent et aux bases de leur construction.