Aucune incohérence ne peut être durable et il est triste de voir nos élites tenter désespérément de justifier et de soigner l’incohérence née de l’abolition de la limite de la monnaie depuis qu’elle a été déconnectée en 1971 de toute richesse reconnue. Tous les problèmes semblent pouvoir être résolus par l’argent rendu disponible par la création de monnaie par les banques commerciales et la montée sans fin de la dette mondiale frôlant déjà maintenant les 250.000 milliards de dollars pour 8 milliards d’humains. Nos élites nous veulent et nous croient riches et fabriquant de la richesse. S’ils se croient de droite, ils vont défendre la conservation de la nouvelle richesse par ceux qui l’ont produite. S’ils se croient de gauche, ils mettront l’accent sur une meilleure répartition des nouvelles richesses. Croire que dépenser crée de la richesse, vouloir un commerce extérieur excédentaire grâce à une pseudo compétitivité pour faire payer les étrangers et récolter un commerce extérieur déficitaire qui nous fait payer pour les autres, distribuer un argent sans valeur pour acheter les votes d’un peuple qui croit encore à la valeur de sa monnaie, créer de faux problèmes pour ne surtout pas voir les vrais et y focaliser la jeunesse, voilà les bases de notre incohérence actuelle. L’aveuglement affligeant d’un Macron, d’une von der Leyen ou d’un Thierry Breton, comme celui de la totalité des forces politiques et syndicales qui devraient toutes s’appeler faiblesses, cet aveuglement fait peur car il est contagieux via les médias et l’éducation nationale, ce qui permet à l’islam, seul cohérence actuelle en occident, de s’avancer à son rythme vers le pouvoir alors que sa cohérence n’est pas du tout la nôtre.
Sans préjuger de ce que pourrait être notre cohérence future, il est au moins utile de comprendre la cohérence de l’occident jusqu’en 1971 quand l’argent était limité. Comme dans toutes les civilisations l’harmonie était d’abord interne et le rapport à l’extérieur de la nation n’était qu’anecdotique et généralement réduit à ce que rapportaient de rares voyageurs. Il fallait produire ce que nous consommions et faire des enfants pour produire davantage et consommer davantage, ce qui s’appelait la prospérité. Comme personne ne croyait à une corne d’abondance qui distribuerait un argent sans valeur mais considéré comme en ayant, l’égalité des citoyens se faisait d’abord par ce que l’on appelait le devoir d’état, ensuite par l’harmonie personnelle de chacun.
Le devoir d’état était le premier devoir qu’instituait son état d’homme ou de femme qui était alors évidemment clairement différencié. La femme s’occupait du futur en faisant des enfants et en en faisant des adultes utiles à la société grâce à la réalité concrète des problèmes et des solutions que toute vie familiale génère. L’homme s’occupait du présent et rapportait l’argent nécessaire au logement et à tout l’entretien de la famille. Les femmes étaient « sans profession », supin de pro fateor, ce qui veut dire « pour être reconnu ». Les femmes n’avaient pas besoin d’être reconnues puisqu’elles étaient toutes mères de famille. Une mère de famille pouvait dire ce qui scandaliserait aujourd’hui : « une femme sans enfants, c’est comme un sac vide ». Il y avait entre les hommes et les femmes une égalité parfaite dans l’interdépendance, ce qu’en économie David Ricardo a appelé l’avantage comparatif. La famille était la cellule de base de la société et les célibataires l’exception. Chacun faisait ce qu’il faisait le mieux ou le moins mal dans la production d’enfants, de biens et de services. C’était le devoir d’état. Et l’économie était fondée sur l’échange de productions, chacun étant à la fois consommateur et producteur ou au service de la production. L’argent n’était qu’un intermédiaire dans ces échanges. L’économie qui est toujours une spirale, était une spirale positive dans des nations souveraines dans lesquelles la prospérité était fondée sur des échanges de productions par l’intermédiaire d’un argent limité et sur une confiance dans le futur par une préparation concrète de la relève.
Parallèlement l’harmonie personnelle indispensable était apportée par l’estime de soi fondée sur les deux pieds que sont le devoir d’état et l’appartenance à la cité, à la société, à la nation, et pas au monde ni au continent. Cette appartenance s’exprimait dans les syndicats, les partis politiques, les églises, les entreprises, le bénévolat. Partout l’expérience complémentaire des hommes et des femmes enrichissait et construisait la nation. Dans les entreprises les hommes remplissaient leur devoir d’état et certaines femmes y trouvaient leur harmonie. Elles rentraient à la maison quand leur devoir d’état les y appelait quand d’autres femmes trouvaient leur harmonie dans le bénévolat ou un hobby que l’on appelait violon d’Ingres. Il y avait évidemment des problèmes mais chacun savait les efforts à faire pour les résoudre.
Et puis 1971 a cru créer la corne d’abondance mythique de la création de richesse par la dépense, fausse création chiffrée par le PIB et rendue possible par la dette qui donne les liquidités qui permettent les valeurs ajoutées des entreprises et l’impression d’une création de richesse. Les héritiers de Vatican II et de mai 68 ont dit que c’était très bien. Les banques et les entreprises en ont profité, les unes pour vivre en créant de l’argent et en le prêtant avec intérêts avant de le détruire dès récupération, les autres en payant de moins en moins le travail au nom d’une sacro-sainte compétitivité qui a oublié son sens de pétition commune, qui encourage l’immigration et qui fait abandonner le vrai prix des productions en les vendant en fait à perte pour survivre. Nous sommes rentrés dans un monde aberrant où il est de plus en plus difficile de gagner de l’argent par son travail et de plus en plus facile d’en utiliser par ceux qui ont accès à l’emprunt. Nous sommes passés d’un monde où l’argent limité n’était que l’intermédiaire pour échanger deux productions, à un monde où un argent illimité remplace une des deux productions échangées en faisant croire à la richesse de l’autre pendant que la création de celle remplacée par l’argent, est laissée au futur grâce à la montée permanente d’une dette d’un argent sans valeur qui sera détruit dès remboursement, sans que personne ne sache comment globalement rembourser. Il n’y a pas un secteur de la vie qui ne soit pas bousculé par cette aberration. Tous n’en sont pas encore devenus eux-mêmes aberrants mais tous en sont atteints.
C’est cette transition suicidaire dont il faut d’abord être conscient, avant de savoir comment réagir. Elle s’est faite sur à peine quelques décennies. Il faut observer que l’or est la seule richesse reconnue universellement et que sa capacité à être échangée avec une autre richesse est constante. La montée de la valeur de l’or ne vient que de la baisse de la valeur des monnaies. L’injection par les banques de fausse monnaie légale fait monter vertigineusement l’or et fait baisser tout aussi vertigineusement la valeur réelle des monnaies.
La baisse de la valeur des monnaies a entraîné à la fois une baisse de la valorisation du travail et la hausse des prix. Au lieu de réagir sur ces deux points, la classe politico-médiatico-universitaire a très étonnamment décidé de valoriser l’absence de travail par aides et subventions avec un argent sans valeur qui complique encore le problème. Parallèlement nos dirigeants ont voulu lutter contre la hausse des prix par le libre échange qui dévalorise encore davantage le travail et lance une spirale négative encore accélérée par la volonté de garder le pouvoir en flattant les consommateurs et non les producteurs de moins en moins nombreux.
L’argent illimité nous a fait abandonner simultanément le devoir d’état et l’harmonie individuelle.
L’harmonie individuelle n’a plus été fondée sur un effort utile à la société mais recherchée uniquement sans aucune chance de succès dans un effort pour soi comme le jogging ou le trail venus tous deux du monde anglo-saxon, et sur l’argent dépensé à s’évader en psy, en antidépresseurs et en drogues plus ou moins douces.
Mais le plus grave a bien évidemment été l’abandon et même l’oubli du devoir d’état par les deux stupidités du libre-échange et d’un intérêt purement théorique pour le pouvoir d’achat des Français, fondées toutes les deux sur l’idée farfelue de consommer sans produire en faisant payer les autres pays.
Les hommes n’ont plus pu loger et entretenir leurs familles, forçant les femmes à aller chercher de l’argent en abandonnant leur devoir d’état, encouragées pour cela par la classe dirigeante qui a ridiculisé la mère de famille et inventé une nouvelle stupidité, celle de la parité dans le devoir d’état masculin avec abandon du devoir d’état féminin.
L’État dans toutes ses composantes est complètement pourri par l’idée de ne pas perdre le pouvoir et par celle que l’argent peut tout même s’il est sans valeur. C’est le « quoiqu’il en coûte » tellement à la mode. Ne pouvant plus en fabriquer lui-même de sa propre décision, il lève un impôt incohérent faisant payer tout mouvement de son peuple y compris même ceux de produire par les impôts sur la production, de travailler par les charges sociales exorbitantes et de mourir par les droits de succession. Comme l’argent qu’il prend à son peuple vient généralement de son travail, il est limité et, tout en tentant toujours d’augmenter les impôts, il est obligé d’alimenter la spirale négative en empruntant de plus en plus un argent sans valeur qui fait évidemment monter les prix et baisser la valeur du travail, ce qui nous désagrège.
Schopenhauer a écrit : « Toute vérité passe par trois étapes. D’abord, elle est ridiculisée. Ensuite, elle subit une forte opposition. Puis, elle est considérée comme ayant été une évidence depuis le début ». Ce qui est dit ici est de moins en moins ridiculisé et de plus en plus attaqué. Rien n’est donc perdu si Schopenhauer avait raison.
Cher Marc,
je vous verrai bien comme ministre de l’économie et des finances publiques. Ce texte comme à votre habitude est très simple à lire et à comprendre car tout y est la logique même.