Lorsque Contrepoints diffuse ce matin un article D’où vient l’argent ? Du chiffre d’affaires des entreprises, point, J’ai souhaité réagir devant une telle ineptie. Etant banni de ce site qui n’aime pas la contradiction, tout en se proclamant défenseur de la liberté d’expression, je profite de son autorisation de partager cet article quand on l’aime, pour le partager à ma modeste manière.
J’aime cet article car il est l’expression de la bêtise à l’état pur. Tout s’y trouve. L’argent vient du chiffre d’affaires des entreprises mais il ne vient pas à l’idée de l’auteur qu’il n’y a pas de chiffre d’affaires des entreprises sans que des clients viennent abandonner leur argent et fabriquer ce chiffre d’affaires qui sans eux n’existerait pas. Toutes les courbes sont en pourcentage du PIB que l’auteur continue à voir comme une richesse à se partager alors que c’est la somme de toutes nos dépenses.
A la réflexion, je retire le mot bêtise qui est disgracieux et je dois reconnaître que la bonne foi se montre volontiers en public quand elle a sa béquille de l’aveuglement. Je crains très fort que l’auteur soit de bonne foi ! C’est dire la profondeur de notre problème.
Bonne chance à cet auteur comme à Contrepoints qui semble fier de le publier.
Non Marc, ce n’est pas « la bonne foi se montre volontiers en public quand elle a sa béquille de l’aveuglement », tu es trop gentil, c’est plutôt « la vérité se pâme d’assurances à évoquer l’incontestable évidence devant les ignorants et rassure ses coreligionnaires de bien faire partie du même monde d’en haut, au-dessus de la mêlée. » En effet, la bonne foi a été « formatée » par des instructions validées au bout de cycles de 3 à 7 ans par des diplômes. Comment remettre en question le « …au début était le troc, comme c’est devenu compliqué on a inventé la monnaie ! » et puis que « c’est la croissance qui produit la richesse » ? Ces diplômés sont donc les seuls propriétaires de la vérité (c’est ce qu’on leur apprend pendant leurs cours… et rappelé tout au long de leur carrière…) qui ne peut être remise en question que par des ignorants attardés ou des égocentriques dépravés qui cherchent à exister par n’importe quel moyen, y compris à remettre en cause des évidences avec des arguments farfelus. Et ceci même si, effectivement, il y a toujours des exceptions, comme toi et de plus en plus d’autres, qui confirment ce constat affligeant.
Le gros problème de notre société est que, comme on ne peut pas amener un âne à l’abreuvoir pour le faire boire s’il n’a pas envie de boire, et en plus qu’on ne peut tenter de l’inviter à boire puisque lui il sait quand il doit avoir soif et de quelle eau dans quelle condition, alors qu’il est agonisant de ses fausses instructions et, dernière muraille, la plus grosse, ne peut accepter d’envisager de ne pas avoir identifié par lui-même ces/ses absurdités. Alors il faut inlassablement informer les curieux et ceux qui doutent, et ils sont chaque jours plus nombreux, afin de préparer le tsunami intellectuel du « bon sens » qui va « nettoyer » la domination des formatés qui nous rabâchent ces énormités socialement suicidaires. C’est bien l’effondrent de l’organisation de nos sociétés que nous sommes en train de vivre.
Et comme tu vas me dire « mais il ne se passe rien… », je te rappelle, d’un part, que « l’arbre qui tombe fait plus de bruit que la forêt qui pousse » et que, d’autre part, nous sommes en train de vivre l’apocalypse, le lever du voile, c’est-à-dire voir tout ce que l’on ne voyait pas jusqu’à présent. Quand on a eu les yeux cachés pendant longtemps, quand on ouvre ou ré-ouvre les yeux il faut bien un moment d’adaptation à la lumière avant de bien voir tout correctement ! Et bien quand nous allons bientôt tous voir la forêt qui a bien poussé, le changement de paradigme de notre société va s’opérer, dans la paix, je l’espère de tout mon cœur.
Jean François et Marc ont raison, tout est fait par nos prétendus experts économiques pour nous vendre des absurdités et, comme l’a écrit un jour la merveilleuse Joan Robinson, quand les étudiants en économie ont fini par comprendre qu’on leur avait raconté des salades, soit ils ont abandonné, soit ils sont devenus professeurs eux-mêmes, et ne vont donc pas cracher dans la soupe de leurs collègues experts. Il ya 10 ans que j’essaye moi-même de me sortir de ce piège de la question monétaire, jamais réellement étudié, mais fondamental, d’où de nombreuses « disputatios » avec Marc. Pas facile de se révolter contre le paradigme dominant, mais j’y travaille, avec mes faibles moyens et une certaine paresse, hélas. Je ne désespère pas d’arriver à quelque chose (qui s’inscrit dans les réflexions de Marc) avant la fin de mes jours, SI DIOS QUIERE
Bruno Lemaire, ancien doyen associé d’HEC