La démagogie de la création de richesses futures

Je reviens sur le sujet tellement le dé-formatage est difficile mais essentiel.

Le monde financier est fondé sur le prêt d’un argent qu’il n’a pas et qu’il crée par la double écriture pour se nourrir des intérêts. Son autre activité qui était accessoire et qui devient première consiste à spéculer sur tout ce qui peut l’enrichir par le jeu, en appauvrissant quelqu’un d’autre qu’il ne connaîtra jamais.

Cette définition un peu dure n’attend que ses contradicteurs qui tous, vont justifier l’action des banques, par l’utilisation des richesses futures créées par l’investissement, le « sésame ouvre-toi » de l’économie actuelle.

Cette ligne de défense s’appuie sur le formatage universitaire de nos élites qui a profondément ancré dans les têtes, l’idée fausse que les entreprises créent de la richesse qui permet de rembourser les emprunts.

Les entreprises créent en effet de quoi éventuellement satisfaire les désirs mais ce qu’elles créent en biens ou en services, n’est richesse que si elles trouvent des acheteurs qui viennent s’appauvrir en monnaie pour que la production de l’entreprise devienne une richesse en nature.

La Terre aussi crée chaque année des fruits, des poissons et du gibier qui sont des richesses parce qu’ils sont consommés. S’ils ne sont pas cueillis, pêchés ou chassés, ils restent un réservoir de nourriture le temps de leurs vies mais ne sont évidemment qu’une richesse potentielle et provisoire. Ils serviront d’engrais naturel en fin de vie. S’ils sont cueillis, pêchés ou chassés mais non consommés, ils vont pourrir et il faudra nettoyer et désinfecter. Ils ne sont clairement des richesses que parce qu’ils ont été autoconsommés par les cueilleurs, les pêcheurs ou les chasseurs ou parce qu’ils ont été vendus à des acheteurs qui se sont appauvris en monnaie pour pouvoir les consommer. Dans les deux cas les richesses n’ont existé que parce qu’elles n’existent plus. Il ne viendrait à l’idée de personne d’utiliser ces fruits, ces poissons ou ce gibier après qu’ils aient été consommés.

C’est pourtant la base même de notre système économique construit par le système bancaire et la science économique avec la complicité des électeurs-consommateurs que nous sommes car cela nous plait beaucoup et si les gens intelligents qui nous gouvernent disent que c’est possible !

Personne ne se demande pourquoi depuis l’aube de l’humanité, il a fallu attendre le milieu du XXème siècle pour qu’un peuple croie pouvoir s’enrichir sans appauvrir quelqu’un d’autre par la guerre et le pillage. Jusqu’à présent les peuples vivaient heureux sans s’enrichir mais en travaillant à vivre heureux. Etaient-ils bêtes ! Nous nous avons inventé par notre intelligence un eldorado sans travail, un pays de cocagne qui attire bien évidemment toute l’humanité.

Par un singulier oubli du bon sens nous appelons production (PIB) tout ce que nous dépensons, nous appelons cela « la création annuelle de richesse » et nous fondons de merveilleuses théories sur la deuxième utilisation de ce qui a déjà été consommé. Par exemple nous empruntons pour acheter une voiture et, au lieu de nous inquiéter d’avoir à payer demain la banque, nous nous rengorgeons en ayant fait de la croissance et du PIB, et en « relançant l’économie » ! La banque est ravie puisqu’elle va toucher des intérêts sur de l’argent qu’elle a créé et qui sera détruit au remboursement. La classe politico-médiatique est ravie car cela dope l’économie et la croissance. La science économique lui a rappelé que Dieu avait dit à Moïse, à Jésus ou à Mahomet que dès qu’il y avait une croissance de 1,5 % l’emploi repartait. Le Parlement, composé de gens n’ayant très majoritairement connu que l’école et la politique s’en contente et s’intéresse surtout à ce que le mot imbécile ne reste pas uniquement masculin. On ne dit plus « Demain on rase gratis » mais nous disons « C’est demain qui paye ».

Mais comme on veut payer demain avec ce que l’on a déjà consommé aujourd’hui, cela ne marche pas. L’appauvrissement équivalent à l’enrichissement des électeurs, s’accumule donc inexorablement dans les entreprises et les Etats et nous assistons au jeu pitoyable mangeur de temps, d’énergie et d’intelligence qui consiste à faire payer le désastre à l’autre, avec des dés pipés. Les joueurs sont l’Etat, les entreprises, les clients et les contribuables. On essaie bien de faire payer les étrangers mais au bout du compte c’est nous qui payons pour eux. Le drame est que ce jeu pitoyable devient impitoyable et que les clients comme les contribuables se laissent de moins en moins tondre la laine sur le dos et commencent à s’interroger.

Tout ça pour flatter l’électeur !

Qui va nous remettre les yeux en face des trous avant que la grande violence ne le fasse ?

Les autres fanatiques

C’est compliqué la haine. Elle s’exprime en violence ou en dérision. Elle n’est pas l’inverse de l’amour, elle est l’inverse du respect et à la fin elle se retourne toujours contre soi. Brasillach et Charlie Hebdo n’ont jamais tué personne mais ils ne respectaient pas ceux qu’ils voyaient en adversaires. Leurs exécutions sont indéfendables mais elles sont pourtant toujours défendues par ceux que leurs plumes ont traumatisés. Ne serait-ce pas manquer de hauteur de vue que de condamner d’un côté et d’approuver de l’autre ? Tous les fanatismes sont dangereux.

Fanum en latin c’est le temple et fanaticus est le serviteur du temple quand le profane reste à l’extérieur. Aujourd’hui le fanatique se barricade dans son idéologie, refuse d’en discuter, refuse même d’envisager de se tromper. Ce fut longtemps le cas des communistes qui ne pouvaient supporter de s’être trompés pendant toute leur vie. Dans l’Histoire récente ce fut évidemment le cas des nazis et de Brasillach, et un très bel exemple de fanatisme est la phrase de Churchill aux Communes, « La démocratie est le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres ». Il y a dans cette phrase l’affirmation d’un dogme que l’on sait ne pas être capable de défendre mais dont on refuse la remise en question. Ce sont les idéologies qui créent les fanatiques et défendre une idéologie en condamnant le fanatisme rend pour le moins perplexe. Le fanatisme à la kalachnikov génère beaucoup d’émotion. Il n’est évidemment pas défendable mais il est vite écrasé dans l’œuf en donnant à d’autres fanatismes, d’autres idéologies l’occasion de crier victoire, même en silence. Je suis personnellement plus inquiet d’un autre fanatisme tout aussi méprisant et qui ne tue pas les individus mais les peuples. Pas physiquement bien sûr mais culturellement. Ces fanatiques s’appellent actuellement Hollande, Sarkozy, Bayrou, Juppé, Cohn-Bendit, Attali ou Valls. Ils ont comme journaux Le Figaro, Le Monde, Les Echos et Libération. Ils se regroupent pour mieux résister aux assauts du bon sens.

Le 4 janvier Libération reprenait une étude que Le Point faisait sur Alain Juppé :

Juppé «réfléchit» déjà «évidemment» à ce qu’il ferait. Par exemple, énonce-t-il, «il faudra peut-être songer un jour à couper les deux bouts de l’omelette pour que les gens raisonnables gouvernent ensemble et laissent de côté les deux extrêmes, de droite comme de gauche, qui n’ont rien compris au monde». Le président du Modem, François Bayrou, fan de Juppé, ou Manuel Valls disent la même chose.

Il ne faut en effet pas oublier que les fanatiques ont toujours tout compris au monde. Ils sont les seuls raisonnables et ceux qui n’ont pas la même compréhension qu’eux sont des populistes et des extrémistes qui n’ont accès à la liberté d’expression que lorsque l’on peut retourner contre eux ce qu’ils disent.

Il serait raisonnable d’après eux de croire que le PIB est une richesse annuelle créée pour se la partager ? Il serait raisonnable de dire que la seule façon de lutter contre le chômage c’est que la croissance dépasse 1,5% ou 2% suivant la puérile «loi d’Okun»? Si c’était raisonnable il serait inutile de vouloir aller chercher la croissance avec les dents. Il suffirait d’embaucher des fonctionnaires pour faire du « PIB non marchand » et d’envoyer des pétroliers mazouter nos côtes pour faire du « PIB marchand » avec le nettoyage des plages. D’après ces fanatiques il serait raisonnable de croire s’enrichir chaque fois que nous dépensons de l’argent, quelle qu’en soit la raison et que cet argent ait été gagné ou emprunté. Pour eux dépenser de l’argent c’est créer de la richesse. Ils sont unanimes à ne pas oser dire au peuple qu’il faudrait envisager de se remettre au travail. Dans leur aveuglement ils ont raison. C’est en s’unissant tous qu’ils résisteront le moins mal à la réalité des faits.

Il serait raisonnable d’après eux de garder nos enfants presque le tiers de leur vie entre quatre murs pour marier leur désirs enfantins de liberté et de « vie étudiante » au désir cynique de les formater en complices du système s’ils n’ont pas la force de se rebeller. Il serait raisonnable de voir sortir du moule à 25 ans des garçons et des filles convaincus que le PIB est une richesse créée annuellement qui permet la réalisation de tous leurs rêves. Il serait raisonnable de voir sans en être dérangé la douleur de leur réveil quand ils s’aperçoivent qu’avoir accumulé des connaissances ne les a absolument pas préparés à la vie. Il serait raisonnable de tout mettre sur le dos de la crise. On dirait vraiment qu’ils n’ont pas compris que l’expérience est au moins aussi importante que la connaissance et que le discernement est bancal sans elle. Dans leur aveuglement ils ont raison. C’est en s’unissant tous qu’ils résisteront le moins mal à la réalité des faits.

Il serait raisonnable d’après eux d’appeler démocratie l’avis majoritaire de la foule en refusant de s’intéresser à la liberté et à la compétence des votants de même qu’à l’intérêt réel qu’ils portent au sujet traité. Il serait raisonnable de se voter des lois de financement des partis politiques pour ne plus subtiliser l’argent indispensable à l’achat de l’affect du peuple afin qu’il choisisse le bon bulletin le jour J. Là ils ont vraiment compris qu’il fallait être riche pour être élu et dans leur clairvoyance ils ont raison. C’est en s’unissant tous qu’ils résisteront le mieux à la réalité des faits et qu’ils pourront acheter avec l’argent du peuple, leur propre tranquillité pendant quelques années en mariant parole et illusion.

Alain Juppé a raison. Il y a une omelette dont les bouts sont différents et il n’est pas le premier à prendre cette image. Ils ont raison de vouloir se regrouper dans leur combat perdu d’avance comme les Jedi dans L’attaque des clones. Ils ne ressentent même plus le ridicule de leur appel désespéré à la croissance divine qui n’arrivera malheureusement pas aussi facilement que Yoda et son armée de clones dans Starwars.

Nous sommes tous complices de cet abandon de notre pays aux fanatiques. Séparons en effet dans l’omelette les fanatiques et les profanes, le gros ventre mou crépusculaire et les extrémités balbutiantes.

Un bout de l’omelette veut faire payer les riches, ceux qui se sont scandaleusement enrichis au détriment des entreprises et des Etats qu’ils étaient supposés servir. Ils ont évidemment raison mais si c’est nécessaire, ce n’est clairement pas suffisant.

L’autre bout de l’omelette veut limiter le problème à son rayon d’action, à la nation, à sa capacité à agir et c’est évidemment le bon sens. Mais ce n’est pas seulement en fermant la fenêtre que l’on soigne un malade.

Il y a beaucoup à dire sur les deux bouts de l’omelette mais c’est là où le vrai raisonnable cherche à naitre, en rejetant le fanatisme incroyablement dangereux de tous ceux qui s’autoproclament raisonnables en entrainant leur peuple au désastre et en le formatant par simple intérêt personnel.

Demain, dimanche 11 janvier 2015, manifestons notre rejet de la haine et de tous les fanatismes. Et ayons de l’empathie pour tous les fanatiques en espérant leur résilience.

Vœux 2015

2015 sera l’année de deux votes et si nous nous souvenons que vote vient de votum le vœu et non de vox la voix, il est temps de faire un vrai vœu, une promesse faite aux dieux selon son étymologie. Laissons aux souhaits, la gentillesse de voir chacun riche, bien portant et heureux, et envisageons d’y travailler un peu.

Je promets donc aux dieux de tout faire pour réveiller mes contemporains et les aider à se sortir du tissage de l’illusion et de la parole, étoffe qui nous sert de chrysalide et nous fait croire que nous ne sommes pas chenilles puisque nous nous rêvons papillons. C’est évidemment complexe puisque tout est fait pour fausser nos analyses et pour que nous nous croyions riches, bien portants et heureux. Décortiquer l’esbroufe est la première difficulté à surmonter pour ne pas sombrer dans les fausses solutions qui abondent et nous dispersent.

Toute étoffe a une chaîne et une trame qui se tissent pour durer. Notre folie n’y échappe pas.

Quatre illusions constituent la chaîne de ce tissu maléfique :

La première est de croire que nous avons trouvé, après l’échec de toutes les civilisations et de tous les siècles antérieurs, comment créer de la richesse : il suffit d’attendre la croissance qui augmentera le PIB qui n’est plus la somme de toutes les dépenses, sottes ou intelligentes, mais la création annuelle de richesses à nous partager équitablement. Nous avons enfin trouvé l’accès à la propriété en niant à juste titre qu’elle est le vol mais en oubliant qu’elle n’est qu’un prêt du groupe qui peut tout récupérer par ses lois de confiscation. Cette première illusion fait passer l’individu avant le groupe, ce qui est l’inverse de toute civilisation.

La deuxième illusion est de croire que la monnaie est une marchandise ou un signe en oubliant qu’elle est stockage d’énergie humaine et qu’elle ne peut croitre en quantité que par l’augmentation d’énergie humaine efficace, procréation fructueuse ou travail reconnu utile par le groupe. Créée sans cela, elle s’autodétruit par la hausse des prix et la dévaluation. Cette deuxième illusion accompagne la première comme le chat accompagne le renard pour emmener les Pinocchios que nous sommes vers l’île des plaisirs.

La troisième illusion est de croire que des années passées dans l’instruction publique à répéter à des professeurs, ce qu’ils ont envie d’entendre, donnent par diplômes interposés, des raisons d’être et une reconnaissance par le groupe. Cette troisième illusion déstabilise complètement l’individu et l’oblige, pour survivre, à devenir complice ou rebelle.

La quatrième illusion est de croire que la majorité de la foule a toujours raison et qu’il est inutile de vérifier la compétence, la liberté et l’engagement de ceux qui s’expriment pour les prendre au sérieux. Les foules ne font pas que des lynchages et des pogroms. Elles font aussi des démocraties représentatives qui ont dépensé ce qu’il fallait pour s’acheter une image de sérieux et qui fabriquent des protecteurs du système. Le rôle de ces derniers est important car, au lieu de privilégier le bon sens, et pour des raisons à étudier de près, ils s’en éloignent en multipliant les normes et les lois, tristes étais d’un système sans avenir. Cette quatrième illusion nous fait croire que nous sommes sur le bon chemin.

Mais la chaîne de l’illusion ne ferait pas un tissu solide si elle n’était tramée par la parole qui arrive à tout faire croire par une logorrhée généralisée et une technique très aboutie.

La parole dans l’action est confiée aux Politiques. Comme rien de ce qu’ils proposent ne fonctionne et qu’ils n’envisagent pas de s’être trompés, ils rivalisent de mots qui ne sont que fuite en avant vers l’européanisme et le mondialisme avec les notions de gouvernances européenne et mondiale et un syncrétisme absurde qui prend çà et là sur la Terre, des bouts d’expériences toujours isolés de leur contexte. De tous temps les pensées médiocres ont cru pouvoir s’imposer par l’universalisme et la suppression des autres pensées. De tous temps cela a abouti à des totalitarismes désastreux car les peuples filtrent tout à l’aune du bon sens.

La parole dans l’échange est confiée aux médias qui surfent sur le superficiel en ne faisant plus d’analyses de fond. Ils éloignent les profanes du temple de leurs certitudes en veillant à la purification des messages diffusés. Ils doivent être inodores, incolores et sans saveur sauf s’ils sont porteurs d’émotions. Les médias séduisent et diffusent un bonheur artificiel et des émotions dirigées. Ils réinventent l’hypnose sous une forme nouvelle assez efficace.

La parole dans la réflexion est confiée, ou plus exactement donnée, à des experts cooptés entre eux. Les Politiques et les médias les ont érigés en penseurs. On ne voit qu’eux à la télévision. Ils se disent à la fois économistes, politologues, essayistes et professeurs. Ils annoncent péremptoirement le futur en n’expliquant jamais pourquoi ils se sont toujours trompés. Inutile de les citer tellement leurs noms tombent naturellement comme des fruits mûrs. Ils ont compris que pour exister, il fallait être proche des Politiques et des médias, ce qui était beaucoup plus important que d’avoir quelque chose à dire.

Ce tissu bien construit par le hasard et la nécessité, est en nous et autour de nous. Tous les grands illusionnistes savent que tout passe lorsque la parole habille l’illusion. Les auditoires sont subjugués et on leur fait tout avaler. C’est la société de l’apparence. C’est la société que nous envisageons, toute honte bue, de laisser à nos enfants.

Puissent les dieux nous aider à sortir par nous-mêmes de cette société de l’apparence que l’on nous a appris à tant aimer ! Le premier acte est d’affiner l’analyse en ouvrant un vrai débat.

Bonne année 2015

Les trois veaux d’or

Chacun sent bien que l’explosion se rapproche et que les efforts déployés par la classe dirigeante pour nous rassurer et nous endormir sont de plus en plus inefficaces.

L’absence totale actuelle de vision d’un futur compréhensible rappelle l’histoire des Hébreux dans le désert lorsque Moïse était parti sur le Sinaï et que le peuple désespérait de le voir revenir.

Le peuple, voyant que Moïse tardait à descendre de la montagne, s’assembla autour d’Aaron, et lui dit : « Allons ! Fais-nous un dieu qui marche devant nous, car ce Moïse, cet homme qui nous a fait sortir du pays d’Egypte, nous ne savons pas ce qu’il est devenu »…. Et tous ôtèrent les anneaux d’or qui étaient à leurs oreilles, et ils les apportèrent à Aaron. Il les reçut de leurs mains, jeta l’or dans un moule, et fabriqua un veau en or. Et ils dirent : « Israël ! Voici ton dieu, qui t’a fait sortir du pays d’Egypte ». (Ex 32,1-4)

Deux remarques jaillissent de ce passage de la Bible.

La première est que lorsqu’un peuple n’a plus de vision, plus de perspective, il s’invente une idole à qui il attribue les pouvoirs des disparus qu’il a aimés. Au début du paragraphe c’est Moïse qui les a fait sortir d’Egypte, quelques lignes plus loin, c’est le veau d’or. Le peuple sans perspective attend tout de son idole puisque c’est son idole qui a déjà tout fait.

La seconde est que l’idole coute très cher et que, pour se rassurer, un peuple sans vision achète à grand prix l’idole à laquelle il se confie. Tout leur or y passe. Le « faire croire » coûte toujours très cher et toutes les idoles appauvrissent.

Aujourd’hui nous sommes comme les Hébreux dans le désert, sans visions, sans perspectives avec une classe dirigeante parfaitement conforme à notre médiocrité perdue. Avec elle nous avons créé trois idoles que nous alimentons de notre or en espérant d’elles un futur radieux qu’elles ne nous donneront évidemment jamais.

La première idole est la croissance que nous nous présentons comme une création de richesses à nous partager alors qu’elle n’est que l’augmentation de notre dépense que les économistes appellent consommation ou investissement selon leur désir de jouissance immédiate ou de jouissance différée. A la question « Comment dépenser plus quand on n’a pas d’argent ? », cette idole répond « Emprunte » car elle ne sait pas que l’argent n’est que de l’énergie humaine stockée qui ne peut se multiplier que par la procréation et le travail utile. Mais comme nous suivons notre idole, cela nous coûte très cher.

La deuxième idole est la démocratie que nous nous présentons comme le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple alors qu’elle n’est que l’achat fort couteux par les Puissants de l’affect du peuple. Les Puissants se sont toujours cooptés entre eux. Ils se sont longtemps servis de Dieu pour se maintenir au pouvoir et ont maintenant fabriqué leur idole en faisant croire que l’avis majoritaire de la foule définit l’intelligence. Mais la réalité est que l’avis majoritaire de la foule donne le pogrom, la ruée et le lynchage et qu’il faut donc beaucoup d’argent pour faire croire à l’idole qu’ils appellent suffrage universel. Ils s’en octroient beaucoup mais n’en ont jamais assez et ont toujours besoin d’un « Urba » ou d’un « Bygmalion » pour toujours mieux acheter l’affect du peuple. A la question « Comment vérifier la liberté, la compétence et l’engagement des votants, bases indispensables de leur responsabilité et donc de l’intérêt de leur avis ? », cette idole répond « Tais-toi et vote, il est très vilain de s’abstenir ou de ne pas s’inscrire » car elle sait que ce système est le seul qui permet aux Puissants de garder un pouvoir dont ils ne savent que faire. En suivant cette idole cela nous coûte très cher.

Mais ces deux premières idoles s’effondreraient d’elles-mêmes si la troisième idole, la formation, n’était pas la plus idolâtrée. Il est d’ailleurs à la mode de la voir « tout au long de la vie ». Il s’agit en fait de formatage pour tenter sans aucun espoir de fabriquer des « agents économiques performants », sujets respectueux de la croissance et de la démocratie, à qui l’on va faire croire que ce qu’on leur raconte va les aider à s’intégrer à un monde incompréhensible et donc évidemment incompris. Tout ce qu’on leur apprend à grand frais n’est quasiment jamais filtré par l’expérience et les malheureux sortent chaque année de nos universités par fournées entières de plus en plus importantes avec la conviction qu’ils sont prêts pour être reconnus alors qu’ils vont enfin découvrir l’expérience que ce qu’ils ont appris ne leur sert à rien et qu’ils vont devoir s’humilier en acceptant d’être livreur de pizzas, vendeurs de fringues ou gardiennes d’oies. Subir le système ou en devenir complice va rapidement devenir leur seul et abominable choix. A la question « Pourquoi l’instruction universelle ne se limite-t-elle pas à lire, écrire et compter ? », cette idole devrait répondre si elle était honnête « Il faut beaucoup de temps pour formater les jeunes à croire à la croissance et à la démocratie et ce temps leur est agréable car il leur en laisse beaucoup pour se distraire et s’évader ». Mais Dieu que cela coûte cher !

Dans la Bible Moïse réagit avec une extrême violence au veau d’or.

Et, comme il approchait du camp, il vit le veau et les danses (aujourd’hui les danses s’appellent le foot, la télé et la française des jeux). La colère de Moïse s’enflamma ; il jeta de ses mains les tables, et les brisa au pied de la montagne. Il prit le veau qu’ils avaient fait, et le brûla au feu ; il le réduisit en poudre, répandit cette poudre à la surface de l’eau, et fit boire les enfants d’Israël. (Ex 32,19-20)

Moïse se plaça à la porte du camp, et dit : A moi ceux qui sont pour l’Éternel ! Et tous les enfants de Lévi s’assemblèrent auprès de lui. Il leur dit : Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël : Que chacun de vous mette son épée au côté ; traversez et parcourez le camp d’une porte à l’autre, et que chacun tue son frère, son parent. Les enfants de Lévi firent ce qu’ordonnait Moïse ; et environ trois mille hommes parmi le peuple périrent en cette journée. (Ex 32,26-28)

Le Coran raconte la même histoire du veau d’or mais Moussa (Moïse en arabe) réagit avec plus de douceur et convainc le peuple de se repentir.

Et nous que devons-nous faire ? Réagir comme Moïse ? Réagir comme Moussa ? Rester idolâtres de nos trois veaux d’or ? La réponse appartient à chacun et elle est loin d’être simple.

La science économique ne rendrait-elle pas aveugle ?

Il est sans doute temps d’expliquer pourquoi la science économique tellement révérée n’est pas seulement un assemblage de truismes présentés en pièce montée pleine de vide. Il ne serait alors qu’amusant de la prendre au sérieux. Mais n’existant que par le chiffrage de tout et confondant des observations incomplètes vaguement chiffrées avec des théorèmes, elle en oublie l’essentiel qui ne se chiffre pas.

Toute la classe politico-économico-médiatique parle du PIB comme d’une création annuelle de richesses à se partager mais néglige la différence entre une richesse, un embarras et un déchet. L’antiquaire, le brocanteur et le ferrailleur constatent pourtant tous que les déchets des uns sont des richesses pour d’autres et inversement. La richesse n’est en effet qu’un regard, un regard appris d’un groupe qui trouve beau et bon ce qu’il appelle riche et qui n’est vrai avec certitude que dans ce groupe. Ses membres auront le même regard sur ce bien ou sur ce service qui ne sera pas du tout forcément le regard d’un autre groupe. La richesse est tout sauf objective.

Mais alors comment différencier le PIB création de richesses, du PIB création de déchets ou d’inutilités ? C’est le regard réaliste inchiffrable de l’acheteur qui fait la différence. Le pâtissier croit chaque jour fabriquer des richesses mais si personne ne veut les acheter, ses gâteaux deviendront vite des inutilités puis des déchets. Il faut en outre que le regard du client soit réaliste et qu’il ait non seulement l’envie mais la capacité d’acheter. Et c’est là où le bât blesse car la science économique prend pour une donnée la capacité à acheter. Cette erreur fondamentale fait la fortune de deux mondes : le monde publicitaire qui s’habille d’un « faire savoir » alors qu’il n’est que dans le « faire croire » que ce qui est vendu par ses clients est richesse, et le monde financier qui, par l’emprunt appelé pudiquement financement, donne la capacité à acheter. C’est la société de l’apparence qui appauvrit les pauvres et qui enrichit les riches en permettant à la machine de tourner, au capitalisme de croire en son avenir et à M. Mélenchon de trouver que la France n’a jamais été aussi riche. Si l’on produit, c’est qu’on est riche, même si nous ne produisons que des inutilités et des déchets qui ont du mal à trouver preneurs et que nous importons ce dont nous avons besoin sans savoir comment le payer.

Ce qui est gravissime, c’est que le raisonnement médiocre de croire fabriquer des richesses dès lors que nous finançons leur production, a contaminé l’éducation nationale qui s’auto-évalue par l’argent qu’elle dépense alors qu’elle devrait bien évidemment s’évaluer par l’embauche des diplômés qu’elle produit. L’éducation nationale pense qu’accumuler des connaissances fabrique des têtes bien faites utiles à la société comme d’autres assemblent des matières pour en faire des objets. Personne ne semble se demander si nous fabriquons bien des richesses dans notre système éducatif et pas simplement des inutilités voire des rebuts.

Pour le savoir il n’y a que le regard de l’acheteur qui fait la différence. Pour nos étudiants l’acheteur s’appelle l’employeur qui doit à la fois vouloir embaucher et pouvoir le faire.

Si l’employeur est l’Etat, il embauche autant de fonctionnaires qu’il veut en augmentant d’abord le déficit budgétaire puis les impôts. Les fonctionnaires étant surprotégés, l’Etat embauche de plus en plus par l’intermédiaire de myriades d’associations subventionnées. Le financement vient donc dans tous les cas du peuple qu’il faut à la fois tondre et flatter, ce qui est le délicat métier de Politique qui montre chaque jour davantage son inefficacité ou, plus exactement, son intérêt exclusif pour l’immédiateté par absence totale de vision.

Si l’employeur est privé, il raisonne en « valeur ajoutée » car on lui a fait croire à la création de richesses. Mais il est confronté à la dure expérience de la réalité et il n’embauche quasiment plus que des commerciaux et des conseillers qui doivent lui démontrer que le système tourne encore. Faut-il s’étonner de leur inefficacité et de la montée du chômage ?

La solution tout le monde la connait mais elle n’est guère électorale. Il faut infiniment moins d’étudiants et remettre les Français au travail pour fabriquer des biens vraiment utiles. Il faut parallèlement les mettre devant les choix très difficiles des renoncements à faire inéluctablement pour conserver quelques avantages de la société actuelle de l’apparence. Un Politique qui veut être élu, veut-il le dire et peut-il le dire ?

Ne faut-il pas en désespoir de cause créer la race des Politiques qui préfèrent la vérité à l’élection ? Et Internet ne pourrait-il pas être le vecteur non censuré par les médias de cette expression ?

L’unanimité dans la folie

L’histoire de Sodome racontée dans la Genèse commence par une phrase de Dieu parlant d’Abraham : « J’ai voulu le connaitre afin qu’il prescrive à ses fils et à sa maison d’observer la loi… » (Ge 18,19). Malgré cette phrase explicative du verbe connaitre dans ce récit, nous avons préféré l’interpréter comme dans « L’homme connut Eve. Elle devint enceinte » (Ge 4,1) et nous avons inventé l’expression « connaître au sens biblique » qui est impertinente vis-à-vis de Dieu. Chouraqui dans sa traduction de la Bible utilise le verbe pénétrer qui permet habilement les deux interprétations sans enfermer Sodome dans la sodomie qui empêche de voir le sens profond et terriblement actuel de ce texte. Ce sont « Les gens de Sodome, du plus jeune au plus vieux, le peuple entier sans exception » (Ge 19,4) qui viennent dire à Loth « Fais les sortir pour que nous les connaissions » (Ge 19,5). Sans s’attarder sur la bêtise de Loth déjà remarquée par son oncle Abraham et qui propose ses filles avec sa finesse habituelle, il faut remarquer la vraie sanction du bourrage de crâne exigé par la populace. « Ils frappèrent de cécité les gens depuis le plus petit jusqu’au plus grand » (Ge 19,11). Nous connaissons tous la destruction de Sodome mais n’avons-nous pas oublié que, lorsque tout marche sur la tête, l’aveuglement général précède l’effondrement ?

C’est aujourd’hui l’unanimité de nos aveuglements qui doit nous faire réagir tellement nous savons au fond de nous-mêmes que ce sont des aveuglements tout en n’ayant aucune envie de trop en prendre conscience.

– Aveuglement économique en fondant tout sur la manne divine que l’on appelle PIB. Nos élites ne disent même plus le PIB annuel mais la création annuelle de richesses. 99,99% de la population a été formatée pour croire à cette création de richesses et à confondre la production et l’agitation. Heureusement ce qu’on appelle la crise empêche la léthargie.

– Aveuglement éducatif en fondant tout sur la connaissance et en négligeant l’expérience. Nos élites quand elles veulent investir en éducation ne pensent qu’école ou université. La confrontation au réel n’a quasiment plus d’adeptes alors qu’elle nous manque tellement. 99,99% de la population a été formatée pour croire qu’aider l’humanité, c’est implanter partout des écoles au lieu de s’enrichir avec humilité de l’expérience fabuleuse des peuples sans bancs de classe. Heureusement l’incapacité de plus en plus évidente qu’a l’école à intégrer ses fournées annuelles d’éduqués empêche la léthargie.

– Aveuglement politique en fondant tout sur l’intelligence collective de la foule appelée mensongèrement démocratie alors que la démocratie est, sur un sujet donné, l’avis majoritaire des gens responsables c’est-à-dire libres, compétents et engagés. C’est dire si nous sommes encore loin de cette merveilleuse utopie. Pourtant 99,99% de la population a été formatée pour croire que « Un homme, une voix » est la formule sacrée qui permet de distinguer l’aristocratie naturelle que cherchaient, tant les révolutionnaires français que les premiers présidents américains. Heureusement la médiocrité du résultat et l’augmentation massive des non-inscrits, des abstentionnistes et des bulletins blancs et nuls, empêchent la léthargie.

A Sodome il n’y avait pas d’exception nous dit la Bible. A nous de déceler, de réunir, d’agglomérer, d’enrichir et probablement d’activer ce qui nous reste d’exceptions pour sauver notre civilisation gréco-latine ou plus exactement les valeurs de cette civilisation qui sont autrement plus riches que les sacro-saintes quoiqu’absconses « valeurs de la république » !

« La vertu du regard éloigné » (Lévy-Strauss)

Il faut sans doute, une bonne fois pour toutes, comprendre la complicité objective qui lie les peuples et leurs dirigeants dans la fuite en avant drapée dans le mot démocratie qui n’est qu’un achat fort coûteux par les puissants de l’affect des peuples. Les peuples ne comprennent évidemment rien à la comédie générale qui leur est proposée, ils en pressentent la duperie mais jouissent pour la plupart en occident d’une vie facile à laquelle ils n’ont guère envie de renoncer.

Cette complicité empêche de voir la simplicité du problème et le coût abominable des multiples paravents que nous mettons nous-mêmes en place pour ne pas nous laisser pour l’instant déranger par la réalité. Car si la réalité du problème est simple, la réalité de la solution est vertigineuse et apeure tout le monde.

Les paravents sont éducatifs quand on fait croire que l’accumulation de connaissance génère le discernement. Ils sont politiques quand on arrive à faire croire que l’avis majoritaire de la foule définit l’intelligence. Ils sont économiques quand on prétend qu’il existe des cycles et que tout repart toujours, alors que seule la guerre est cyclique quand elle devient la seule capable de remettre les yeux en face des trous.

L’un des pires paravents économiques est la fausse croyance que nous créons des richesses à nous partager et que le PIB mesure une production alors qu’il ne mesure qu’une activité sans différencier l’activité saine de l’agitation malsaine. Les diatribes actuelles entre d’un côté les pays comme l’Angleterre ou l’Espagne qui mettent la prostitution et la drogue dans le PIB et qui sont soutenus en France par le sénateur Philippe Marini, président de la commission des finances, et de l’autre l’INSEE qui continue à vouloir faire croire que le PIB est une production et qu’on ne peut y intégrer « l’immoral », ces diatribes montrent bien l’étendue du faux débat. Tout le monde sait que le PIB et la croissance ne mesurent que l’activité et qu’ils ne se soucient ni de l’origine de ce qui est vendu, ni de l’origine des fonds qui ont permis l’achat. La prostitution comme la drogue, les accidents de voiture ou les marées noires font évidemment techniquement de la croissance. Ce qui est stupide ce n’est pas de faire le lien entre la croissance et l’emploi mais de faire croire que la croissance enrichit et permet l’emploi alors qu’elle se paye et que l’unanimité est totale pour ne pas se demander qui paye.

Nous ne pouvons consommer que ce que notre travail nous rapporte s’il est reconnu utile par le groupe. Ce que nous produisons n’est richesse que si c’est acheté par quelqu’un qui en a envie et qui a de quoi l’acheter. Si personne n’en a envie ou si le client potentiel n’a pas de quoi payer, la production n’est plus richesse mais encombrement ou déchet. Cette évidence simple est très dérangeante car elle limite notre consommation et nous force à nous bousculer. Elle est totalement anti électorale car elle évalue notre consommation à l’aune de notre utilité réelle. Et comment évaluer notre utilité réelle dans un groupe dont nous ne savons plus ni la taille, ni le lien, ni même s’il existe encore ?

Alors pour ne surtout pas regarder la réalité en face et continuer à flatter l’électeur qui ne peut payer sa consommation, on tente de faire payer les autres et de faire payer le futur.

Faire payer les autres, c’est la balance commerciale excédentaire. Chacun la veut dans ce mondialisme qui vante la liberté des renards dans les poulaillers. Chacun se croit renard et beaucoup se retrouvent poules. C’est notre cas où à force de vouloir faire payer les autres, nous payons en plus pour les autres. Nous devons retrouver le bon sens que la dernière guerre nous avait réintroduit par le Conseil National de la Résistance et par la charte de La Havane que l’ONU avait préparée mais que les USA n’ont pas ratifiée après l’avoir pourtant signée. La Charte de La Havane confirmait qu’on ne fait pas payer les autres et que les balances commerciales ne peuvent être ni excédentaires ni déficitaires.

Faire payer le futur c’est l’emprunt. Il est pourtant par définition irremboursable puisqu’il n’y a création de richesse que si elle est consommée et qu’elle ne peut donc servir une deuxième fois à rembourser un emprunt. La démonstration mathématique que la somme de toutes les valeurs ajoutées de toutes les entreprises n’est égale qu’à la somme de toutes les consommations, est prudemment mise sous le boisseau pour ne pas déranger. Un emprunt remboursé est forcément un appauvrissement créé quelque part. Si l’on n’arrive pas à faire provisoirement payer les autres comme le fait l’Allemagne, l’appauvrissement s’accumule dans les entreprises avec les conséquences que l’on constate et que les puissants appellent la crise.

La guerre remet les yeux en face des trous et quand elle se termine, le bon sens reprend provisoirement le dessus. Ne pourrions-nous pas, pour remettre les yeux en face des trous, donner sa chance à notre intelligence et éviter les drames de la guerre ?

Vœux, promesses faites aux dieux.

Le début d’année est traditionnellement le moment des vœux. Vœu vient de votum, participe passé du latin classique vovere qui veut dire « faire une promesse à une divinité  en échange d’une faveur demandée ou accordée ». C’est une forme de contrat moral et il est très intéressant de noter que c’est aussi l’étymologie du vote qui ne vient pas de vox, la voix, mais de votum, le vœu. Le vœu est devenu à la fin du XIXème siècle « une demande faite par qui n’a pas d’autorité pour la faire appliquer » (dictionnaire historique de la langue française). On comprend mieux alors les vœux tristes et pieux du Président de la République.

Alors, quel contrat pour 2014 ? Que demander aux dieux et que leur proposer ?

Nous ne pouvons leur proposer que notre énergie mais nous pouvons leur demander de la transformer en discernement, en courage et en humilité.

En discernement

Pour comprendre que notre monde croit plus à l’apparence qu’à la réalité. Qu’il s’endort rapidement dès qu’il voit qu’en important, on a de quoi vendre et qu’en empruntant, on a de quoi acheter. Il s’endort d’autant plus qu’on lui serine que tout cela fait du PIB, de la croissance et une prétendue richesse à partager avec la Terre entière. C’est tellement plus agréable que de travailler pour fabriquer et pour gagner l’argent nécessaire aux achats.

Pour comprendre que les services n’ont de vraie utilité qu’au service de la production et que le service de la personne physique est un agrément qu’il faut savoir accueillir avec modération.

Pour comprendre que le but de l’éducation n’est pas de trouver un emploi et donc un employeur mais de prendre conscience de là où l’on pourrait être le plus utile au groupe et y aller pour être véritablement attendu et donc accueilli.

Pour comprendre que la politique ne devrait pas être la lutte égoïste et âpre pour les places mais le travail difficile et altruiste qu’est l’affrontement des problèmes. L’un des premiers problèmes à affronter est la sanctification du mot démocratie qui se présente comme étant l’avis majoritaire de la foule, après que l’on ait dogmatiquement réputé cet avis comme étant forcément intelligent.

Pour comprendre qu’il pourrait y avoir une communauté européenne si quelques pays décidaient de s’unir par une harmonie sociale et fiscale en renonçant à la fausse Europe actuelle où 28 égoïsmes veulent faire payer les 27 autres en manœuvrant sur les différences fiscales et sociales et en faisant souvent semblant d’avoir une monnaie commune

Pour comprendre que la guerre résout instantanément tous les problèmes de fond et que penser l’éviter en admirant notre immobilisme est probablement aussi à courte vue que croire que la croissance peut réduire le chômage. Le seule façon d’éviter la guerre est de ne pas la laisser être la seule solution.

En courage

Pour bouger et voir comment, par l’action, par la réflexion ou par l’échange, chacun d’entre nous peut être concrètement utile au sortir de la léthargie générale.

Pour refuser de rejoindre la grande cohorte de ceux qui attendent pour bouger que les évènements les y forcent.

Pour entendre le fameux Lekh Lekha ( Va vers toi-même) que Dieu ordonna à Abraham.

En humilité

Pour savoir nous limiter à nos propres problèmes. Ils sont tellement énormes que, pour ne pas les affronter, nous nous laissons facilement distraire par le sort des femmes en Afghanistan, celui des chrétiens en Centrafrique, celui d’on ne sait plus qui en Syrie, celui du Mali qui n’existe que par un regroupement disparate imaginé par le colonisateur ou encore par les élucubrations égocentriques d’un quelconque satrape comme Bernard-Henri Levy.

Pour ne pas traiter par le mépris ceux qui veulent différencier le protectionnisme et l’autarcie et qui n’attendent du protectionnisme qu’une concurrence libre et non faussée nous permettant d’affronter nos propre problèmes sans y surajouter ceux des autres mais sans attendre les solutions de l’extérieur comme le font lâchement les tenants du libre échange.

Puissent les dieux nous entendre, nous éclairer et nous transformer !

Bonne année 2014

La société de l’apparence

Ce qui se passe actuellement est tellement simple, les innombrables façons de le cacher tellement compliquées et pour des raisons tellement peu avouables qu’il faut vraiment prendre le temps de s’interroger sur la façon de faire comprendre l’essentiel pour sortir de la crise.

L’économie d’un groupe c’est son action. Dans tout groupe on consomme des biens et des services et l’on produit des biens et des services. Si le groupe est sans contact avec d’autres groupes, les membres du groupe consomment ce qui est produit et produisent ce qui est consommé. Pour cela les membres du groupe travaillent et produisent les biens et les services dont les autres ont besoin. Chacun en vendant sa production se fournit de quoi acheter ce dont il a lui-même besoin. Les prix s’établissent par le regard commun qu’acheteur et vendeur portent sur la transaction. Le prix doit permettre à l’acheteur comme au vendeur d’équilibrer son budget.

Mais depuis deux siècles et surtout depuis 40 ans, nous avons profité de découvertes extraordinaires comme la machine à vapeur, l’électricité, la sidérurgie, le cinéma, le téléphone fixe puis portable, la voiture, l’avion, le nucléaire, la télévision, les fusées, l’informatique et internet pour oublier la base de l’économie et croire que nous pouvions consommer sans produire nous-mêmes, jouir sans travailler vraiment.

Pour ce faire nous avons fabriqué la société de l’apparence : nous avons emprunté ce qu’il fallait pour acheter et nous avons importé ce qu’il fallait pour vendre. Cela a donné du mouvement que nous avons appelé PIB et qui est devenu la référence de l’intelligence économique. Il suffisait d’y penser !

Notre société s’est donc organisée sur trois pieds :

L’esclavage dans l’espace pour importer au moins cher, l’esclavage dans le temps pour permettre l’emprunt et le plus difficile, la manipulation des esprits pour faire croire que l’impossible était non seulement possible mais souhaitable et bon.

L’esclavage dans l’espace a été confié aux multinationales qui, par le libre-échange, arrivent à faire fortune avec les pays émergents comme les négriers faisaient fortune avec le nouveau monde.

L’esclavage dans le temps a été confié au monde de la finance qui a changé le sens des mots pour passer inaperçu. L’inflation n’est plus l’augmentation de la masse monétaire mais sa conséquence qu’est la hausse des prix. L’usure n’est plus le prêt à intérêt condamné par toutes les sagesses et toutes les religions mais simplement son excès. Le mal n’a plus de mots pour qu’on puisse l’exprimer.

La manipulation des esprits a été confiée à la classe politico-médiatique qui a reconstitué par l’extérieur le lien premier entre la production et la consommation et qui a fait entériner par les peuples que l’impossible était possible.

Pour reconstituer le lien entre la production et la consommation on a abandonné le concret qui tient compte des économies d’échelle dans un quotidien à taille humaine pour un abstrait incompréhensible et planétaire confié à une classe politico-médiatique internationale qui lie les deux esclavages à l’ONU, à l’UNESCO, au FMI, à l’OCDE, à l’OMS, à la banque mondiale, à l’OMC, à Bruxelles, à Luxembourg, à Strasbourg ou à Francfort tout en saupoudrant la Terre de journées contre l’esclavage évidemment réduit à la traite négrière.

Pour faire entériner par les peuples que l’impossible était possible, on a séparé l’éducation du concret tout en jurant qu’au contraire on l’en rapprochait, et les classes politico-médiatiques nationales ont sollicité les deux esclavagistes. Au premier on a demandé de faire croire aux peuples que les autres peuples paieraient pour eux en achetant leur intelligence et qu’ils auraient donc le travail à vie d’être admiré et payé du don de leur savoir. Au second on a demandé l’énorme masse d’argent nécessaire pour que les peuples viennent dire dans l’urne le jour prévu que tout cela est d’une intelligence remarquable.

Un indice de la réalité de ce constat est que c’est dans ces trois pieds, dans les multinationales, dans la finance et dans le monde qui parle dans les médias, et uniquement dans ces trois pieds que l’on s’enrichit facilement.

Pour retarder l’écroulement ou l’explosion de cette usine à gaz impossible, on a fabriqué une science économique qui oublie les deux bases de la vraie économie : l’argent est de l’énergie humaine stockée et ce qui est vrai à 100, ne l’est pas forcément à un million et encore moins à un milliard.

Le résultat en est évidemment une crise car la réalité se rebiffe, le rêve ne peut être éternel. Nous vivons un temps bizarre. La science économique, pour rassurer, parle de cycle. La classe politique annonce la sortie de la crise au fur et à mesure que nous nous y enfonçons davantage. La classe médiatique nous vend de l’évasion et de la bonne humeur en faisant parler ceux qui ne savent pas et en empêchant de parler ceux qui savent. Ceux qui parlent expliquent doctement ce qu’ils n’avaient pas prévu et passent le relais à ceux qui amusent. Et les peuples ont peur.

Qui remarquera que la guerre, quels que soient les adversaires, résout d’un coup tous les problèmes ? Et guerre et paix ne seraient-ils pas un cycle suffisamment connu de l’humanité pour que nous cherchions moins à vendre notre intelligence aux pays émergents qu’à l’utiliser chez nous pour le bien de la paix ? Ne faut-il pas commencer par nous interroger sur l’environnement cohérent et sacré dans lequel nous pourrions être solidaires ?

Tout va très bien Madame la Marquise…

En cette fin d’année 2012 réjouissons-nous d’avoir des dirigeants, toutes tendances confondues qui « réforment pour redresser » en évitant soigneusement l’horreur absolue qu’est le protectionnisme qui nous ferait inéluctablement retourner « aux heures les plus sombres de notre Histoire ». Leur quasi-unanimité fait plaisir à voir et force à la réflexion. Et si le libre-échange était la solution ? Et si c’étaient eux les bons médecins ? Ils sont tous d’accord !

Tournons-nous vers la science médicale.

On peut ouvrir grand les fenêtres de la chambre d’un malade par grand froid pour vérifier que seuls les plus robustes s’en sortent. On peut aussi fermer les fenêtres et s’intéresser à la santé du malade en examinant l’air qu’il respire, la nourriture qu’il mange et tout ce qu’il boit, pour chercher ensuite à comprendre ce qui le rend malade et faire ce qu’il faut pour le guérir.

Ce qui est incompréhensible c’est d’ouvrir les fenêtres en faisant rentrer le vent glacial tout en se lamentant sur la dégradation de la santé de ce pauvre malade ! Pour arriver à cette contradiction aberrante il faut cumuler la faiblesse du malade qui se laisse faire, la crédulité de son entourage qui croit bien faire et la folie du praticien qui par bêtise, suffisance ou cynisme, fait croire que ce n’est pas contradictoire et que c’est même indispensable.

Quand le malade se sent de plus en plus faible et qu’il ne peut même plus se lever pour fermer la fenêtre, il se replie sur lui-même, remonte sa couverture, cherche à se convaincre que le praticien sait ce qu’il fait ou que l’été va arriver tout en se préparant à l’inéluctable. Il ne cherche même plus à convaincre son entourage de ne plus suivre aveuglément les conseils du praticien. Il n’a plus la force de les réveiller. Il a pourtant essayé mais on lui a envoyé les infirmiers. Sa peur se transforme en haine, haine de soi ou haine des autres, puis en désir de violence contre lui ou contre l’entourage. Il est en attente permanente de sa propre déflagration.

L’entourage lui, est inquiet. On lui a fait croire que fermer la fenêtre, c’était être agressif vis-à-vis des voisins, et que la vie en commun avec eux était bénéfique, moderne, inscrite à la fois dans le beau, le bien, le vrai, le juste, le pur et le riche. On lui a expliqué que la science ordonnait d’ouvrir les fenêtres et que les fermer s’appelait le protectionnisme et avait généré Adolf Hitler. Comme il comprend mal la logorrhée mais s’en laisse impressionner, l’entourage laisse faire le praticien tout en constatant que les voisins sont plus en train de creuser des tranchées que d’ouvrir les bras. Il se dit qu’il n’y connait rien alors que le praticien est compétent, choisi par la famille et assez crédible quand il explique l’accroissement du nombre de morts par une épidémie qu’on n’avait pas connu depuis 1929. Au fond de lui-même l’entourage n’y croit pas mais les medias le font tellement saliver sur les prochains combats entre les marrons et les gris, sur le sensationnel et le spectaculaire, qu’il fait semblant d’y croire en s’évadant dans le prochain tirage du loto et dans les vies intimes volées aux étoiles tombées du ciel. Et tant pis pour le malade. C’est vrai qu’avec une telle épidémie, on n’y pouvait pas grand-chose ! De profundis.

Mais tout cela ne pourrait exister sans le praticien, sans celui que l’on a caricaturé, un sac de riz sur l’épaule et qui a tout appris à l’Ecole Nationale d’Anesthésie. Il a appris à se faire aimer, à se faire admirer, à se faire choisir et à se faire retenir. On lui a dit qu’il avait été distingué parce qu’il savait déjà tout et qu’on allait donc simplement lui apprendre à le faire savoir. Bien sûr « plaire ou conduire, il faut choisir » mais comme il savait déjà naturellement conduire, il suffisait de lui apprendre à plaire. Il lui fallait rapidement séduire les medias pour avoir la fidélité des familles. La maladie devait être ce dont il devait parler mais en pensant clientèle. Il ne devait jamais oublier de se constituer sa clientèle familiale en se souvenant que pour les Latins famulus comme cliens voulaient dire serviteur et qu’une clientela était à Rome un ensemble de personnes soumises ou dépendantes. On lui a aussi appris que pour retenir durablement sa clientèle il fallait agir sur trois niveaux.

Le premier niveau est de fragiliser la clientèle en la séparant de sa raison pour ne la motiver que par ses besoins et ses sentiments. Tout pour le cœur et le ventre, rien pour le cerveau. Pour cela une instruction que l’on métamorphose discrètement en éducation tout en veillant à négliger toujours l’expérience et le discernement qui risqueraient d’harmoniser les patients. Faire croire qu’une accumulation de connaissances suffit à fabriquer des hommes debout est essentiel à la survie du système. Il faut retarder au maximum la confrontation au réel et garder le plus longtemps possible la future clientèle dans cette chrysalide du formatage. Il ne doit pas y avoir de service national et un accompagnement de flatteries pédolâtres est conseillé pour la réussite de cet amollissement obligatoire.

Le deuxième niveau est de se rendre indispensable par la création d’une science qui affirme qu’ouvrir les fenêtres des chambres de malades surtout quand il gèle, mène à la guérison toujours annoncée et jamais advenue. Tout le monde croit cette science car elle est fondée sur deux principes éternels : celui des médecins de Molière et celui des habits neufs de l’empereur d’Andersen. Le premier affirme :  « Ossanbabdus, nequer, potarinum, quipsa, milus. Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette ». Le second rappelle que seuls les sots ne comprennent pas. Les deux principes, une fois aussi intimement liés qu’un politique et une journaliste, font que tout le monde croit cette science dite « économique » sans doute parce qu’elle permet d’économiser le discernement.

Le troisième niveau est la pérennisation du système par le développement de la séduction et de la maîtrise déjà initiées aux niveaux précédents.

Pour la maîtrise, le corps des infirmiers est là pour inverser ce que tout parent apprend dès leur plus jeune âge à ses enfants : « Dépêche-toi ! » et « Fais attention ! ». Les infirmiers sont recrutés pour que soient punis ceux qui s’obstinent à ne pas comprendre que la vitesse est un défaut. Ils sont là aussi pour rendre inutile l’attention et la vigilance puisque du matériel est scellé (garde-fous plots, chaînes) pour qu’il soit physiquement impossible de faire ce que les praticiens ont décrété dangereux. On ressort le lit à barreaux pour une clientèle adulte déjà inscrite comme futurs malades récalcitrants.

Pour la séduction il ne faut pas lésiner car il faut accepter de payer très cher ceux qui sont capables de faire croire que cela va aller mieux quand tout va de plus en plus mal et qui surtout, sont capables d’expliquer quand cela va encore plus mal, que nous voyons enfin le bout du tunnel. Ils savent convaincre que le PIB, la croissance et la valeur ajoutée sont des richesses quand ce ne sont en fait que des dépenses. Ces illusionnistes du bonheur sont irremplaçables car ils arrivent à faire croire à la clientèle que c’est elle qui décide par un jeu très amusant que les praticiens appellent la démocratie. Ce jeu consiste à dépenser ce qu’il faut pour convaincre la clientèle malade de plébisciter les praticiens entre 8 heures et 20 heures un jour précis, choisi plusieurs mois à l’avance, où la clientèle devra donner son avis. Peu importe les moyens à y mettre. La difficulté est de viser juste et que l’attirance sentimentale et la satisfaction des besoins dépassent très précisément ce jour-là le rejet que la raison imposerait si on la laissait se construire et s’exprimer. Il faut évidemment être très riche pour jouer à ce jeu qui est, de fait, toujours réservé aux mêmes praticiens et à ceux qu’ils cooptent. Il faut être très riche pour augmenter le nombre des infirmiers et augmenter les rémunérations des hommes de média. Or les praticiens se voient pauvres et ne peuvent sans déplaire demander trop directement beaucoup d’argent à leur clientèle. Les hommes de média ont donc expliqué à la clientèle qu’il était important pour elle que le niveau de vie des praticiens soit assuré et que la collectivité devait s’en charger. La collectivité paye donc les praticiens pour qu’ils paient les medias qui vont expliquer que les praticiens ont tout compris.

Mais ce n’est pas suffisant et le « faire croire » est hors de prix. Les praticiens ont donc décidé de protéger coûte que coûte le système financier créateur d’argent qui seul peut donner l’argent inexistant qui permettra de faire les dépenses de plus en plus importantes mais de plus en plus indispensables à la non explosion du système. On utilisera sans vergogne les trois niveaux pour que personne ne réalise que tout sera payé au bout du compte par la dévaluation et la hausse des prix c’est à dire par les épargnants et par les consommateurs. Les praticiens bénissent cet impôt privé qui leur assure leur avenir. Les seuls à ne pas y croire sont les hommes du système financier eux-mêmes qui savent que tout ne tient que par le double esclavage dans l’espace par le libre-échange et dans le temps par le prêt à intérêt et les échéances de fin de mois à perte de vue. Ils savent le pourcentage énorme d’actifs irrécupérables non provisionnés et ils ont tellement peur de la proximité de leur propre explosion qu’ils ne se prêtent même plus entre eux. Les praticiens ont compensé le double esclavage par une journée annuelle de condamnation sans appel de l’esclavage des gentils noirs par les vilains blancs. Ils retardent l’explosion des banques en offrant en garantie la fortune de leur clientèle. Mais personne n’y croit plus…sauf ceux que nous payons à nous y faire croire.

Tout va très bien, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien. Pourtant, il faut, il faut que l’on vous dise, on déplore un tout petit rien : un incident, une bêtise…