L’homme, la richesse et l’argent

Toute civilisation est fondée sur une approche personnelle du beau, du bien et du vrai. Il en découle sa notion de la justice, combinaison du bien et du vrai, sa notion de la clarté, réunion du vrai et du beau, et sa notion de la richesse, alliance du beau et du bien. Toutes les civilisations cherchent à harmoniser ces trois notions, a rendre vraie la richesse, à rendre belle la justice et à rendre bonne la clarté. Elles appellent toutes cela la prospérité du mot prosper qui veut dire en latin heureux.

Tout groupe, famille association oïkos, se fonde sur le donner-recevoir-rendre qui est, comme le disait Mauss, un « fait social total » juridique, économique, culturel, symbolique et religieux. Ce fait social est au service du groupe et le nourrit. L’échange se fait naturellement, la vérification ne se faisant que par la mémoire et la bonne volonté de tous. La mémoire permet de maîtriser la réalité de l’échange dans le temps et la bonne volonté garantit l’action de chacun.

Lorsque le groupe devient trop important, la mémoire devient inefficace et la bonne volonté incertaine. Le groupe devient société et invente la monnaie qui remplace le donner-recevoir-rendre en étant à son tour le « fait social total » de Marcel Mauss, juridique, économique, culturel, symbolique et religieux.

La monnaie (venant de moneo forme causative de la racine men de la mémoire) a l’immense avantage d’être un titre de créance sur le groupe, titre transmissible et reconnu par tous les membres du groupe mais elle a un immense inconvénient : étant un titre de créance elle doit avoir une raison d’être et cette raison d’être est laissée à l’appréciation des fabricants de la monnaie.

Quand ils sont honnêtes intellectuellement ils ne créent de la monnaie qu’après que des membres du groupe soient devenus créanciers du groupe par leur travail. Quand ils le sont moins ils créent la monnaie avant que quiconque ait travaillé pour le groupe et en soit créancier. Dans ce cas ils ne créent pas de la monnaie pour reconnaître une dette déjà existante mais ils inscrivent une nouvelle créance de même montant à récupérer plus tard.

Dans une société cohérente le groupe, par l’intermédiaire de l’État, introduit la monnaie en distribuant à chacun une même quantité de monnaie en reconnaissance de ce que chacun a déjà apporté au groupe. Ensuite il crée de la monnaie chaque fois qu’il reconnait qu’un individu lui a apporté quelque chose. Il crée donc de la monnaie pour payer ses fonctionnaires comme ses fournisseurs. S’il a trop de fonctionnaires ou s’il dépense trop, il crée trop de monnaie qui ne correspond plus à un vrai travail effectué. La monnaie se dévalorise et le groupe entier en pâtit. Si en revanche l’État limite ses fonctionnaires et ses dépenses au strict minimum et à la réalité de l’apport réel au groupe, la masse monétaire n’augmente que très progressivement et la monnaie peut même se revaloriser au bénéfice de tous. L’État est responsable devant son peuple de sa gestion.

Dans une société incohérente la monnaie n’est plus créée pour reconnaître une dette pour un travail utile déjà effectué mais elle est un prêt, donc accompagnée d’une créance de même montant sur celui à qui le groupe a fait ce prêt. On va inventer, pour justifier cette création monétaire non causée par un travail utile déjà effectué, l’idée de travail utile à effectuer. La création monétaire n’a plus de frein naturel puisqu’elle n’est plus qu’un prêt. On la justifie par les notions fumeuses de création de richesses et d’investissement et dans la réalité elle ne fait que dévaloriser la monnaie et entraîner une hausse permanente des prix. L’État se désengage de sa gestion, laisse aux banques la création de la monnaie et aux entreprises l’exclusivité de l’utilisation des énergies individuelles. Il ne sert plus à rien si ce n’est à faire le beau et à utiliser à mauvais escient la violence légitime qui lui a été confiée. Ainsi naissent les révolutions.

Dans l’attente de cette révolution et l’incohérence régnant, l’État va nier les races, les différentes civilisations, les différences entre l’homme et la femme avec leur complémentarité. Il va faire de la morale pour exister et se donner une raison d’être puisqu’il a abandonné la sienne. Il va à l’extérieur essayer de faire payer sa propre incurie aux autres civilisations en inventant et en sacralisant le commerce international et les causeries entre soi. Il va à l’intérieur tel Don Quichotte attaquer le tabac, l’alcool, la vitesse, la fessée et toutes les formes de violence sauf la sienne. Il va survaloriser les entreprises pour que, par leurs productions elles fassent circuler l’argent en distribuant l’argent de leurs clients à leurs fournisseurs, à leurs salariés, à leurs actionnaires et à l’État, tout en les accusant de laisser des gens au chômage comme si leurs rôles étaient celui de l’État de veiller à ce que chacun soit utile au groupe. Il va faire croire que dépenser de l’argent créé par les banques, c’est créer des richesses. Bref il va tout faire pour engendrer cette révolution qu’il redoute et qui naît de sa propre incohérence.

A propos sommes-nous plutôt dans une société cohérente ou incohérente ?

Le boomerang

Richard Nixon a été obligé de reconnaître en 1971 que les accords de Bretton Woods étaient inapplicables et que les monnaies liées au dollar, lui-même lié à l’or, ne faisaient que faire fondre l’or de Fort Knox en l’absence de source énergétique de la monnaie.

Depuis, sans rien résoudre ni même poser correctement le problème, nous avons inventé une usine à gaz où les banques, centrales et commerciales ne font que reporter le problème en mettant à disposition de l’argent qu’elles créent et en mettant le même montant en créance à recouvrer sur les bénéficiaires des richesses futures que cet argent « investi » aura prétendument créées. Les banques centrales détiennent des créances sur les peuples dont on ne parle jamais et les banques commerciales sur des entités dénommées qui remboursent quand elles le peuvent.

Pendant que les banques sont au plus mal et attendent l’hallali, les peuples que l’on a formatés pendant un tiers de leur vie dans les écoles et les universités à croire à la réalité des richesses créées, l’ont cru et mettent des gilets jaunes pour dire qu’ils veulent leur part de la richesse créée.

Les cornichons qui ont tellement bien vendu l’idée de création de richesses au point qu’ils y croient eux-mêmes, n’ont fait que réinventer pour la énième fois le boomerang car avec quoi vont-ils partager une richesse qui n’existe pas, qui n’est qu’un regard créé à grand frais par la publicité, ventilé à grand frais sur toute la Terre par les médias et rendu crédible par une toute petite minorité qui se pavane en dépensant publiquement sa fausse monnaie ?

Bon courage !

L’énergie monétaire

Sujet explosif tellement les positions sont tranchées et apparemment contradictoires. La monnaie est neutre, elle n’est qu’un voile, disent les uns. Elle est d’une puissance folle et elle permet tout, disent les autres. Est-il possible et crédible que chacun ait raison et tort à la fois ?

L’énergie électrique existe à n’en pas douter, chacun le vérifie chez lui tous les jours. Elle fait fonctionner à la maison une multitude d’appareils, du réfrigérateur à la télévision en passant par l’éclairage, voire même le chauffage. Et pourtant si la centrale s’arrête ou si l’alimentation est coupée, c’est la panne! L’énergie électrique n’est en fait que l’énergie utilisée par une centrale électrique qui l’a transformée pour la véhiculer. Elle est neutre en elle-même puisqu’elle ne rajoute rien. Mais qui pourtant peut dire que l’énergie électrique n’existe pas ?

C’est exactement la même chose pour la monnaie. La monnaie est simultanément, à sa création, une créance et une dette, un actif et un passif. C’est la double écriture des banques qui créent l’argent en le mettant simultanément à leur passif à disposition immédiate de leur client et à leur actif, en créance différée sur ce même client. Il n’y a évidemment aucune création d’énergie dans l’écriture simultanée d’une dette et d’une créance et pourtant personne ne peut  nier que l’argent loge, nourrit, habille, transporte, soigne et la liste est sans fin. Il y a une énergie monétaire créée par une action apparemment totalement neutre.

Cela est possible car l’action neutre de la création monétaire n’est neutre que par l’addition de deux actions inverses de même force, une dette et une créance, qui ne sont pas neutres du tout quand elles sont prises isolément. Une dette est une reconnaissance d’avoir reçu quelque chose, un bien, un service, de l’énergie qu’elle qu’en soit la forme si elle est reconnue comme positive. Une créance est le constat d’avoir fourni cette énergie.

La monnaie permet que les échanges d’énergie positive à l’intérieur d’un  groupe ne soient pas forcément simultanés. C’est le « donner-recevoir-rendre » de Marcel Mauss, si évident en famille et dans une association, si fragile sans argent quand le groupe est important et si idéologique et irrationnel quand on veut imposer le même au monde entier. La monnaie permet de stocker l’énergie d’un individu en reconnaissant la dette qu’à le groupe à son égard, en en faisant une créance transmissible à tout porteur, créance échangeable avec tout bien ou service apprécié par le groupe. La monnaie n’est pas une reconnaissance de dette, c’est un constat de créance sur le groupe qui ne peut exister que si le groupe se reconnait débiteur.

La monnaie transfère dans le temps et dans l’espace par une sorte de vecteur spatio-temporel l’énergie humaine quand elle a été reconnue comme positive par le groupe utilisateur de cette monnaie. La création de monnaie saine se fait donc par l’obtention par un individu d’une créance sur le groupe. Le groupe constate que cette personne lui apporte plus qu’elle ne reçoit de lui et il officialise cette créance en créant de la monnaie qu’il lui donne. La monnaie est une créance que le porteur détient sur le groupe qui utilise cette monnaie, ce qui la rend énergétique dans l’ensemble du groupe.

Une économie saine vient du nombre le plus important possible de personnes qui apportent plus à la collectivité qu’elles n’en reçoivent. C’est ce déséquilibre vertueux que l’État doit équilibrer par la création de monnaie qu’il distribue à ses créanciers sans jamais être un État providence.

Dans une société vivante, les individus contribuent à l’édification et au fonctionnement de la société, soit seuls soit en se regroupant pour être plus efficaces. Naissent ainsi les artisans, les entreprises et les services qui les aident à produire en les soignant, en les défendant, en donnant un sens tant au groupe qu’à l’action de chacun. Une gestion saine de l’énergie monétaire par l’État permet d’équilibrer la production et la consommation, en laissant toute leur place aux seules questions difficiles, la raison d’être du groupe et la raison d’être de chacun de ses membres.

Une société meurt brutalement par la guerre ou insidieusement quand les commentateurs deviennent plus nombreux que les acteurs et que l’on interdit, d’abord par la manipulation médiatique puis par la loi, de regarder la vérité en face.

Là s’arrête la réflexion et commence la simple observation des dérives, toutes fondées sur la survalorisation du groupe ou sur la survalorisation de l’individu, toutes deux vantées par des gens qui se survalorisent eux-mêmes.

Le XXe siècle a éradiqué deux dérives totalitaires qui mettaient le groupe au-dessus de tout et qui n’avaient pas de respect pour ceux qui ne rentraient pas dans leur idéologie. Cette dérive nous menace encore aujourd’hui chez ceux qui, pour construire leur Union européenne ou leur gouvernance mondiale, ont un total mépris pour l’opinion des peuples, pour leur existence même, et voudraient les faire voter et revoter jusqu’à ce qu’ils votent à la convenance de leur idéologie prétendument universelle, fut-elle difficilement défendable si on respecte vraiment les individus, et dans leur diversité, et dans leur similitude.

Mais cette dérive idéologique ne doit pas cacher l’autre dérive inverse qui survalorise l’individu au détriment de la collectivité sans voir que seul l’État peut détenir la violence légitime (armée, justice, police) et l’émission de la monnaie, constat de l’énergie de son peuple. Cette dérive, en laissant aux banques privées l’émission de la monnaie, fait perdre à la monnaie son rôle régulateur qui est de plus en plus laissé à la violence sans que notre prétendue élite autoproclamée ne se rende même compte qu’elle ridiculise son armée, sa justice et sa police qui doivent se singulariser pour exister et se féminiser pour être dans le vent. Le matraquage de la violence faite aux femmes n’est-il pas là pour faire oublier que l’on confie de plus en plus aux femmes la violence légitime avec un succès à vérifier ?

La société de l’apparence dans laquelle nous vivons aujourd’hui et que nous fabrique la classe politico-médiatique, voit apparemment s’affronter ces deux dérives pour ne pas voir qu’en fait elles s’additionnent.

Ces deux dérives se sont habillées de fausses querelles pour se donner une impression de sérieux: divergence droite-gauche, discorde socialistes-libéraux, opposition nationalistes-mondialistes. Cela occupe l’affect et endort la raison. Nous ne voyons même plus qu’au lieu d’additionner chaque fois les qualités de ces deux parties de nous-mêmes que sont le mouvement et l’harmonie, nous en additionnons les défauts qui sont le désordre et l’immobilisme, deux prémices du chaos.

Tant que nous ne retrouverons pas l’évidence que la vie matérielle n’est que transformation et échange dans un donner-recevoir-rendre harmonieux, tant que nous croirons à la création et au partage des richesses, tant que nous croirons possible de libérer une énergie qui n’a pas été préalablement enfermée et que le crédit peut être sur richesses futures alors qu’il ne peut être que sur gage comme il a toujours été ou sur l’aval collectif que seul l’État peut donner, tant que nous croirons pouvoir utiliser aujourd’hui l’électricité que la centrale produira demain, tant que l’énergie monétaire ne sera ni comprise ni gérée, nous resterons par notre passivité, complices de ce qui nous arrive.

 

La fausse monnaie a remplacé l’homme comme pivot de l’économie

Du silex taillé à l’intelligence artificielle, l’homme a toujours tenté d’accroître l’efficacité de son énergie. Il l’a d’abord fait par l’outil qui affine son énergie en la rendant plus précise, puis par la machine qui utilise une énergie externe pour remplacer l’énergie humaine.

La première machine a été la roue qui, encore outil dans la brouette ou la charrette à bras, était déjà machine dans le chariot à traction animale. L’intérêt indiscutable de la machine est de libérer l’homme pour qu’il puisse utiliser autrement et mieux sa propre énergie, ce qui fut fait partout dans le monde pendant des siècles, voire des millénaires.

Les premières machines utilisant une énergie ne nécessitant pas de repos furent le voilier sur mer et le moulin sur terre, qu’il soit à eau ou à vent. Ces machines étaient toutes construites par l’homme avec ses outils, et un équilibre s’est naturellement installé entre le travail nécessaire et les besoins existants, le travail freinant les besoins, les besoins stimulant le travail.

Depuis que la monnaie a remplacé le donner-recevoir-rendre que l’on connait encore dans la famille et qui n’a rien à voir avec le troc, la chaîne travail-production-vente a toujours été harmonisée par la chaîne travail-monnaie-achat, toutes deux plaçant l’homme, son travail et ses désirs au centre du dispositif économique.

Les arrivées successives de la machine à vapeur, du moteur à explosion et du moteur électrique voire électronique, ont augmenté l’efficacité des machines mais le malheur a voulu que dans le même temps, on nous fasse oublier l’origine humaine de l’énergie monétaire. La société a très curieusement confié aux entreprises la gestion des deux engrenages qui pour ne pas se bloquer tournent forcément en sens inverses. Les chaînes complémentaires travail-production-vente et travail-monnaie-achat ne peuvent s’harmoniser que dans un système global cohérent que ne peuvent maîtriser isolément les entreprises et qui relève du monde politique et de l’intérêt général. Les entreprises ont cédé petit à petit pour survivre dans un monde de concurrence à la facilité de remplacer l’énergie humaine par l’énergie monétaire qui n’en est que le substitut. Elles ont fait évoluer la chaîne travail-production-vente qui démarre par l’homme, vers la chaîne machine-production-vente qui part d’une machine achetée. Cela n’a pas posé de problème au début, tant que l’argent n’était pas déconnecté de l’homme. Malheureusement cette déconnexion s’est faite par à-coups au XXe siècle. Les entreprises ont aussi affaibli la chaîne travail-monnaie-achat en conflit d’intérêt avec leurs actionnaires qui tenaient à vendre le produit des machines dans un monde devenu compétitif car chacun se voulait riche en produisant beaucoup. Pour survivre les entreprises ont initié une immigration peu coûteuse et laissé à la collectivité le soin qui leur avait pourtant été aussi confié, de gérer la chaîne travail-monnaie-achat, de fournir la monnaie nécessaire aux achats sans lesquels il n’y a pas de ventes et donc pas de PIB.

Le XXe siècle a été, par le biais du capitalisme, le siècle des triomphes de l’apparence et de la double démesure. Apparence de la mort du travail et de la spiritualité, démesure de la fabrication d’objets par les machines et démesure de la fabrication de fausse monnaie par les banques qui ne s’en expliquent que par l’excuse affligeante qu’elles détruisent cette fausse monnaie dès qu’on la leur a rendue avec intérêts. Les machines produisent et les banques fabriquent la monnaie qui va donner l’illusion que ces productions sont des richesses. Nous ne vivons plus le double circuit naturellement équilibré, et se nourrissant mutuellement l’un l’autre, du travail-production-vente et du travail-monnaie-achat où l’homme et son travail étaient les pivots de l’économie. Nous devenons simples spectateurs du double circuit incohérent qui fabrique péniblement du PIB, le circuit machine-production-vente et le circuit banques-monnaie-achat. L’homme n’est plus bon qu’à consommer et à s’appauvrir pour rembourser les emprunts. Il doit en outre apprendre à bien voter pour confirmer sa complicité avec l’incohérence proposée et son approbation à l’enrichissement du clergé du système. On s’étonne de son hésitation et de la montée de l’abstention !

Tournent à plein dans les banques, les machines à créer la dette et tournent à plein dans les médias et dans les universités, les machines à formater les individus en leur faisant croire que les richesses futures rembourseront tout. La seule différence est que les médias le font sans gêne alors que les universités le font un peu gênées.

On a vu au XXe siècle la fausse monnaie fabriquée par les banques, remplacer la monnaie saine stockant réellement de l’énergie humaine et construire un nombre incalculable de machines pour produire tout et n’importe quoi. Le travail de l’homme n’était, parait-il, plus indispensable, ce qui a ravi les démagogues qui ont simplement oublié de se demander avec quoi les hommes, fussent-ils étrangers, allaient acheter ce que les machines produisaient. On n’avait plus besoin de travailleurs mais il fallait des consommateurs pour acheter car les banques tenaient à être remboursées pour pouvoir détruire la fausse monnaie qu’elles avaient créée pour fabriquer les machines.

Les inepties inventées pour faire croire à la génération spontanée d’argent pour pouvoir le dépenser à faire du PIB, montrent la fertilité de l’esprit humain.

On a investi les esprits en faisant croire qu’un investissement qui est une dépense, permettait de créer des richesses futures, sans appauvrir personne. Les banques ont voulu dépasser Aristote qui avait « vainement cherché sur une pièce de monnaie ses organes reproducteurs ». Elles affirment les avoir trouvés en donnant au verbe investir le sens de planter de l’argent et attendre la récolte.

On a appelé Production Intérieure Brute (PIB) la somme de toutes nos dépenses annuelles publiques (57%) et privées (43%), dépenses confondues de consommation et d’investissement en laissant aux médias et aux universités le soin de nous faire croire que la dépense était une création de richesse à nous partager. Bienheureux d’ailleurs qui nous dira si les dépenses faites par des associations subventionnées sont une dépense publique ou privée. L’important est de dépenser et de faire du PIB.

On a inventé à grand frais la publicité pour  faire croire que tout ce que les machines produisaient en continu étaient des richesses et qu’il est intelligent de le reconnaître en s’appauvrissant pour les acheter.

On a inventé le chômage rémunéré puisque les machines n’étaient plus là pour libérer l’homme et lui permettre d’être utile autrement, mais pour le remplacer. On déshabille Pierre pour habiller Paul mais il y a de moins en moins de Pierre à déshabiller et de plus en plus de Paul que l’on habille de guenilles au lieu de reconnaître leur utilité tels qu’ils sont.

On a inventé les marchés à conquérir sur toute la Terre sans jamais se préoccuper de la réalité et de l’origine de l’argent que posséderaient ces nouveaux acheteurs tout en prétendant faire de la macro-économie.

On a inventé les produits qui n’existent pas encore, les métiers qui n’existent pas encore, les solutions qui n’existent pas encore… mais qui vont bien sûr tout résoudre dans une nouvelle harmonie sans doute apportée par les cigognes ou trouvée dans les choux.

On a donné un nouveau sens à la compétition qui n’était qu’une pétition commune, pour devenir le désir de la mort de l’autre avant la sienne en oubliant la coopération et le vrai vivre ensemble.

On a changé le sens du mot inflation qui était l’enflure de la création de la fausse monnaie pour devenir la hausse des prix qui ne vient que de la nullité énergétique de la fausse monnaie qui abaisse la capacité énergétique de la vraie monnaie avec laquelle on la confond.

On a inventé les subventions, le RSA, le revenu universel voire la monnaie hélicoptère pour donner à tous de la fausse monnaie pour pouvoir acheter beaucoup trop cher les fabrications en continu des machines. Tout ça sous prétexte d’une prétendue redistribution d’une manne inexistante que les banques anticipent par leur distribution de fausse monnaie.

On a créé les partis politiques qui sous couvert de démocratie « font de la politique », c’est-à-dire qu’ayant compris qu’il fallait choisir entre plaire et conduire, ils ont choisi de plaire et ont renoncé à comprendre et à réagir car cela contrarierait leurs électeurs.

Mais le pompon nous arrive maintenant avec la fuite en avant, éternelle solution si souvent utilisée par toutes les idéologies. L’Union européenne ne marche pas, c’est parce qu’il faut plus d’union. Le socialisme ne marche pas, c’est parce qu’il faut plus de socialisme. Le libéralisme ne marche pas, c’est parce qu’il faut plus de libéralisme. Le capitalisme ne marche pas, c’est parce qu’il faut plus de capitalisme. Le mondialisme ne marche pas, c’est parce qu’il faut plus de mondialisme. Et donc si les machines et la fausse monnaie des banques ne résolvent rien c’est qu’il faut plus de machines et plus de fausse monnaie.

Comme l’argent ne coûte prétendument plus rien (ce qui au passage va faire exploser les banques et les assurances) et comme les machines produisent grâce à des « investissements » qui seront récupérés sur les « richesses futures », nous avons décidé en gaspillant les ressources de l’ensemble de la Terre, que nous construirions une chose bien plus réussie que l’homme, cet animal qui se construit presque tout seul en 9 mois par un simple moment de plaisir, qui est alimenté par n’importe quoi, qui s’auto-répare pour la majorité des incidents et qui s’auto-régule en tout tant qu’il fonctionne correctement et ce, pendant des décennies. Nous construirons des robots qui meurent sans faire d’histoire et nous allons marier l’homme et le robot grâce à l’intelligence artificielle et au transhumanisme pour que la mort soit vaincue. Tout est possible puisque les machines et la fausse monnaie des banques vont s’occuper de tout ! L’homme n’aura qu’à s’appauvrir pour payer tout ça !

Et si nous retrouvions la cohérence, de la famille, de la tribu, de l’oïkos grecque, de la domus latine, de ces villages gaulois qu’Emmanuel Macron est si triste de trouver très heureusement réfractaires à sa fuite en avant ? Et si nous nous interrogions enfin sur l’utilisation intelligente de nos compatriotes à partir de ce qu’ils savent déjà faire et non à partir de ce qu’ils devraient savoir pour faire tourner un système impossible que rigoureusement personne ne défend globalement ? Et si nous envisagions de confier la chaîne travail-argent-achat à une économie mixte qui ne soit ni purement l’État comme dans le communisme, ni purement le privé comme dans le capitalisme ? Une économie qui stimule la liberté d’entreprendre tout en veillant à ce que la coopération domine toujours la compétition. Et si nous nous nous rebellions contre le formatage des esprits qui coûte si cher en argent et en temps dans les médias, dans les universités et dans les campagnes électorales ? Et si la prochaine révolution était enfin celle des esprits ? Elle pourrait germer dans les universités, dans les médias ou même dans les partis politiques puisque Pandore nous a appris en ouvrant sa boite que l’espérance ne s’éteignait jamais.

Le trépied de l’incompétence économique

Faut-il absolument continuer à faire perdre leur temps à des étudiants dans des filières économiques quand on leur apprend avec acharnement une incompétence qu’il vont utiliser ensuite avec délices pour le plus grand malheur de leur peuple ?

Les trois pieds essentiels  de l’économie y sont enseignés à l’envers.

Le premier pied est la compréhension de la monnaie dont la force énergétique connue de tous, n’existe que si elle vient d’une énergie humaine réellement utilisée. Quel pouvoir, autre que magique, pourrait avoir une monnaie que l’on imprimerait sans équivalence énergétique ? L’université se contente d’approcher la monnaie par ses usages historiques sans jamais la définir autrement que par le mensonge qu’elle aurait remplacé le troc qui n’a jamais existé nulle part et qu’elle confond avec le « donner recevoir rendre » qu’elle n’étudie pas.

Le second pied est la distinction entre la production et la richesse que n’importe quel enfant constate quand il voit une vache produire du lait et des bouses et quand il se voit lui-même produire des bisous et des bêtises. L’université n’arrive pas à faire cette distinction de peur peut-être d’être accusée de discrimination par les producteurs. Elle n’arrive pas à voir que c’est le client qui fait la richesse et non le producteur. Le client crée la richesse en abandonnant son argent de même valeur. Sans cet abandon la production n’est que rebut. L’économie est échange, l’université la voudrait création.

Le troisième pied est la prééminence du producteur sur la production alors que l’université privilégie la production en substituant l’entreprise au producteur. Elle n’étudie absolument pas la vraie création d’argent qui est la chaîne travail monnaie achat richesse au profit exclusif de la chaîne travail production vente monnaie qui n’en est normalement que le balancier équilibrant. C’est pourtant, comme dans une famille, en utilisant au mieux l’énergie de chacun tel qu’il est, et sans vouloir éternellement le formater à ce qu’il n’est pas, que le groupe peut transformer en monnaie l’énergie de ses membres et avoir suffisamment d’argent pour reconnaître, par ses achats, la richesse de la production des autres. Mais notre société, en laissant sans vergogne ses membres inactifs, en en accusant le chômage et le manque de croissance, et en se laissant « éclairer » par l’université, se prive du bon argent que ces chômeurs pourraient créer en étant utiles et, au contraire, leur en distribue pour qu’ils survivent. La chaîne travail production vente monnaie, n’étant plus alimentée par la chaîne complémentaire travail monnaie achat richesse, devient erratique et manque à la fois de clients et d’argent.

Manquant de clients, elle en cherche partout en baissant ses prix, en payant mal son propre travail et en déstabilisant l’économie des autres peuples dont elle voudrait la clientèle.

Manquant d’argent, elle fait fabriquer par les banques de la fausse monnaie qui dévalorise tout mais permet de tenir un certain temps. Mais il faut malgré tout fermer les hôpitaux, les gendarmeries, les postes….

Elle tente aussi de suspendre le temps pour retenir le désastre inéluctable. Elle fait croire à un monde qui ne manque ni d’argent ni de clients par une débauche d’argent qui n’est que de la fausse monnaie. C’est le sport, la publicité, l’intelligence artificielle, la recherche, le réchauffement climatique, le transhumanisme, le revenu universel, la monnaie hélicoptère que ce gentil cornichon de Mario Draghi trouve « intéressante ».

Pendant ce temps, « en même temps » diraient certains, les Politiques se battent entre socialistes et libéraux, entre ceux qui préfèrent l’égalité et ceux qui préfèrent la liberté. Ils attendent tous la croissance, refusent d’ouvrir les yeux et nous refont le coup de l’orchestre du Titanic qui jouait… jouait… jouait.

L’offre et la demande

L’équilibre entre l’offre et la demande est le lien fondamental entre les individus et les groupes, la justification de leurs échanges. L’anthropologue et professeur au Collège de France Marcel Mauss a parfaitement expliqué que dans tout groupe cohérent le don entraînait ce qu’il appelait le contre-don et que le « donner-recevoir-rendre » était au service du lien social et qu’il le nourrissait. Mauss a développé que le don et le contre-don était ce qu’il a appelé un « fait social total » à dimensions culturelle, économique, religieuse, symbolique et juridique et qu’il ne pouvait être réduit à l’une ou à l’autre de ses dimensions.

Les échanges fondés sur l’offre et la demande s’inscrivent dans des chaînes d’échanges et c’est la disharmonie actuelle de ces chaînes qui est à la base de toutes nos difficultés. Pour comprendre ce dysfonctionnement, il faut analyser les chaînes d’échange que les collectivités sont supposées activer lorsqu’elles ne sont plus naturelles entre les individus.

Il y a la chaîne d’échanges travail production monnaie, que l’on peut aussi appeler offre et demande de biens et de services. C’est l’activité des entreprises, celle qui fait produire aux individus des biens et des services qui vont chercher à se transformer en monnaie grâce à d’autres individus qui, en devenant clients, verront dans ces productions des richesses. C’est en abandonnant leur argent venant d’une autre chaîne d’échanges que les acheteurs mettent sur certaines productions leur tampon « richesse » alors que d’autres productions restent des encombrants, voire des déchets, par absence d’acheteurs.

L’autre chaîne d’échanges, celle génératrice de monnaie, est travail monnaie richesse, que l’on peut aussi appeler offre et demande de travail. Cette chaîne d’échanges part de l’énergie de chaque individu, tel qu’il est et tel qu’utilisable par le groupe. Dès que cette énergie utilisable est sollicitée, elle est, par son utilisation, transformée en monnaie. Et cette monnaie va ensuite reconnaître les richesses parmi les productions. Très curieusement cette sollicitation essentielle est actuellement quasiment réservée aux entreprises et à l’administration dont ce n’est pas la raison d’être, les unes devant produire, l’autre devant servir.

L’exemple de la vache illustre bien ces deux chaînes distinctes et complémentaires. Dans la première chaîne la vache produit entre autres du lait, des veaux et des bouses mais seuls le lait et les veaux se transforment en monnaie parce que dans la deuxième chaîne qui est humaine, seule l’énergie de la vache qui fabrique le lait ou les veaux est sollicitée. Son énergie fabriquant les bouses n’intéresse personne sinon les vétérinaires qui en connaissent la fonction vitale. Seul l’abandon de la monnaie pour obtenir du lait ou des veaux permet de voir que le lait et les veaux sont des richesses. L’autre production, la bouse, ne trouvant pas de client, sera un déchet et non une richesse, bien qu’elle soit aussi une production.

A l’intérieur d’une collectivité cohérente c’est le travail transformé en monnaie dans une chaîne d’échanges, qui juge, dans une autre chaîne d’échanges, de la valeur des productions nées également du travail.

La complémentarité de ces deux chaînes d’échanges fait qu’il est normalement impossible de faire fonctionner l’une sans faire fonctionner l’autre. L’une est l’offre et la demande de la production, l’autre est l’offre et la demande du producteur. Toutes les civilisations l’ont tout naturellement vérifié dans tous leurs systèmes cohérents. Pour ne prendre que notre civilisation, cela a été l’oïkos grec, la domus et la familia latines, le village, la nation (étymologiquement l’endroit où l’on est né), la patrie (étymologiquement la terre de nos pères). Le travail reconnu utile par le groupe se transforme en monnaie qui reconnait éventuellement comme richesse le résultat du travail des autres. C’est le « donner recevoir rendre » de Marcel Mauss après introduction de la monnaie.

Mais pour des raisons idéologiques et électorales, nous avons déconnecté ces deux chaînes et subordonné la valeur du producteur à la valeur de la production, nous avons négligé la chaîne qui constate la richesse au profit de celle qui prétend la produire. L’être humain n’a plus été considéré essentiellement comme producteur mais comme électeur et comme consommateur. Les hommes ont été incités à moins travailler et les femmes à moins faire d’enfants pour pouvoir consommer et remercier régulièrement, par un vote approprié, les initiateurs de ce nouvel eldorado. La collectivité s’est arrêtée de jouer son rôle d’activateur de chaînes d’échange pour s’atteler à la tâche infernale de la justification d’un système impossible. Elle n’a pas lésiné sur les moyens en n’en oubliant aucun.

Elle a dissous la notion de collectivité cohérente en créant des illusions de cohérence depuis la fin de la deuxième guerre mondiale comme la déclaration universelle des droits de l’homme, l’Union Européenne, les G6 G7 G8 G9 ou G20, l’OMC ou l’ONU, toutes ces collectivités ayant comme raison première de faire tenir un système qui subordonne le producteur à la production tout en flattant l’électeur et en ponctionnant le consommateur. Les médias, aux mains de la finance, sont chargés de fabriquer notre consentement.

Elle a laissé s’installer des monnaies qui ne sont plus du travail transformé mais le moyen de faire discrètement payer aux peuples l’enrichissement d’une petite minorité par le report systématique de la prise de conscience de leur dévaluation.

Elle a décrété que toute production était une richesse et que l’on créait des richesses chaque fois que l’on produisait. La richesse à bas prix est devenue l’horizon électoral avec une mécanisation très coûteuse qui ne libère l’homme que pour le payer à ne rien faire, c’est-à-dire pour le dégrader tout en dévaluant la monnaie.

Mais surtout elle s’acharne à fabriquer notre consentement en utilisant la formidable avancée technologique de communication que sont les médias, aux mains de la finance, pour nous faire regarder ailleurs et pour organiser la fuite en avant.

Regarder ailleurs en vantant la notion de progrès qui ne veut rien dire puisque progresser veut dire à la fois monter ou descendre selon que l’on s’en sert pour un alpiniste ou un spéléologue. Le progrès, débarrassé de son but, permet de prendre toutes les vessies pour des lanternes, surtout en chiffrant tout même l’inchiffrable.

Regarder ailleurs en ressuscitant les vieilles lunes du panem et circenses, du pain et des jeux par la triple imbécillité des subventions, de la professionnalisation du sport et de la généralisation du jeu sous toutes ses formes qui doit faire oublier, dès le plus jeune âge, le travail qui est notre dépense utile d’énergie et le devoir qui est notre dette vis-à-vis de la collectivité.

Mais c’est surtout en organisant la fuite en avant que notre collectivité se suicide sans réagir autrement qu’individuellement.

Davantage de collectivités incohérentes comme, en France, les communautés de communes et les régions, et dans le monde, les LGBT qui se sont accaparés l’arc-en-ciel, le Vegan ou l’écologie avec leurs réponses simples à des problèmes compliqués, le féminisme galopant qui demande partout la parité sauf dans la fabrication des enfants, les stupides traités commerciaux et la multiplication à l’envi des rencontres sportives et des jeux d’argent.

Davantage de monnaies façon système de Law, assignats, emprunt russe ou bitcoin avec une nuée de petits maîtres venant expliquer à qui veut l’entendre que c’est en jonglant avec les monnaies que l’on réglera les problèmes.

Davantage de productions en pillant les ressources de la Terre rétrogradée au niveau de la planète, en promettant un pays de cocagne au mâles blancs tout en les mettant au chômage, et en faisant travailler les trois esclavages que sont l’esclavage de notre descendance par la dette, l’esclavage des autres civilisations chez elles par la mondialisation et l’esclavage des autres civilisations chez nous par l’immigration.

Et avec d’un côté une armada de conseillers et de petits maîtres venant expliquer les détails qu’il faut changer pour que cela marche et de l’autre, une incapacité à se regrouper de tous ceux qui pressentent le désastre, par le fait que chacun se limite à son constat personnel sans prendre conscience de l’ampleur du drame et du fait générateur.

Seule une prise conscience populaire ( par les réseaux sociaux ? ) a une chance de nous régénérer en remettant au niveau de la production, le producteur tel qu’il est, sans vouloir le transformer, ce que la guerre et le terrorisme font malheureusement admirablement. C’est parce que la guerre et le terrorisme prennent les gens comme ils sont et non comme ils devraient être d’après les entreprises embaucheuses, qu’il n’y a, en temps de guerre, que des chômeurs volontaires. Ne pourrions-nous pas nous en inspirer sans aspirer la guerre et le terrorisme comme nous le faisons en voulant former tout au long de la vie un matériau humain déraciné et interchangeable ?

Encore faudrait-il trouver ou créer une collectivité qui porterait ce message que les médias ont sur ordre décrété impopulaire. Est-ce rêver que d’y croire ?

Que vaut une monnaie ?

N’importe quel touriste se renseigne sur la valeur de la monnaie du pays qu’il souhaite visiter. Ce sont les marchés qui actuellement décident au jour le jour de la valeur des monnaies par la loi de l’offre et de la demande. Mais avant l’existence des marchés, que valait une monnaie inconnue d’une peuplade mal connue ?

Chacun valorisait à ses yeux et avec sa propre monnaie, aussi bien ce qu’il possédait et que l’autre désirait acquérir, que ce que possédait l’autre et qui l’intéressait lui-même. Comme on se connaissait mal, aucune confiance n’était évidente et l’on tâtonnait, en ajoutant et en enlevant, pour que chaque partie trouve les deux tas équilibrés, quels que soient ses critères. On inventait le troc qui est un regard équilibré commun sur des marchandises diverses. Quand on se connaissait un peu mieux on pouvait mettre aussi des services dans les deux tas. Chaque partie ayant considéré les deux tas comme de même valeur, et les ayant chacune chiffrés, chacune avec sa propre monnaie, le taux de change coulait de source et l’on avait la valeur de la monnaie de l’autre dans sa propre monnaie, ce qui ne servait d’ailleurs guère qu’aux touristes.

Mais avec ce qu’ils appellent la globalisation tout a changé. Ce troc s’appelle aujourd’hui la balance commerciale et le bon sens imposerait qu’elle soit équilibrée et donc de réévaluer la monnaie quand la balance commerciale est excédentaire comme pour les euros allemands ou néerlandais, et de la dévaluer quand elle est déficitaire comme pour le dollar, la livre sterling… et les euros français ou espagnols. Mais tout est faussé par les marchés qui ne valorisent les produits qu’à l’aune de leur capacité à revendre plus cher le lendemain, et sans s’attarder à savoir s’il s’agit d’une monnaie, de blé, d’aluminium ou de pantalons pour unijambistes.

Le dollar et la livre ne sont surévalués que parce que la Terre entière accorde, au moins provisoirement, à l’un la suprématie militaire et à l’autre, la suprématie sur les marchés financiers.

Pour l’euro qui doit en même temps monter et descendre, il n’y a que deux solutions. Soit l’Allemagne est prête à payer pour l’ensemble d’une Europe remplie d’Européens, ce que lui demande Macron, comme en France les provinces riches ont toujours payé pour que le timbre ait le même prix dans un arrondissement de Paris et au fin fond du Queyras. En payant pour les autres l’Allemagne réussira d’ailleurs enfin le quatrième Reich si, bien sûr, les autres nations acceptent d’obéir à qui les payent en se sentant du même pays donc non humiliés. Soit l’euro explosera et c’est à l’évidence ce qui se prépare en ne laissant dans le flou que la question de savoir où la mèche sera allumée. Actuellement deux pays tiennent la corde pour lancer l’explosion. L’Italie qui veut dépenser sans contraintes et l’Allemagne qui ne veut pas payer pour les autres. Macron va tenter vainement pour sa propre survie de défendre l’indéfendable en croyant peut-être sincèrement au peuple européen multiracial et fédéré autour des droits de l’homme. De profundis …

Pendant que certain s’agite, ne perdons pas de vue que l’oubli de la valeur réelle des monnaies des autres, réduit l’économie à une agitation dans l’immédiateté et à un déluge de commentaires sur l’inanité des actions engagées. Il serait pourtant tellement essentiel de réconcilier l’économie et le bon sens.

Le désir de vendre et le désir d’acheter

Les désirs d’acheter et de vendre sont inhérents à la nature humaine. Le désir de vendre est généré par le désir de faire du profit, de transformer quelque chose que nous aimerions être reconnue comme une richesse, un bien, un service ou notre propre temps, en une vraie richesse reconnue qu’est la monnaie. Ce désir part d’une estimation de ce que l’on aimerait vendre et il génère la recherche d’un acheteur ayant la même estimation. Cela est vrai pour tout ce que l’on veut vendre, que ce soit soi-même en cherchant du travail, un objet trouvé, acheté ou fabriqué, ou un service que nous nous sentons capables de rendre.

Le désir d’acheter est généré, lui, par l’attrait du plaisir, par le contentement que nous éprouvons à consommer ou à posséder.

Si ces désirs bien naturels ne sont pas réfrénés, on en arrive à la blague de Jacques Attali qui, selon lui au début et à la fin de sa narration, «résume bien l’escroquerie des théories économiques de ce qui se passe aujourd’hui dans le système financier moderne». Voici sa blague dans laquelle le choix des prénoms est évidemment aléatoire.

C’est Schlomo qui téléphone à David en lui disant « Ecoute j’ai une affaire formidable à te proposer. J’ai un camion de pantalons et les pantalons valent un dollar. Tu les veux ? Formidable ! ». David prend les pantalons, téléphone à Jonathan « Ecoute, j’ai une affaire formidable pour toi, un camion de pantalons à 2 dollars. Tu les veux ? Formidable ». Jonathan téléphone à Saül, lui propose 3 dollars, l’histoire continue jusqu’à un moment où Moshe téléphone à Christian et lui dit « J’ai une affaire formidable pour toi, des pantalons à 49 dollars ». « Ah ! 49 dollars ? Formidable ! ». Il les prend. Le lendemain Christian téléphone à Moshe : « Ecoute, tu es vraiment un escroc ». « Comment je suis un escroc ? ». « Mais si ! Tu m’as vendu 49 dollars des pantalons immettables ». « Qu’est-ce que tu racontes ? ». « Tu sais très bien. J’ai ouvert le camion. Il y avait des pantalons qui n’avaient qu’une jambe. Qu’est-ce que tu veux que je fasse avec des pantalons qui n’ont qu’une jambe. Personne ne met des pantalons qui n’ont qu’une jambe ! ». « T’as rien compris, ce n’est pas fait pour mettre mais pour acheter… pour vendre… pour acheter… pour vendre.

L’escroquerie inévitable, générée par les désirs effrénés de vendre et d’acheter, a normalement dans toutes les civilisations le frein naturel de l’échange. Cet échange c’est le troc avec l’étranger que l’on ne connait pas et qui nécessite l’échange des avoirs. Et c’est l’échange avec la monnaie quand elle est encore comprise comme un véhicule d’énergie humaine à l’intérieur d’un groupe donné cohérent, d’un « oïkos ».

Mais depuis le 15 août 1971, depuis que Nixon a rompu l’équilibre fragile et déjà sans avenir de Bretton Woods de 1944, l’échange se fait avec une monnaie qui n’a aucune valeur réelle. Les expériences précédentes de Law sous la Régence ou des assignats sous la Révolution avaient encore le support de la compagnie du Mississipi pour Law et des biens de la noblesse et du clergé pour les assignats. Mais nos monnaies actuelles ne sont plus fondées que sur la confiance, exactement comme les emprunts russes de 1888 à 1914.

Mais le système de Law n’a duré que 4 ans entre 1716 et 1720, les assignats, 8 ans de 1789 à 1797, les monnaies actuelles attendent depuis 47 ans l’événement qui officialisera leur absence de valeur comme la révolution russe a montré l’absence de valeur des emprunts du même nom. C’est ce qui permet à la dette de monter sans fin partout dans le monde puisqu’elle est libellée en une monnaie qui ne vaut rien.

Les manuels d’histoire expliqueront que le système de Law a permis au Régent de faire payer au Français les dettes de Louis XIV, que les assignats ont permis aux classes moyennes de récupérer les biens du clergé et de la noblesse et que les monnaies de la deuxième partie du XXe siècle et du premier quart du XXIsiècle ont permis à une nouvelle et fausse noblesse d’argent de récupérer les biens des classes moyennes tout en clamant que le droit à la propriété est sacré.

Naissance, vie et mort de la richesse matérielle

La richesse est ce que l’homme trouve beau ou bon et elle est matérielle quand elle est palpable. Elle est le regard satisfait que l’homme porte sur sa production ou sur celle de la nature.

Mais comme tout ce qui est humain la richesse naît, vit et meurt et comme pour tout ce qui est humain, nous nous intéressons plus à sa naissance dont nous nous réjouissons qu’à sa mort que nous redoutons mais que nous feignons d’ignorer. La science économique, oubliant dogmatiquement qu’elle marche sur deux pieds, néglige volontairement la mort de la richesse, ce qui rend les économistes inefficaces et inutiles, voire dangereux quand on les écoute ou quand ils déforment des étudiants.

La mort de la richesse est pourtant la plupart du temps programmée. Soit elle est immédiatement consommée comme l’alimentation ou le conseil, soit c’est son obsolescence qui est programmée, soit elle est volontairement détruite par des bombardements, par des saccages ou par des grands projets à la Haussmann. Elle peut encore être accidentellement détruite par des incendies, des tempêtes ou des séismes. Reconstruire un château sur un château, une église sur une église, une ville sur une ville, est une constante humaine car le lieu primitivement choisi l’a toujours été pour de bonnes raisons. Cela fait naître une richesse nouvelle qui constate la mort de l’ancienne. Quand une civilisation se croit vivante, elle n’a cure de la destruction car pour elle la richesse créée est plus belle que la richesse détruite et elle se croit donc plus riche. C’est lorsqu’elle a un peu honte de ce qu’elle crée, lorsqu’une civilisation est fatiguée, qu’elle regrette les richesses détruites et qu’elle ne construit plus que pour l’immédiateté tellement elle a peur du futur, c’est à ce moment qu’elle se met à admirer les vestiges de ce qui a été détruit comme le mur des lamentations, dernier vestige du deuxième temple à Jérusalem ou à en vénérer ce qui a été conservé comme ses cathédrales, ses pyramides, ses dolmens, ses stupas ou ses châteaux.

C’est au travers d’une vision peu claire de la richesse matérielle que l’on voudrait aussi durable que la richesse intellectuelle que nous devons étudier le rapport entre la richesse matérielle et l’argent. Ce rapport est à la base de toute la science économique.

La richesse est un regard subjectif sur l’efficacité du travail humain alors que la monnaie est un véhicule concret, objectif et chiffrable de ce même travail humain. Mais si le lien entre richesse et argent est individuellement très bien compris, il est généralement beaucoup plus mal perçu au niveau global. La richesse matérielle se fait pourtant reconnaître comme richesse parmi les productions par son échange avec de la monnaie qui est une autre fabrication humaine précédemment reconnue comme une richesse par un groupe donné.

Monnaie et richesse aborde le même concept, la monnaie l’aborde quantitativement quand la richesse l’aborde qualitativement.

La monnaie étant un véhicule de l’énergie humaine que le groupe juge avoir été bien utilisée, elle mesure quantitativement une autre expression de l’énergie humaine bien utilisée d’après le groupe, à savoir sa richesse matérielle. La richesse matérielle d’un groupe et la quantité de monnaie, recouvrent donc toutes les deux le résultat de l’énergie humaine que le groupe juge avoir été dépensée intelligemment. Elles sont par définition identiques et la quantité de monnaie en circulation dans un groupe doit donc correspondre à la quantité de richesse matérielle vivante. Elle doit augmenter quand le groupe pense s’être enrichi, elle doit diminuer quand le groupe pense s’être appauvri.

On peut imaginer qu’à l’introduction d’une monnaie dans un groupe, on a évalué en la chiffrant la richesse matérielle de chacun, on a tout additionné, on en a tiré un chiffrage de la richesse collective du groupe sans oublier de chiffrer ce qui appartenait à la collectivité. C’est alors qu’on a fait une image de cette richesse, une image du travail déjà effectué, son double avec une matière rare, pérenne, transportable et divisible. Au départ les membres du groupe ont des biens, le groupe a des biens et de la monnaie. Le groupe, appelons-le l’État, ne garde alors que la monnaie correspondant à ses biens propres et distribue à chacun la monnaie équivalente à ce qu’il possède déjà, beaucoup à celui qui a beaucoup, rien à celui qui n’a rien. L’introduction de la monnaie ne change en rien la propriété des uns et des autres et celui qui n’a que son travail à vendre, voit simplement devenir concret le fruit de son effort. A la création de nouveaux biens reconnus comme richesse, le groupe augmente la monnaie, à la mort de ces biens, le groupe diminue la monnaie.

La bonne quantité de monnaie qui doit rester en permanence le chiffrage par le groupe de sa richesse matérielle du moment, dépend donc de cinq facteurs. Trois sont évidents, sa création (augmentation de la quantité de monnaie en circulation), sa circulation (sa capacité à reconnaître plusieurs fois de la richesse) et sa destruction (diminution de la quantité de monnaie en circulation). Deux le sont moins mais ont autant d’impact, sa consommation (on consomme de la monnaie en détruisant des richesses) et sa dissimulation (l’épargne).

Une première réflexion s’impose suivant que la monnaie est déjà perçue comme une richesse en soi comme l’or ou l’argent ou qu’elle n’est qu’un symbole comme le papier-monnaie ou l’argent virtuel. Dans le premier cas l’or ou l’argent fait partie de la richesse du groupe et la monnaie est une valeur reconnue pouvant par simple fonte redevenir richesse. L’inconvénient est qu’en frappant monnaie, on stérilise une partie de la richesse du groupe pour en faire de la monnaie, mais l’avantage est que le rééquilibrage entre richesse et monnaie est très facile à faire. Pour garder l’égalité entre la monnaie et la richesse il suffit, si la richesse monte, de frapper de nouvelles pièces, et si elle descend d’en fondre. En revanche avec du papier-monnaie ou de la monnaie virtuelle, il n’y a que la confiance en ses fabricants qui garantit qu’il n’y aura pas plus de monnaie que de richesses, ce qui dévaloriserait malhonnêtement la monnaie.

Nous pourrons nous demander dans un prochain billet s’il n’y aurait pas un lien de ce type entre ces coïncidences constatées : La crise de la tulipe est arrivée au XVIIe siècle à la fin de la guerre ruineuse « des quatre-vingts ans » entre les sept provinces protestantes du nord des Pays-Bas et l’Espagne catholique ; le système de Law (que l’on prononçait Lasse) est arrivé au XVIIe siècle quand le Régent n’arrivait plus à payer les guerres de Louis XIV ; les assignats sont apparus quand la république française se battait contre toute l’Europe; la catastrophe du mark de Weimar a suivi le défaite allemande de 1918 et le change flottant depuis 1971 n’a fait que constater l’échec des accords de Bretton Woods en fin de deuxième guerre mondiale sans faire le lien avec la fin catastrophique de tous ses prédécesseurs. Depuis 1971 tous les gouvernements occidentaux ont en plus inventé, pour plaire au peuple et garder le pouvoir, la notion de croissance économique qui justifierait qualitativement, mais évidemment pas quantitativement même si elle était réelle, la fabrication de monnaie. Tant que le peuple accepte de faire semblant d’y croire, il ne fait que laisser, toute honte bue, les drames de l’explosion à ses enfants. N’y aurait-il pas un lien avec le fait qu’il fait de moins en moins d’enfants et qu’il laisse la place ?

De tous côtés les petits maîtres abondent qui apportent leur solution miracle en évitant la question essentielle. Mais cette question ne pourra être sérieusement abordée que lorsque nous aurons reconnu que la richesse matérielle meurt comme elle naît et que la monnaie n’en est que l’image transportable aussi volatile qu’elle. Ce n’est pas du tout ce qui est enseigné dans nos universités.

Comment remettre de l’ordre dans les idées ?

« Père gardez-vous à droite, père gardez-vous à gauche ». Cette phrase a été prononcée en 1356, nous disent nos livres d’histoire, par Philippe âgé de 14 ans tentant de protéger à la bataille de Poitiers son père, notre Bon roi Jean qui va tout de même être fait prisonnier avec son fils par le vilain Prince Noir. Elle redevient d’actualité, nourrie qu’elle est actuellement par le mythe de la création de richesse qui sape notre société plus sûrement que tous les prétendus complots.

Il faut évidemment rappeler d’abord ce qu’est la Droite et la Gauche en France depuis qu’à la révolution on a mis dans l’hémicycle les Montagnards à gauche et les Girondins à droite. Si chacun s’accorde à reconnaître que mouvement et harmonie sont essentiels à une vie de groupe dynamique et sereine, la Droite privilégie l’harmonie et la Gauche le mouvement. L’âge fait souvent évoluer de la Gauche vers la Droite sauf de rares exceptions dont Victor Hugo. Aujourd’hui le mouvement devient essentiel car s’il ne vient pas de l’intérieur, il nous sera imposé de l’extérieur par ce que l’on a l’habitude d’appeler la guerre. Mais quel mouvement devons-nous faire ?

Il faut aussi se souvenir qu’un mythe est un récit imaginaire débouchant sur une réalité concrète, fondant et justifiant une vision du quotidien. Que ce soit le mythe de Prométhée qui donne le feu ou le mythe d’Enée qui donne la fondation de la cité, ces mythes sont fondateurs car leurs aboutissements sont indéniables et concrets. Le mythe de la création de richesse, lui, est le récit d’entreprises qui créeraient de la richesse par la valeur qu’elles ajouteraient. Mais où est l’aboutissement indéniable et concret ? La valeur d’une production n’existe que si elle est concrétisée par la rentrée de l’argent de sa vente et elle est rigoureusement égale à la paupérisation de l’acheteur qui vient abandonner son argent pour obtenir cette production. Tout le monde est satisfait par cet échange mais en macroéconomie, en vue d’ensemble, il y a eu échange entre deux créations, celle d’une production et celle de l’argent. Pour croire à la création de richesse il suffit d’annuler le poids de la création d’argent et c’est ce que nous faisons depuis un demi-siècle en nous croyant intelligents. Il suffit de négliger l’un des termes de l’échange et l’autre devient une création quasi divine. Il suffisait d’y penser ! Nous allons envelopper d’un épais brouillard la production de la monnaie pour en arriver à la négliger et ne voir dans l’échange que la création de ce qui est vendu, création qui est évidemment une richesse puisqu’elle a été vendue.

Il y a création de richesse dès que la création d’argent est négligée ou considérée comme, automatique, facile, divine ou miraculeuse. Sottement et à tous les niveaux nous rééditons une fois de plus le système de Law et celui des assignats qui ont montré par deux fois que le siècle des Lumières n’était pas lumineux en économie. On cache les drames que les effondrements de ces deux systèmes ont provoqués comme ceux de l’oignon de tulipe hollandais ou du mark de la république de Weimar pour l’expérimenter à nouveau depuis que Nixon a déconnecté le dollar de l’or le 15 août 1971. Nous ne nous occupons plus que d’en retarder la fin inéluctable et d’en accuser l’espace de jeu, nation, continent ou globe terrestre.

On présente comme une réalité quotidienne chiffrée, la création de richesses que serait le Produit Intérieur Brut, ce fameux PIB dont chacun veut s’approprier des pourcentages et qui au niveau mondial permettrait d’éradiquer la pauvreté. Mais le PIB n’est que la somme de toutes les dépenses annuelles passées et ne sert qu’à nourrir des courbes. Il alimente et stérilise aussi bien la fougue des tenants du mouvement que le dynamisme des tenants de l’harmonie.

Les gens du mouvement, ceux qui se croient de gauche, fondent leur action, leur réflexion et leur communication sur l’étonnement scandalisé de ne pas voir redistribuée cette richesse tellement évidente. Les mouvements sociaux, les retraites, l’éducation nationale, tout ce qui n’arrête pas de demander des « moyens », tout est abordé avec l’idée fausse que de la richesse est créée et est donc disponible. Le mythe de la création de richesse justifie toutes les demandes et empêche toute réflexion saine sur les mouvements nécessaires. Les gens du mouvement se veulent optimistes et s’avouent crédules.

Les gens de l’harmonie, ceux qui se croient de droite, fondent leur action, leur réflexion et leur communication sur la gestion quotidienne de l’impossible, à savoir faire croire que l’on va redistribuer alors que l’on va au contraire ponctionner davantage pour faire croire à l’arrivée tellement attendue de la croissance. C’est ce que font tous les gouvernements depuis 50 ans en promettant l’augmentation du niveau de vie et en en accompagnant la diminution. Le mythe de la création de richesse alimente alors un autre mythe, celui des « tous pourris » qui explique à bon compte l’inanité des gouvernants qui n’y peuvent rigoureusement rien. Il empêche toute réflexion saine sur l’harmonie, sur les équilibres et donc sur le chômage. Les gens de l’harmonie se veulent réalistes et s’avouent perdus.

Dans une république bien menée, qu’elle soit monarchique, aristocratique ou démocratique, les gens du mouvement rappellent que la compétition est le moteur du dynamisme et les gens de l’harmonie rappellent qu’une compétition n’est saine qu’entre des entités coopérant vers le même but. Les deux ont raison car la compétition est vivifiante entre coopérants et mortelle sans un socle commun coopératif, ce que les libéraux semblent avoir complètement occulté. Pour ne rester que dans le règne animal les chiens de traîneau ont toujours un meneur alors que d’autres s’étripent entre mâles pour une femelle.

Dans la fausse démocratie dans laquelle nous baignons, il faut être du mouvement pour obtenir le pouvoir et il faut être de l’harmonie pour le garder quand on y est parvenu. Dans les deux cas il faut savoir mentir. Mentir pour vendre du mouvement quand on demande à être aux manettes, mentir pour cacher la vérité quand on y est et que l’on est obligé de faire l’inverse de ce que l’on avait promis et la même chose que le précédent que l’on avait pourtant dégagé en le vouant aux gémonies. Notre système sélectionne les menteurs mais c’est malheureusement ce que le peuple attend car, sans manne divine, tous les raisonnements changent et affronter la réalité n’a jamais été l’apanage du peuple tant qu’il n’y est pas obligé. C’est là où la guerre marque des points dans son combat avec l’intelligence. Le peuple préfère tout attendre du nouveau venu, adepte du mouvement, et le dégager simplement très vite par un autre nouveau venu, encore plus adepte du mouvement, en se disant consciemment qu’on va bien enfin en trouver un qui va redistribuer cette richesse créée, et en se disant inconsciemment, comme la mère de Napoléon après les victoires de son fils : «Pourvu que ça dure !».

Nous sommes tous les vrais responsables du désastre vers lequel nous courrons par notre obstination à croire que nous créons des richesses. Il nous parait tellement naturel de laisser à nos enfants, après une vie de travail, plus que ce que nous avons reçu de nos parents, que nous n’envisageons pas qu’en macroéconomie tout puisse être matériellement à somme nulle. Nous n’avons plus besoin de donner un sens à nos vies puisque grappiller pour nos enfants une partie de la richesse créée, nous suffit. Les Eglises, au lieu de combattre le mythe qui rend les religions inutiles et multiplie les agnostiques, réduisent les religions au partage des richesses créées. Un peu honteuses, elles regardent d’un œil gourmand l’islam qui a moins cédé à l’abêtissement par les fausses richesses.

Des gens très sérieux et très doctes disent que personne ne peut entendre que la création de richesse est un mythe qui n’est fondateur de rien. Il paraîtrait même que ce soit inaudible. Cela vient sans doute de ce que le mot créer a plusieurs sens et que les confondre est bien commode. Créer vient du sanskrit kri qui veut dire faire et a le sens de sortir du néant réservé aux dieux. Mais il a aussi pour les humains les trois sens d’imaginer, de produire et de fonder. Imaginer est une création de l’esprit qui a toute liberté mais n’a aucun effet sans un passage à l’acte. Produire est une création matérielle qui peut être vue comme une richesse mais aussi comme un encombrant ou comme un déchet. Fonder est une création sociale qui peut tenir ou s’effondrer. Le mot richesse étant lui-même totalement subjectif, il est très tentant de tout mélanger et de croire sorti du néant ce qui n’est que création humaine soit purement imaginaire, soit simple transformation. C’est le cas du PIB que l’on présente comme sorti du néant et donc utilisable, alors qu’il n’est défini que par son coût et qu’il n’est que la mesure de notre folie dépensière d’un argent que l’on nous fabrique et qui est payé par les trois esclavages de la mondialisation, de la dette et de l’immigration.

Si nous prenons par exemple la cathédrale de Chartres, c’est en l’admirant que notre imagination fait de cette production, une richesse. Mais elle pourrait contribuer au PIB en se faisant détruire car il faudrait dépenser beaucoup d’argent pour remettre la Beauce dans l’état où elle se trouvait avant sa construction. Après destruction pourrait-on réellement utiliser 2% du PIB généré par cette destruction pour équiper l’armée française comme le propose Macron ? Les innombrables courbes en pourcentage du PIB sont un véritable scandale généré par le mythe de la création de richesse.

Ce mythe fausse tous nos raisonnements et nous empêche même de nous tourner vers un apport de vraies solutions aux problèmes que nous tentons de résoudre, tellement nous sommes éblouis par la richesse soi-disant créée. La richesse résout apparemment tout y compris même l’existence de sa propre création. Les dépenses somptuaires de publicité, alimentées par les banques centrales, par les penseurs de l’économie et par notre appauvrissement collectif, n’ont comme seule conséquence que de dissimuler en le dévalorisant le rôle de la monnaie dans la reconnaissance de la richesse afin de laisser croire à la génération spontanée de la richesse. C’est pourtant parce que la monnaie véhicule du travail humain déjà utilisé efficacement qu’elle est capable de reconnaître la richesse par son propre abandon.

Comment réordonner nos idées ?

D’abord en constatant que la richesse est un regard commun et qu’il ne peut y avoir de richesse objective. Toute richesse ne se conçoit qu’en lien avec un groupe. Un trésor caché sur une île déserte n’a de sens que s’il est rapporté au sein du groupe (cf Monte Cristo). Ensuite en distinguant clairement la richesse matérielle qui est possession d’un avoir, de la richesse immatérielle qui est satisfaction de l’être.

Quand elle est matérielle la richesse se constate par le regard commun d’un vendeur et d’un acheteur, de celui qui possède et de celui qui désire ou simplement admire. Par deux fois l’antiquaire fait ce constat. Il constate d’abord avec son fournisseur que l’objet est un encombrant dont le possesseur veut se débarrasser et il constate ensuite avec son client que le même objet est une richesse que l’acheteur désire posséder. Deux regards, deux constats, aucune création. L’encombrant des uns peut être la richesse des autres par des regards différents. Si les regards sont les mêmes, ce qui est le cas habituel dans une même civilisation, quand quelqu’un s’enrichit, d’autres s’appauvrissent des mêmes montants puisqu’il n’y a pas de création de richesse. Qui s’est appauvri des millions d’euros qu’un jeune énarque a gagnés dans une banque d’affaire ? Ne pas se poser la question, c’est rester enfermé dans le mythe bien commode et malheureusement très tranquillisant de la création de richesse. Se la poser, c’est commencer à comprendre la dévaluation de la monnaie, ce que l’on appelle maintenant l’inflation. La vraie inflation, telle qu’on l’apprenait il y a encore un demi-siècle, est faite par la création monétaire des banques (la monnaie qui enfle).

Quand elle est immatérielle la richesse est celle de l’esprit, c’est la satisfaction qui, elle, se crée bien évidemment. Elle se crée par l’éducation, par l’expérience, par la méditation et aussi par l’échange doublement désiré qui crée deux satisfactions. Le commerçant et son client sont tous les deux contents, l’un d’avoir vendu un bon prix, l’autre d’avoir acheté un bon prix. L’un pense qu’il aurait accepté de vendre un peu moins cher, l’autre qu’il aurait accepté d’acheter un peu plus cher. Ce qui est stupéfiant c’est de voir mettre le chiffrage du compromis de cet échange dans le PIB en l’appelant production au singulier et en laissant croire qu’il y a eu une création de richesse disponible dont on va pouvoir utiliser des pourcentages à qui mieux mieux. L’homme est content, il s’est fait dieu et il a créé. Nombre d’intellectuels vont se convaincre par facilité qu’aucun esprit sensé ne fabriquera ce qui n’a pas d’acheteurs. Cela n’est plus vrai et toute production est réputée richesse depuis l’introduction de la machine et depuis que la monnaie n’est plus que du papier journal que les rotatives des banques centrales impriment à foison. Nous créons de la richesse !! Ce Qu’il Fallait Démontrer ! Même Eric Verhaeghe dont les billets sont généralement si affûtés en arrive à écrire que « la hausse de la CSG (……) compense une redistribution inégalitaire des richesses ».

Même la Terre ne crée pas seule des richesses car la nature ne fait que proposer du minéral, du végétal et de l’animal qui ne deviennent des richesses que si l’homme fait l’effort d’aller l’extraire, le cueillir, le ramasser, le chasser, le piéger ou le pêcher. Sans ce lien au groupe, la nature renouvelle annuellement sa proposition en végétal et en animal pour qu’elle reste constante tant que l’homme ne la surexploite pas, et fait disparaître avec une discrétion exemplaire les propositions antérieures non exploitées et devenues inutiles.

Une économie harmonieuse fait que le résultat du travail de chacun est regardé par le groupe comme une richesse sans avoir besoin du monde de la publicité et de ses sous-produits, le sport et les médias qui coûtent si cher. Dans une économie harmonieuse il est naturellement proposé à chacun de travailler au bien commun. Ce bien commun est le but commun auquel chacun coopère en essayant de se dépasser soi-même. Une économie harmonieuse marie la coopération et la compétition comprise comme une pétition commune prise en commun

Un enfant qui fait un dessin croit évidemment fabriquer une richesse car il sait que maman va trouver le dessin très beau et il s’applique pour ne pas la décevoir. Elle achètera le dessin avec la seule monnaie qu’ils connaissent entre eux, les étreintes et les bisous. Maman était prête à en donner encore plus et l’enfant se serait contenté d’un peu moins. Mais si maman n’est pas là, si personne ne vient s’extasier sur la beauté du dessin, l’enfant, encore intelligent car non encore formaté et écrasé par le rouleau compresseur de la société actuelle et n’ayant encore rien compris à la publicité, va voir son dessin pour ce qu’il est, un encombrant et très vite un rebut. Très intelligemment il va s’en désintéresser et passer à autre chose.

Aucun prix Nobel ne semble avoir étudié sérieusement ce mécanisme économique apparemment si simple, à savoir que l’économie ne marche que sur deux pieds et qu’il n’y a aucun résultat sans une cause, sans une origine. L’homme ne crée pas. Il ne sait que transformer avec son énergie personnelle. Tout ce qui se croit unijambiste et singulier comme le PIB, la monnaie, la croissance, l’innovation ne fait que négliger l’autre pied qui en est la source souvent cachée et qui est respectivement la dépense pour le PIB, le travail pour la monnaie, l’augmentation des dépenses pour la croissance et le deuil pour l’innovation.

Pendant ce temps-là les esclavages du mondialisme, de l’immigration et surtout de la dette apportent l’énergie que notre travail théoriquement véhiculé par la monnaie n’apporte plus.

Alors que faire ?

  • Remplacer les esclavages par le travail de notre propre peuple en sortant de la querelle séculaire entre le public et le privé par le mariage aujourd’hui innovant de l’initiative personnelle à la force collective.
  • Échanger avec toute la Terre dans le respect réciproque qui interdit le déséquilibre d’un échange que la compétition encourage et que la coopération réprouve.
  • Retrouver une monnaie qui véhicule réellement le travail de ceux qui l’utilisent en interdisant sa dévalorisation par une fabrication bancaire incontrôlée.
  • Mettre l’expérience au même niveau que l’instruction dans le système éducatif pour permettre de jauger la qualité de l’instruction par son efficacité.
  • Instaurer un permis de voter et le référendum d’initiative populaire pour faire les choix que le réalisme imposera.
  • Retrouver une spiritualité majoritaire qui seule permet d’aplanir les conflits naturels entre l’individuel et le collectif.

Mais tant que nous n’aurons pas pris conscience que la richesse matérielle ne se crée pas et ne peut donc être ni distribuée ni redistribuée, nous continuerons à être gouvernés par les pantins de notre propre veulerie, qui ne laissent pas seulement la violence monter mais qui l’encouragent en laissant croire à Droite comme à Gauche qu’un échange avec de la fausse monnaie, fait d’une production une richesse nouvellement créée. Ils utilisent cette fausse création pour se faire mousser et font monter les esclavages, la violence et la haine qu’ils condamnent bien sûr par ailleurs, avec la même hypocrisie que nous tous !

Gardons-nous à droite, gardons-nous à gauche ! Et réveillons-nous tant qu’il en est encore temps. Souvenons-nous que dans notre civilisation judéo-gréco-romaine, la bonne nouvelle est que nous savons que lorsque l’on s’est trompé, que l’on a renié ou trahi, il ne faut ni désespérer comme Judas, ni se justifier comme les pharisiens mais faire comme Pierre qui « sortit et pleura ». C’est sur ces pleurs pleins d’humilité, de courage et de discernement retrouvés, sur cette destruction créatrice que l’Eglise fut fondée.