Tout est lié

François Bayrou, lors de son discours du 3 mars 2025 à l’Assemblée Nationale, a prononcé la phrase malheureusement très réaliste :

Nous voici mis en demeure d’accepter des mœurs que nous refusons, de revoir les chartes de nos libertés, de repenser les règles de la démocratie et de la liberté d’expression, d’abandonner notre souci de décence pour accepter l’indécence qu’on voudrait nous imposer.

Si une quasi-totalité de la population partage cette phrase, qui prend réellement conscience qu’elle se retourne comme une crêpe selon que l’on précise qui met en demeure et qui doit le subir ? François Bayrou définit le bien et le mal mais se met peut-être trop rapidement du bon côté de la barrière sans imaginer qu’il puisse être du mauvais, et avec lui la quasi-totalité de la représentation nationale.

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale une lutte à mort se déroule en effet sous nos yeux éteints entre deux visions du monde, l’une mondiale, merveilleuse, construite mais chimérique, l’autre internationale réaliste mais beaucoup plus dure que les tenants de la première dissimulent pour garder le pouvoir grâce à une démocratie faussée et manipulée. L’une ne voit plus l’intérêt des nations et veut tout traiter mondialement en se fondant sur la constitution progressive d’une civilisation unique parlant anglais, l’autre pense essentielle la spécificité intellectuelle de chaque nation et prétend organiser le monde par une relation équilibrée entre les nations.

Dès février 1946 l’ONU décide de convoquer une « Conférence internationale sur le commerce et l’emploi en vue de favoriser le développement de la production, des échanges et de la consommation des marchandises ». Cette conférence ne se réunira que de novembre 1947 à mars 1948 à Cuba, fera signer par 52 pays la Charte de La Havane, créera, intégré à l’ONU, l’Office International du Commerce (OIC) qui mettra en exergue la production, le plein emploi et la balance des paiements, superposition de balance commerciale équilibrée et de monnaies à valeur reconnue. En réaction s’est immédiatement créé hors ONU et à Genève en octobre 1947 par 23 pays également signataires de la Charte de La Havane, le Général Agreement on Tariffs and Trade (GATT) qui officiellement n’est là qu’en attente de la Charte de la Havane mais qui fait disparaître la production et l’emploi de ses préoccupations au profit du libre-échange. La bataille est lancée et dure encore en dépit de la victoire apparente par KO du GATT qui a obtenu la peau de l’OIC en obtenant la non ratification par le sénat américain de la Charte de La Havane et la création de structures de libre-échange comme l’Union Européenne et comme l’OMC, toujours à Genève et toujours hors ONU. L’OMC avec sa haine des droits de douane et sa vénération pour le libre-échange est l’exact contraire de l’OIC.

Cette victoire apparente du mondialisme et du libre-échange n’aura tenu que moins de 80 ans et s’écroule actuellement, sous nos yeux toujours éteints, par la prise de conscience progressive de la fausseté de son principe fondateur : profitez maintenant, le futur s’occupe de tout. C’est la façon dont ce principe, agréable mais totalement irréaliste, a pu être avalé par les peuples et entretenu par les élites, qu’il est intéressant de comprendre. Tout a été fondé sur les deux pieds d’une réponse à long terme qui est la création de richesses et d’une réponse à court terme utilisant l’absence de définition de la monnaie (marchandise, symbole, institution ?) pour la rendre illimitée.

La richesse n’est que le regard satisfait que nous portons sur une production de bien ou de service. Mais un regard ne se chiffrant ni se créant, il a été convenu de chiffrer la valeur d’un bien par l’argent qu’il fallait dépenser pour l’obtenir. On a fait pareil pour chiffrer la valeur d’un service comme le coiffeur, le comptable ou le médecin bien que le service disparaisse sitôt rendu. On a encore ajouté à cette « production marchande », une « production non marchande » chiffrée par ce qu’il faut dépenser pour l’obtenir, partant du principe qu’intelligents comme nous sommes, une administration ou une association nous rapporte forcément plus que ce que nous la payons et qu’il est donc judicieux de chiffrer par prudence ce qu’elle nous rapporte par ce qu’elle nous coûte.  On a enfin tout simplement éliminé  par machisme avéré de la « sphère économique » et donc de la respectabilité et de la richesse produite puisqu’elle ne se vendait pas encore, la production domestique, gestation, éducation des enfants, jardinage, potager, cuisine, ménage, etc, activités principalement féminines pendant des millénaires. On a décrété totalement arbitrairement que toute dépense était le constat d’une création de richesse. L’INSEE calcule le PIB qui est présenté partout comme le chiffrage de la création de richesse, par la somme de toutes les dépenses finales. S’il le calcule aussi par la somme des valeurs ajoutées, c’est que le calcul de la valeur ajoutée commence par la dépense des clients. L’UE nous impose de compter dans le PIB les dépenses de stupéfiants et de prostitution. Et nos élites utilisent dans leurs têtes des pourcentages de PIB qu’ils continuent à croire une ressource alors qu’il est un emploi fort mal nommé !

Cette confusion volontaire entre la dépense et la création de richesse avait encore une origine compréhensible tant que la monnaie était liée à une richesse antérieurement reconnue comme l’or, le sel ou le blé. Si l’on dépensait une richesse reconnue, c’est vraiment que l’on considérait cette dépense comme utile et que ce qui était acheté était aussi une richesse. Mais tout a explosé avec le bouleversement des monnaies depuis 1944, année des accords de Bretton Woods qui liaient les monnaies au dollar, lui-même lié à l’or par 35 dollars pour une once d’or et qui créaient le FMI, toujours dirigé par un européen devant vérifier qu’aucun dollar américain n’était créé sans sa garantie en or.

Dès leur signature et sous le regard absent du FMI, les accords ont été violés par les USA qui fabriquèrent 5 fois plus de dollars qu’ils n’avaient d’or pour payer le plan Marshall, les guerres de Corée et du Vietnam et la conquête spatiale. Le monde entier rapportant cette fausse monnaie pour repartir avec de l’or, Nixon a été contraint de réagir comme chaque fois qu’un gouvernant doit officialiser sa fabrication passée de fausse monnaie. Habituellement on dévaluait la monnaie. Il est même arrivé qu’en courte période de guerre, on fabrique de l’argent sans se soucier de son lien avec une richesse reconnue mais cela était ensuite toujours régularisé par une dévaluation comme Roosevelt l’a fait après la grande guerre et la crise de 29 en dévaluant de 20 dollars l’once d’or à 35. Ce que personne n’avait encore jamais tenté et que Nixon a osé, c’est de déconnecter définitivement les monnaies de toute richesse réelle, faisant sauter leur limite quantitative et ouvrant une voie royale à tous les fantasmes et à toutes les corruptions.

La technique de création illimitée de la monnaie doit être comprise et n’est possible qu’avec une monnaie « flottante », déliée de toute richesse reconnue. Elle est confiée aux banques commerciales qui, par la double écriture, créent pour le même client un compte au passif ou le client est créancier d’une somme et un compte à l’actif où le client est débiteur de la même somme. Le client utilisant son nouvel argent par chèque ou virement, c’est la banque de celui qui a été payé qui devient créancière de la première banque. Mais comme cette autre banque fait la même chose avec ses clients comme toutes les banques commerciales, elles annulent entre elles, en chambre de compensation, leurs dettes par leurs créances. De la fausse monnaie, légale grâce à Nixon, a été créée sans aucun apport et uniquement par la création de créances de plusieurs banques sur  leurs propres clients. C’est ainsi que la dette mondiale atteint déjà 250.000 milliards de dollars qui n’ont jamais été gagnés pour la quasi-totalité.

Ce système peu compris qui permet tous les « quoi qu’il en coûte », toutes les corruptions et tous les fantasmes puisqu’il apporte une énergie illimitée à un système qui n’a plus besoin d’être cohérent, n’est plus défendu que par l’Occident dont les élites ne voient plus comme sortie que la fuite en avant dans des idéologies que leurs médias diffusent dans une population qui aimerait être beaucoup plus concrète mais que les élites achètent avec cette manne inespérée pour rendre complices par les élections, des peuples qui sont en fait des victimes consentantes car c’est si agréable de vivre sur le futur. Les seuls résistants sont ceux qui produisent ou sont au service de la production et que l’on ne paye plus correctement pour acheter le calme et la soumission d’une majorité improductive et voulant toujours consommer davantage grâce au « progrès », à la « croissance » et à la « démocratie ». On afflue du monde entier pour vivre cette incohérence.

On détourne l’attention des peuples sur de faux problèmes idéologiques sanitaires, climatiques ou sécuritaires pour éviter les seuls vrais de dénatalité, d’improductivité et de perte de conscience. Ce détournement d’attention par les élites se combine avec leur lutte pour un mondialisme incohérent ne parlant qu’anglais, ce qui explique cet encerclement progressif de la Russie par l’OTAN en dépit des engagements pris, pour lui faire accepter tous nos fantasmes actuels. Avec les BRICS de plus en plus nombreux, la Russie refuse tous nos fantasmes transgenre, mère porteuse, lgbt…, etc qui n’existent tous que par la fausse monnaie légale. Elle est donc le mal et défendre les russophones contre les ukrainophones mondialistes qui les attaquent depuis le coup d’état du Maïdan en 2014, guerre qui a fait 16.000 morts de 2014 à février 2022, devient une agression inacceptable si l’on est un bon mondialiste.

Ce qui panique nos élites et les rend amusantes dans leur agitation incohérente actuelle façon Tartarin, c’est que le peuple américain vient de changer de camp en élisant ce personnage curieux de Trump. La Charte de La Havane avec ses droits de douane est de retour. On va se réintéresser à la production, à l’emploi utile et à l’abandon de la myriade d’emplois inutiles et de personnes inemployées payées par la fausse monnaie légale qui fait monter les prix. Il va simplement falloir changer d’élites ou que les élites changent.