La richesse n’est qu’un regard

Il est temps de tordre le cou à la notion stupide de création de richesse tellement à la mode pour ceux qui veulent faire croire à des fins électorales que la croissance apporte naturellement des richesses à se partager.

Prenons l’exemple d’un boulanger. Il fait un pari. Celui de croire que les dépenses qu’il fait en location de la boulangerie, en patente quelle que soit son nom du moment, en achat de pétrisseuse et de four, en salaires et en charges de ses collaborateurs, en farine et levure, que toutes ces dépenses lui permettront de fabriquer des richesses, les différents pains qui lui seront achetés plus cher que ce qu’ils ne lui auront coûté.

Pour gagner son pari il faut que des clients rentrent et sortent contents d’avoir perdu de l’argent et gagné du pain. C’est la double impression d’enrichissement qui donne le bon prix. Le boulanger doit se sentir plus riche en gagnant de l’argent et en perdant son pain. Le client doit se sentir plus riche en ayant du pain et moins d’argent. La richesse n’est qu’un regard.

Pour se convaincre que la richesse n’est qu’un regard, il suffit d’imaginer qu’au sortir de la boulangerie avec son pain, le client voit s’arrêter une voiture dans laquelle un ami qu’il apprécie beaucoup l’invite à déjeuner. Son pain qui était richesse devient instantanément encombrement et sera déchet dès que le pain sera sec.

Mais revenons au pari du boulanger. Il peut aussi perdre son pari si aucun client ne vient ou si trop peu de clients ne se déplacent et lui laissent en fin de journée des pains qui deviennent aussi des encombrements puis des déchets.

Une économie saine est une économie où les clients ont à la fois l’envie d’acheter du pain et l’argent nécessaire fourni par leur travail. Il faut les deux plus le boulanger.

Une économie malsaine, la nôtre par exemple, va se réfugier dans des sommes d’équilibres instables en dépensant inutilement beaucoup d’argent permettant de reporter la prise de conscience du problème en le compliquant davantage.

On va payer très cher les banquiers pour qu’ils prêtent l’argent nécessaire aux achats que le consommateur ne gagne plus par manque d’emploi. On va payer très cher les publicitaires pour qu’ils créent l’envie chez le consommateur désargenté de jouir tout de suite de ce dont il rêve, d’aller emprunter tellement son désir de consommer ou de posséder a été boosté. Il va accepter de devenir l’esclave de son banquier par ses échéances mensuelles pour pouvoir jouir tout de suite. On va payer très cher les médias pour qu’ils diffusent une impression de joie et de fausse légèreté. On va enfin payer très cher les importateurs pour qu’ils importent ce qui a été fabriqué par de lointains esclaves puisque nos parieurs ont évidemment perdu leur pari et déposé le bilan.

Tout cela pour ne pas dire deux vérités anti-électorales, à savoir que la seule issue intelligente est de travailler plus pour payer plus cher des produits en concurrence libre et non faussée par des droits de douane freinant l’esclavage dans l’espace du libre-échange.  La seconde vérité anti-électorale est que le prêt à intérêt est un impôt privé générant un esclavage dans le temps, une servitude volontaire comme Etienne de la Boétie l’a si admirablement décrite.

Mais quel homme politique aura le courage de le dire ? Et quel peuple trouvera en lui-même le courage de l’entendre ?

Achetez votre vie et vous serez plus riches

Un internaute me propose de rappeler deux pages de mon livre « Voter utile est inutile » paru en 2006 qui faisaient un lien entre la croissance et les heures. Les pages 27 et 28 peuvent éclairer sur l’inconsistance de la croissance, du PIB et du PNB puisqu’à l’époque on parlait encore de Produit National Brut à côté du Produit Intérieur Brut. Voici ces pages :

La croissance serait donc l’augmentation des richesses, l’augmentation du PNB, du PIB, de la Valeur Ajoutée, mais pour aborder ces notions et comprendre enfin leurs définitions, il faut sans doute prendre une autre mesure que l’argent dont la définition ne nous apparaît plus clairement, ou que la richesse qui n’est qu’un mode de regard.

Il faut une unité de mesure large, claire et simple : large pour couvrir l’ensemble de notre vie, claire car cette unité doit être une référence stable et identique pour chacun, simple car nous devons tous avoir un accès facile à cette unité.

L’heure correspond à ces exigences et permet probablement de mieux appréhender la croissance. De plus elle ne rentre pas dans les logiques habituelles et son utilisation force à réinventer les raisonnements.

Constatons d’abord l’évidence que nous respirons vingt quatre heures par jour. Nous consommons donc d’une façon totalement stable vingt quatre heures, chaque jour qui passe.

Mais comment ces vingt quatre heures nous parviennent-elles ? Une partie d’entre elles est produite par nous-mêmes, elle est « auto générée », et une autre partie est achetée. Lorsque je dors ou me promène en forêt, lorsque je chante ou répare ma maison, lorsque j’écris ou fabrique un objet, je produis moi-même mes heures, je les autoproduis. Lorsque je regarde la télévision ou prends ma voiture, lorsque je suis au restaurant ou au cinéma, lorsque je fume ou lis un magazine, j’achète mes heures.

Dans les faits, aucune heure n’est pure. Chacune a une partie achetée et une partie autogénérée. Lorsque je roule sur autoroute, j’autoproduis ma conduite et j’achète individuellement ma voiture et collectivement l’autoroute. Quand je lis j’autogénère la lecture et achète le livre… Mais pour clarifier, nous pouvons séparer qualitativement heures achetées et heures autogénérées, mettre d’un côté la partie de notre journée que nous produisons nous-mêmes, et d’un autre, celle que nous achetons.

C’est sans doute parce que nous ne pouvons absolument pas séparer quantitativement les heures achetées et les heures autogénérées que les comptes de la nation, le PNB, le PIB, la Valeur Ajoutée, ne sont fondés que sur les heures achetées. Que le Suisse ait 40.000 $ de PNB par an, le Français 25.000 $, l’Américain 30.000 $ et le Tchadien 230 $ veut simplement dire que si le Suisse achète en moyenne 12 heures par jour, le Français en achète 7, l’Américain 9 et le Tchadien n’achète que 3 minutes et donc, autoproduit 23 heures 57 minutes.

Un consensus quasi général nous voit devant et le Tchadien derrière. Suivant les affinités politiques, le Tchadien sera sous-développé, en voie de développement ou à vocation d’émergence, mais nous sommes tous d’accord pour dire que c’est à lui de nous imiter. Ce consensus peut laisser perplexe. Mais une approche de la croissance se dessine:

La croissance est l’augmentation des heures achetées dans une journée.

Moins nous produisons nous-mêmes d’heures dans notre journée, plus nous devons en acheter. Plus nous achetons nos heures, plus nous faisons de croissance. Les livres de Sagesse, la Bible, l’Evangile ou le Coran, nous disent tous de ne pas acheter notre vie mais de la construire. Faire de la croissance, c’est faire exactement l’inverse, c’est acheter sa vie. C’est le conseil que nous donnent nos dirigeants. C’est l’espoir qui nous fait vivre !

Nous allons acheter nos heures par l’investissement et la consommation, ces deux mots clés de nos choix économiques. Nous nous sommes laissés convaincre que ce sont deux excellentes choses. Ce qui est sûr c’est que ce sont deux dépenses.

S’il était suffisant d’acheter davantage notre journée, si la croissance était la panacée, le remède universel, les solutions seraient simples :

Pour faire de la croissance il suffit d’embaucher un chauffeur au lieu de conduire soi-même sa voiture, de créer un immense embouteillage, d’augmenter la criminalité pour construire des prisons et créer des emplois de police et de justice ; s’empêcher de dormir sans somnifères, augmenter la consommation d’héroïne et de cocaïne pour que le PIB bondisse. L’actrice Anémone s’étonnait dans le Nouvel Observateur que dans la comptabilité publique, les accidentés de la route soient dans la colonne « création de richesses ». On peut aussi casser toutes les vitres de la rue pour relancer les vitriers et les machines à fabriquer du verre ou du mastic. On admirera la séparation de France Télécom et de La Poste qui a fabriqué une belle croissance en faisant payer ses communications téléphoniques à La Poste pendant que France Telecom se mettait enfin à timbrer son courrier. Une femme au foyer et la femme d’un artisan qui donne un coup de main à son mari peuvent échanger leurs fonctions sociales : l’épouse de l’artisan se fera rémunérer pour garder les enfants, faire la cuisine et le ménage chez la femme au foyer qui elle, deviendra la salariée de l’artisan. Tout cela fait de la croissance.

Le produit national ou intérieur brut mesure tout mouvement chiffrable. On considère qu’une valeur a été créée puisqu’une dépense a été faite. Cette dépense peut être une dépense de consommation ou d’investissement ce qui permettra de prôner la relance par la consommation ou par l’investissement. Toute dépense étant considérée comme un enrichissement, permet à l’Etat de s’enrichir concrètement par prélèvement sur cette nouvelle valeur théorique. Vous jouez au ballon avec vos enfants, vous ne faites pas de croissance. Vous êtes bloqués dans un embouteillage, vous faites de la croissance. Vous dormez du sommeil du juste, vous ne faites pas de croissance. Vous avalez des pilules fort coûteuses pour dormir, vous faites de la croissance. Dans l’exemple des coups de main entre voisins, tant que la femme du médecin aide gratuitement son voisin le plombier dans ses papiers, pendant que la femme du plombier donne un coup de main gratuit au médecin pour ouvrir aux clients, ils ne font pas de croissance. C’est uniquement lorsque l’Etat furieux parle de travail au noir et impose le salariat à tout le monde pour prendre sa dîme que l’on fait de la croissance et que nous sommes enfin plus riches. Nous serons d’ailleurs beaucoup plus riches puisque une double amende viendra encore faire plus de croissance. Fin 1999 une croissance fantastique nous a été offerte par une double tempête et par un délicieux pétrolier appelé Erika qui est venu s’échouer sur nos côtes. La classe politique a été un peu gênée par la « cagnotte » que ces catastrophes ont procurée à l’Etat, mais on est vite passé à autre chose.

Mieux encore : vous construisez une maison, vous faites de la croissance, vous la démolissez vous faites de la croissance, vous la reconstruisez, vous faites toujours de la croissance, vous la démolissez une deuxième fois, quatrième contribution à la croissance. Faites cela dix fois et sur dix maisons vous aurez fait cent fois de la croissance. L’Etat aura gagné définitivement beaucoup d’argent, des emplois auront été créés mais le résultat sera par définition nul et stupide. Quelqu’un aura perdu de l’argent non seulement pour faire ces travaux contradictoires mais pour y rajouter la dîme étatique sur le mouvement. La plupart du temps cet appauvrissement est caché car, si le peuple en était conscient, il en serait scandalisé. L’appauvrissement est discrètement financé par l’emprunt et on laissera aux suivants le soin de payer par leur sueur ou leur sang, ce que les fruits de la croissance ne paieront évidemment jamais.

Madame Taubira et les foires moyenâgeuses

Le XIIIème siècle voit dans toute l’Europe l’apogée des foires médiévales. Dans les foires de Champagne on échange les draps des manufactures du Nord contre des produits méditerranéens. L’INSEE n’existait pas mais on pouvait déjà calculer le PIB de la foire par les trois modes de calcul que l’INSEE affirme mais n’explique jamais. On pouvait additionner la valeur de tout ce que les marchands apportaient et vendaient (le PIB par la valeur ajoutée). On pouvait additionner tout l’argent que les acheteurs venaient dépenser (le PIB par la distribution). Et on pouvait bien sûr additionner toutes les transactions (le PIB par la dépense).

Il est intéressant de remarquer que le PIB de la foire donnait une impression assez exacte de la prospérité de la province. Quand la foire tournait bien, l’économie tournait bien. Ils avaient compris que la croissance (l’augmentation du PIB) donnait de l’emploi, de l’argent et de la prospérité.

Un petit détail semble pourtant échapper à nos économistes actuels qui continuent à attendre de la croissance, la solution de nos problèmes. A l’époque le PIB par la distribution, l’argent que les acheteurs possédaient, avait été gagné par le travail. Le PIB par la valeur ajoutée, les marchandises proposées, avaient été fabriquées par le travail. C’est le travail de la province qui générait aussi bien les marchandises à vendre que l’argent pour les acheter. Et si tout tournait bien au moment de la foire, c’est que tout le monde travaillait dur le reste du temps.

Aujourd’hui pour flatter le peuple et pour qu’il vote bien, l’argent est de plus en plus emprunté et les marchandises de plus en plus importées. C’est l’esclavage dans le temps, base réelle de l’emprunt, et l’esclavage dans l’espace, base réelle du libre-échange, qui cherchent à alimenter la croissance pour faire décoller le PIB.

Emprunter pour payer ce que l’on importe et jouir sans produire ne peut marcher que si le travail est sous-traité aux esclaves, à ceux qui sont loin grâce au libre-échange et à ceux que nous serons demain grâce à l’emprunt.

Qui aurait la gentillesse d’aller l’expliquer à Madame Taubira ? Je me suis laissé dire qu’elle n’approuvait pas l’esclavage.

Travailler pour fabriquer

C’est un vrai plaisir de voir la classe dirigeante respecter enfin le « droit au travail » du préambule de la Constitution et mettre unanimement l’emploi en priorité absolue. Mais personne n’envisage d’autres moyens que le retour de la croissance et leur seule activité est de se disputer pour savoir s’il faut la faire revenir par l’offre ou par la demande.

Comme personne ne comprend et qu’évidemment ni l’une ni l’autre ne fonctionne, le débat commence à être haineux.

Commençons par comprendre ce qu’ils voudraient dire. Rappelons pour la forme que le PIB est une mesure d’activité d’un espace donné pendant un temps donné et qu’il peut se calculer de trois façons comme cela est écrit sur le site de l’INSEE et comme cela a déjà été écrit pour un marché forain.

Le PIB du marché peut être calculé par les marchandises apportées le matin par les forains et les maraichers moins celles remportées à la fin, le tout chiffré à leur prix de marché. C’est le PIB INSEE par la valeur ajoutée si chère à nos économistes qui expliquent par là le terme de Produit.

Le PIB du marché peut être aussi calculé en additionnant l’argent qui est dans les poches de tous les gens rentrant sur le marché et en en soustrayant ce qu’ils ont encore en partant. C’est le PIB INSEE par la distribution.

Le PIB du marché peut être enfin calculé en additionnant toutes les transactions. C’est le PIB INSEE par la dépense, évidemment le plus simple à calculer mais le plus difficile à faire passer pour un produit.

Le PIB est donc clairement, non un produit mais une activité qui peut facilement se réduire à une simple agitation.

Que disent nos dirigeants ? Ils affirment à très juste titre que si le marché croît et recouvre tout le quartier, cette croissance créera des emplois de vendeurs chez les maraichers, chez les forains et dans tous les commerces adjacents.

Mais au lieu de regarder le problème du déclin du marché dans sa complexité et surtout dans sa vérité dérangeante, ils se séparent en deux simplismes opposés et évidemment tout aussi inefficaces l’un que l’autre.

Le premier est de faire de la relance par l’offre et de faire venir plus de maraichers, plus de forains. S’il n’y a pas les acheteurs cela ne marche évidemment pas. C’est pourtant la solution des gens qui se disent de droite. Le second est de faire de la relance par la demande, par l’augmentation de la consommation en remplissant les poches de tous les gens qui entrent sur le marché. S’il n’y a rien à vendre cela ne peut pas marcher non plus. C’était la solution des gens qui se croient de gauche et qui, devant l’échec évident de leur simplisme, sont en train de tourner casaque pour enfourcher le cheval de la relance par l’offre qui ne peut pas plus marcher que la relance par la demande.

Les somptueux économistes que nous avons, ont expliqué aux partisans de la relance par la demande qui se demandaient comment trouver des marchandises à vendre, qu’il n’y avait qu’à importer ce qui permettrait de faire de la croissance par la consommation. Personne n’a jamais expliqué d’où viendrait l’argent qui permettrait à la fois d’être mis dans la poche des consommateurs et d’acheter de quoi leur vendre.

D’autres économistes tout aussi distingués ont tout expliqué aux partisans de plus en plus nombreux dans leur apparente sagesse de la relance par l’offre et qui se demandaient qui viendrait acheter les marchandises à vendre. Ils leur ont dit qu’il n’y avait qu’à vendre à tous les étrangers et faire de l’exportation grâce à l’Europe et à la mondialisation. Personne n’a jamais expliqué comment les mêmes marchandises pouvaient être en même temps sur le marché et exportées pour avoir l’argent nécessaire à leur achat sur le marché.

Faut-il en rire ou faut-il en pleurer ? C’est du même niveau que la querelle entre vouloir dépenser plus pour dépenser moins, c’est-à-dire faire de la croissance pour rembourser la dette, ou vouloir dépenser moins pour dépenser plus, c’est-à-dire accepter l’austérité pour atteindre la prospérité.

Pourquoi des gens intelligents se complaisent-ils dans de telles fadaises enrubannées de médias, en les faisant proférer par une dizaine de satrapes repus qu’on a laissés déguiser leur incompétence en expertise ?

La réponse est malheureusement très simple. Pour relancer le marché, il faut à la fois fabriquer ce qui sera à vendre et à la fois travailler pour avoir l’argent pour l’acheter. Il faut travailler pour fabriquer. Les foires montraient la prospérité d’une région car jusqu’au XXème siècle on y travaillait pour fabriquer.

Mais aujourd’hui vouloir mettre de l’argent dans les poches des gens pour leur faire acheter des produits importés ne mène pas loin. Pas plus que se gargariser en pensant que notre système éducatif fabrique une telle intelligence que la Terre entière va venir nous l’acheter en nous évitant le travail. La vanité fait rire, elle ne nourrit pas.

Travailler plus pour produire réellement nous-mêmes et acheter moins facilement car supprimer l’esclavage nous coutera très cher, est évidemment la seule sortie de crise possible. Mais il n’y a que deux voies pour cela : le protectionnisme et la guerre qui seuls nous mettront en face de nous-mêmes.

Les Politiques n’aiment pas le protectionnisme car mettre les Français en face d’eux-mêmes n’est pas électoral. Comme le disait un spécialiste du monde politique à un candidat qui voulait dire la vérité : « Tu veux dire la vérité ou être élu ? ».

Les élus ont tous choisis d’être élus. Ils ne sont pas pourris, ils sont cohérents. Ils ne peuvent choisir le protectionnisme sans affronter leurs électeurs, ce qu’ils ne peuvent envisager. Ils laissent la guerre nous mettre en face de nous-mêmes. Ils clament que le protectionnisme mène à la guerre mais ce sont eux qui,  consciemment ou inconsciemment, ont choisi la guerre. Le côté haineux du débat actuel commence déjà à fabriquer les boucs émissaires possibles.

Louis XV disait déjà : « Après moi le déluge ! ». Serions-nous tous des Louis XV ? Allons-nous attendre qu’ils nous disent tous comme Mac Mahon : « Que d’eau ! Que d’eau !  » ?

Renouer avec la prospérité

Un « journaliste économique  » d’Europe 1 expliquait récemment que pour renouer avec la prospérité il fallait accepter la rigueur.

Le discours politico-médiatique est en crise car il vit mal son écartèlement.

Une fois que l’on a compris d’abord que la croissance n’est que la dépense, ensuite que l’argent n’a plus rien à voir avec de l’énergie humaine stockée et enfin que l’oligarchie au pouvoir, toutes fausses nuances confondues, a besoin de beaucoup d’argent pour acheter notre affect et déguiser finement la ploutocratie en démocratie pour garder le pouvoir, nous ne pouvons que constater l’impossibilité dans laquelle le discours politico-médiatique est obligé de s’enfermer et les contradictions qui s’affichent de plus en plus au grand jour.

D’un côté on attend la croissance. Notre président va même en Côte d’Or pour tenter de redorer sa cote. Il faut dépenser !  Peu importe que la dépense soit intelligente ou stupide, peu importe que ce soit avec de l’argent laborieusement gagné ou avec de l’argent volé, emprunté ou fictif, peu importe que ce que l’on paye soit utile ou nocif, il faut dépenser pour faire de la croissance. « Importons et consommons » disent ceux qui se croient de gauche tout en disant que nous, méchants occidentaux, nous consommons trop. « Investissons et exportons » disent ceux qui se croient de droite et qui n’arrêtent pas de déprécier les actifs qu’ils ont acheté beaucoup trop cher. Tout le système repose sur la croyance en une valorisation d’actifs qui permet l’emprunt pour dépenser mais qui ne tient que si le système continue. L’INSEE additionne « en volume » le PIB et les importations et additionne en monnaie le PIB et les exportations !

De l’autre côté l’idéologie du mondialisme nous oblige à approuver les instances supranationales (la Commission de Bruxelles, la Banque Centrale Européenne, rue du Kaiser à Francfort, le FMI, l’OCDE, l’OMC) qui toutes nous disent de dépenser moins en coûtant elles-mêmes très cher.

Augmenter la dépense publique pour faire de la croissance. Diminuer la dépense publique pour plaire au marché et continuer à pouvoir emprunter un argent qui n’existe pas mais qui rapporte gros aux fabricants de rêves. Il faut faire les deux il faut augmenter et diminuer à la fois.

Cela donne le jeu sympathique parlementaire entre ceux qui disent qu’il faut dépenser plus (accepter le déficit budgétaire) pour pouvoir enfin dépenser moins ( freiner l’augmentation de la dette !!!!! ) et ceux qui disent qu’il faut dépenser moins (accepter la rigueur) pour pouvoir enfin dépenser plus ( renouer avec la prospérité ).

Se moquent-ils de nous ou d’eux-mêmes ? C’est la seule question qui nous sépare encore d’une prise de conscience intelligente ou du désastre.

La valeur ajoutée, base de notre économie

La valeur ajoutée est avec le Produit Intérieur Brut, le fameux PIB, et avec la croissance, la triple base positive de notre économie. Le PIB est la somme des valeurs ajoutées et la croissance est l’augmentation de ces deux merveilles. Tout est donc fondé sur « la valeur ajoutée » qui est sans nul doute le concept le plus fou de l’économie. Tout le monde entend qu’on ajoute une valeur, y compris les professeurs d’économie qui diffusent cette perversion. Regardons cela de plus près.

L’INSEE propose la définition suivante de la valeur ajoutée : « Elle est égale à la valeur de la production diminuée de la consommation intermédiaire » et l’INSEE définit par ailleurs la consommation intermédiaire comme la « Valeur des biens et des services transformés ou entièrement consommés au cours du processus de production ».
Cette définition est déjà fausse puisque les salaires qui sont une valeur de services consommés au cours du processus de production, ne sont pas déduits de la valeur de la production. Mais passons….

La valeur ajoutée d’une entreprise c’est son chiffre d’affaire facturé avec TVA diminué de tout ce qu’elle achète à l’extérieur avec TVA comme biens et services. Cette valeur ajoutée c’est ce qui lui permet, nous dit-on, de payer les salaires, les charges, les impôts, faire les investissements et rémunérer le capital.

Nous avons donc la formule simple, base de notre économie libérale :

Somme de tous les chiffres d’affaire – Somme de tous les achats = Salaires + charges sociales + Impôts + Investissements + Dividendes des actionnaires.

La première partie de l’équation permet de payer la seconde.

Mais le chiffre d’affaire d’une entreprise n’est-il pas soit un achat par une autre entreprise soit de la consommation de particuliers que l’on appelle ménages ou de collectivités que l’on appelle administration ou associations ? Evidemment oui.

Et dans une entité comme la France ou l’Europe que l’on réputera fermée pour ne pas compliquer, ce qu’une entreprise achète à l’extérieur n’est-il pas toujours du chiffre d’affaire pour une autre entreprise ? A nouveau évidemment oui.

Si l’on fait la somme de toutes les valeurs ajoutées de toutes les entreprises de cette entité, la somme des chiffres d’affaires devient donc la somme de tous les achats des entreprises plus la somme de toutes les consommations des ménages, de l’administration et des associations, soit la formule :

Somme de tous les chiffres d’affaire = Somme de tous les achats de toutes les entreprises + Somme de toutes les consommations des particuliers, de l’administration et des associations.

La valeur ajoutée globale de cette entité qui permet de payer salaires, charges sociales, impôts, investissements et rémunérations des actionnaires est donc :

Valeur Ajoutée = ( Somme de tous les achats de toutes les entreprises + Somme de toutes les consommations des particuliers, de l’administration et des associations ) – Somme de tous les achats de toutes les entreprises.

Et en simplifiant :

Valeur Ajoutée = Somme de tous les achats de toutes les entreprises + Somme de toutes les consommations des particuliers, de l’administration et des associationsSomme de tous les achats de toutes les entreprises.

L’on s’aperçoit alors avec horreur que la valeur ajoutée d’une entité comme la France par exemple c’est exclusivement ce que nous dépensons tous. Plus nous dépensons, plus nous faisons de croissance et d’augmentation du PIB.

C’est tellement vrai que l’INSEE pour connaitre la valeur ajoutée de l’administration, comptabilise ce qu’elle coûte.

C’est aussi tellement vrai que l’INSEE écrit que la somme de toutes les dépenses est une autre façon de calculer le PIB. Mais avouons qu’il est plus plaisant de croire que c’est la somme des valeurs ajoutées. Personne ne comprend mais ça marche, suivant le principe du conte d’Andersen sur les habits de l’Empereur.

Tout d’un coup l’on comprend que la croissance doit se financer puisque ce n’est qu’une augmentation de la dépense et que l’on ne sait évidemment financer que par l’emprunt. Comme cet argent n’existe pas, il faut le créer et la loi Rothschild de janvier 1973 étendue à l’Europe par le traité de Maastricht oblige à payer très cher les banques privées pour qu’elle veuillent bien s’engraisser en nous créant par la double écriture l’argent dont nous avons absolument besoin pour continuer à croire que nous créons de la valeur en dépensant de plus en plus.

On comprend le ralentissement de la croissance mais on comprend beaucoup plus difficilement les Politiques et leurs séides qui nous annoncent tous qu’on va bientôt sortir de la crise en réformant pour redresser. Ils s’accusent les uns les autres de n’avoir jamais  su quoi faire et d’être incapable de concevoir tellement ils pensent tous que l’autre bord n’a pas compris grand-chose ou, s’il a compris, qu’il ne pense qu’à lui.

Et si la réalité était que personne ne fait le moindre effort pour comprendre ?

Un emplâtre sur une jambe de bois

A force de faire semblant, on sombre dans le ridicule le plus abouti. Le rapport Gallois prône une augmentation de la TVA et la baisse des charges sociales des entreprises. Partant de ce rapport le gouvernement Ayrault dans son « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi » tourne déjà le dos aux promesses électorales de François Hollande et veut augmenter la TVA et réduire de 20 milliards d’euros la fiscalité sur les entreprises sans baisser les charges sociales pour ne pas augmenter, plus que de sa raison personnelle, le trou déjà béant de la sécurité sociale. Les écologistes s’étranglent, l’autre bord approuve et s’amuse de voir Jean-Marc Ayrault appliquer le programme de Sarkozy.

Les uns comme les autres ne font qu’augmenter l’impôt en réussissant à faire croire qu’ils le diminuent en le ressortant sous d’autres formes. Les charges sociales sont un impôt comme la TVA, la CSG et les radars sur les routes. Tout cela parce qu’on s’entête à croire que la croissance enrichit et que les deux seules questions sont « Comment la stimuler, la faire revenir, l’implorer et la retenir ? » et « Comment se partager équitablement cette manne laïque dans le désert des idées ? ».

Toute la classe dirigeante se perd en discussions profondes sur le meilleur remède entre le cautère, l’emplâtre ou le cataplasme, sans réaliser que le problème est la jambe de bois et non pas les simagrées d’illusionniste que chacun invente pour faire espérer que la jambe va prendre vie.

Le crédit d’impôt est un cautère, l’augmentation de la TVA est un emplâtre, la diminution des charges sociales est un des multiples cataplasmes qui tous, ne sont qu’augmentation ou diminution des prélèvements pour faire tomber la manne et donner l’illusion que la jambe de bois est vivante.

Hélas, trois fois hélas ! le dogme de l’église économique qui nous gouverne est faux. La croissance s’achète, pardon ! se finance, parce qu’elle n’est que dépense.

Lorsque l’INSEE écrit dans ses définitions que le PIB est un produit et donc que sa croissance enrichit, il utilise un tour de passe passe qu’il faut décortiquer.

Tout part de l’observation que si un client achète un kilo de tomates à un marchand, le marchand s’appauvrit en tomates et s’enrichit en argent pendant que le client s’appauvrit en argent mais s’enrichit en tomates. Le PIB étant la mesure, plus ou moins exacte, de l’argent en circulation, cette mesure peut se faire, comme le dit l’INSEE, en additionnant toutes les dépenses ou en additionnant à un moment donné tout ce qu’il y a dans les différentes mains, en additionnant les distributions. Mais comment faire croire que de l’argent circulant est une production que nous allons pouvoir nous partager ? Les économistes ont trouvé le truc : il n’y a qu’à parler en tomates. En achetant des tomates, je m’enrichis en tomates et bien que ce soit une dépense, je vais dire que ma femme s’est enrichie en soins dentaires, et mes amis se sont enrichis en voiture japonaise ou en téléviseur chinois. Nous avons fait de la croissance en nous enrichissant de tout cela et l’INSEE va pouvoir dire que le PIB est une production puisque nous avons produit des tomates, des soins dentaires, des voitures et des téléviseurs. Le génie de l’INSEE va être d’appeler « valeur en volume », la tomate et le téléviseur que j’ai maintenant entre les mains et de les chiffrer en euros « à prix courants » comme ils disent. Génial non ? Il va suffire maintenant de savoir qui paye mais cela s’appelle financer la croissance. Ne riez pas ! C’est ça le PIB que l’INSEE va additionner aux importations pour avoir nos ressources. On comprend mieux que ça coince forcément et que la crise était écrite depuis longtemps.

On va donc payer des milliers de fonctionnaires pour ne pas se contenter d’additionner simplement toutes nos dépenses ou toute la monnaie mise en circulation pour calculer le PIB, mais pour chiffrer les objets et les services que les acheteurs payent. C’est  pratiquement « mission impossible » car comment chiffrer ce qu’apporte un prêtre ou un fonctionnaire mais cela donne de l’emploi à des gens que l’on rémunère et, plus ils mettent de temps à chiffrer tout ça, plus cela coûte cher et plus cela fait de la croissance. L’INSEE va appeler cette « production », la « valeur ajoutée », « à prix courants et en volume ». Personne ne comprend mais on peut enfin dire que le PIB est un produit et que nous allons l’augmenter par la croissance et nous le distribuer ! On parle en volume et on additionne des tomates, des diagnostics, des voitures, des prières, des livres et des efficacités de fonctionnaires. Pour faire bonne mesure puisque l’on parle volume, on va faire de la croissance avec nos importations puisque cela va nous permettre de consommer, pendant que les Allemands font de la croissance avec leurs exportations. Mais si les Allemands s’enrichissent des euros qu’ils perçoivent, nous, nous nous enrichissons des produits asiatiques que nous achetons ! L’INSEE met en ressources les importations et le PIB. Il met en emplois nos dépenses et notre exportation.

Tout cela pour ne pas à avoir à dire au peuple que, s’il y a des inégalités honteuses dans la distribution de notre monnaie, nous vivons en moyenne au-dessus de nos moyens. La réelle pauvreté de certains est trop compensée par l’opulence scandaleuse de certains et par la vie trop dépensière de la majorité. A force d’attendre la manne laïque, nous avons oublié que seul le travail produit réellement des richesses et qu’à force de nous partager une pseudo richesse qui n’est que de l’argent emprunté nous rêvons d’un monde qui n’existe pas et auquel nous voulons tout de même croire. Mais qui veut réellement affronter ce problème ? Pas nous ! Nous sommes complices de nos dirigeants car nous n’avons pas envie de nous réveiller. Pas les Politiques ! Ils n’ont pas non plus envie de nous réveiller puisque nous devons bien voter le jour où nous sommes devant une urne et ils savent que le réveil sera douloureux. Et pour cela ils ont besoin de beaucoup d’argent et sauveront donc en premier le système financier qui les fait vivre. Pas les grandes entreprises ! Elles n’existent que par l’agitation économique et par la réduction de la durée de vie de ce qu’elles font produire. Pas les médias ! Ils ne vivent que par le financement des précédents.

Alors les impôts ne peuvent que monter car il faut payer, en décalage et tout est dans ce mot, la vie trop facile qu’en moyenne nous avons. En plus des impôts classiques on a inventé la dévaluation pour faire payer les épargnants et la hausse des prix pour faire payer les consommateurs. Aujourd’hui la classe dirigeante fait s’épanouir un nouvel impôt, la compétitivité qui est un mot inventé en 1960. Il faut fournir plus et d’une manière ou d’une autre travailler plus pour gagner moins; mais surtout ne pas le dire et combattre becs et ongles le protectionnisme qui nous mettrait en face de nous-mêmes et de nos contradictions. Il est pourtant totalement nécessaire  que nous réalisions la supercherie dans laquelle nous vivons mais c’est tellement difficile à accepter que nous préférons inconsciemment laisser venir, par lâcheté, le protectionnisme par sa voie royale : la guerre.

 

Merci Messieurs !

Ca y est ! Nous avons le remède. 20 milliards de hausse d’impôts et 10 milliards de réduction de dépenses. La quadrature du cercle est résolue et les nouveaux occupants du pouvoir ont trouvé la formule magique.

Mais le Béotien que je suis s’interroge tout de même. Si on augmente les impôts, ce n’est pas pour rembourser la dette puisqu’elle va continuer à augmenter dans la vertu Maastrichtienne du déficit budgétaire limité à 3% mais toujours présent. Ce n’est pas non plus pour stocker l’argent dans l’arrière-cuisine et c’est donc bien pour le dépenser. Donc la formule magique c’est dépenser 20 milliards de plus et dépenser 10 milliards de moins, ce qui fait donc une augmentation de la dépense de 10 milliards ce qui est excellent pour la croissance mais pas pour le remboursement de la dette.

La « gauche » pense que pour rembourser la dette et donc pour dépenser moins, il faut commencer par dépenser plus et faire de la croissance. De la « croissance par la consommation » disent-ils. L’INSEE est d’accord en additionnant le PIB et les importations pour avoir nos ressources. Plus on importe, plus on peut consommer et plus on fait de la croissance à la française.

La « droite » nous avait appris, elle, que pour dépenser plus il fallait d’abord que la croissance revienne quitte à aller la chercher avec les dents et pour cela il fallait investir et non pas consommer, donc dépenser moins. Elle nous jurait ses grands dieux que dès que la croissance serait enfin là, nous pourrions nous partager ses fruits, les dépenser et rembourser la dette. La droite compte sur les exportations pour faire de la croissance. Comme on raconte que la croissance allemande est tirée par ses exportations, même notre ministre actuel du budget Jérôme Cahuzac qui ne se dit pas de droite s’emmêle les pinceaux et répond le 3 octobre 2012 à l’hebdomadaire Challenges « Il nous faudra réfléchir à restructurer le modèle de croissance français en favorisant l’investissement et l’export ».

Ce qui est tout de même extraordinaire c’est de voir la facilité avec laquelle la classe dirigeante nous joue un combat de coqs fatigués entre ceux qui veulent dépenser plus pour dépenser moins et ceux qui veulent dépenser moins pour dépenser plus. Certes il faut avoir compris que le PIB est la somme de toutes les dépenses, et la croissance l’augmentation de ces dépenses, mais cela commence à se savoir.

Le point sur lequel ils sont tous d’accord c’est le côté abominable du protectionnisme qui nous mettrait en face de nous-mêmes et nous rendraient donc conscients de nos contradictions. Il serait alors beaucoup plus difficile de continuer à nous faire croire que le principe « un homme, une voix » s’appelle la démocratie et est, comme chacun sait, « le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres ».

Les économistes sont des jean-foutre

Ce qui est stupéfiant, c’est le côté révérencieux que tout le monde semble avoir vis-à-vis de la prétendue science économique qui habille des banalités affligeantes avec de la mathématique et dont les professeurs assènent des contre-vérités auxquelles il ne peuvent pas croire eux-mêmes. Ils ne donnent leurs diplômes qu’aux étudiants suffisamment fragiles pour répéter, sans vraiment comprendre, tout ce qu’on leur a embecqué.

Le PIB est présenté par l’INSEE sur son site de la façon suivante le 1er octobre 2012 (la colorisation m’est personnelle)  :

Produit Intérieur Brut (PIB) et grands agrégats économiques
Les comptes de la Nation – Base 2005
Date de mise à jour : 15 mai 2012
Le produit intérieur brut (PIB) est le principal agrégat mesurant l’activité économique. Il correspond à la somme des valeurs ajoutées nouvellement créées par les unités productrices résidentes une année donnée, évaluées au prix du marché.
Il donne une mesure des richesses nouvelles créées chaque année par le système productif et permet des comparaisons internationales.
Le produit intérieur brut est publié à prix courants et en volume aux prix de l’année précédente chaînés. Son évolution en volume (c’est-à-dire hors effet de prix) mesure la croissance économique.
Les grands agrégats économiques associés au PIB sont le revenu national brut (RNB), la capacité ou le besoin de financement de la nation, les grandes composantes de l’équilibre entre les éléments de l’offre (PIB, importations) et de la demande (consommation, investissement, exportations), la ventilation des facteurs de production (emploi, stock de capital) par secteurs institutionnels (entreprises, ménages, administrations publiques considérés comme producteurs de richesses) et la valeur ajoutée qu’ils génèrent.

Sur cette base de création de richesse, tous les raisonnements tendent à faire venir cette croissance, cette augmentation du PIB que nous allons nous partager. C’est beau comme l’antique et on se laisserait presque prendre à cet hameçon séduisant si le même INSEE dans ses définitions ne nous apprenait pas, toujours au 1er octobre 2012, que :

Produit intérieur brut aux prix du marché / PIB
Définition
Agrégat représentant le résultat final de l’activité de production des unités productrices résidentes.
Il peut se définir de trois manières :

– le PIB est égal à la somme des valeurs ajoutées brutes des différents secteurs institutionnels ou des différentes branches d’activité, augmentée des impôts moins les subventions sur les produits (lesquels ne sont pas affectés aux secteurs et aux branches d’activité) ;

– le PIB est égal à la somme des emplois finals intérieurs de biens et de services (consommation finale effective, formation brute de capital fixe, variations de stocks), plus les exportations, moins les importations ;

– le PIB est égal à la somme des emplois des comptes d’exploitation des secteurs institutionnels : rémunération des salariés, impôts sur la production et les importations moins les subventions, excédent brut d’exploitation et revenu mixte.

Il faut d’abord nettoyer ces définitions d’un charabia destiné à ne pas être dérangé par tous ceux qui ne font pas partie de l’Eglise économique. On dit «Formation brute de capital fixe» et «Emplois finals intérieurs de biens et de services» car «Investissements» et «Dépenses» risqueraient d’être compris par les gens simples. En fait l’INSEE rappelle discrètement dans ses définitions que le PIB est soit tout ce qui est produit, soit tout ce qui est dépensé, soit tout ce qui est distribué. Mais il doit avoir comme mission de ne donner qu’un éclairage valorisant, celui de la production. Dire qu’il suffit de dépenser pour faire de la croissance fragiliserait ceux qui voulaient aller la chercher avec les dents ou ceux qui veulent l’intégrer à un pacte européen.

Pour bien comprendre la « production » dont parle le PIB, imaginons un SEL (Système d’Echange Local) d’une centaine de personne qui crée une monnaie qu’il appelle piastre, il en fabrique une certaine quantité qu’il va distribuer à ses adhérents qui vont s’acheter les uns aux autres les biens et les services dont ils ont besoin. Imaginons même que nous soyons au mois d’août et qu’aucun autre habitant que les membres du SEL ne soit présent et que l’euro ne soit pas utilisé. Les piastres tournent et tout ce qui est produit dans le SEL est évidemment égal à tout ce qui est dépensé dans le SEL et est aussi évidemment égal à tout ce qui a été distribué aux membres du SEL si l’on a fabriqué juste ce qu’il fallait de piastres. Nous avons les trois définitions du PIB de l’INSEE et nous voyons même que l’INSEE oublie la 4ème définition de ce même PIB qui est l’argent circulant. Le PIB est en effet la quantité d’argent en circulation que l’on peut voir comme l’argent créé pour le groupe multiplié par sa vitesse de circulation, comme la production effectuée par le groupe traduite en argent, comme l’argent dépensé par le groupe et enfin comme l’argent circulant entre les membres du groupe. Ces quatre regards ont évidemment le même chiffrage et personnellement j’opte pour le calcul du PIB le plus simple : additionner toutes les dépenses publiques et privées.

Le plus simple n’est plus en effet de calculer l’argent créé depuis que les banques ont créé tellement d’argent virtuel par la double écriture que personne ne peut avoir une idée chiffrée de l’argent créé. Le plus simple n’est évidemment pas non plus de faire ce que fait l’INSEE sur ordre, à savoir l’éclairage production, car étant incapable de chiffrer ce que peut produire l’admin istration, l’INSEE utilise l’éclairage dépense pour trouver la production : l’administration rapporte ce qu’elle coute. Plus elle coûte plus on fait de croissance. Mais les politiques n’aiment pas qu’on leur rappelle que pour faire de la croissance il suffit de dépenser davantage.

Le PIB n’est donc qu’une quantité de monnaie en circulation qui n’a rien à voir avec une production réelle. La croissance du PIB a pourtant deux gros intérêts pour les politiques : elle constate l’emploi donné en dépensant et elle enrichit l’Etat qui pompe sur tout mouvement qu’il ne fait pas lui-même. Décembre 1999 a donné beaucoup de travail pour nettoyer les côtes du pétrole de l’Erika et pour réparer les dégâts des deux tempêtes qui ont traversé la France. Cela a terriblement enrichi l’Etat qui grâce à la TVA s’est constitué une « cagnotte » dont il était un peu gêné. Keynes proposait que la moitié de la population creuse des trous que la seconde moitié reboucherait. Quelle croissance ! Sur la TVA et sur les charges sociales des boucheurs déboucheurs, l’Etat ferait fortune. Le seul problème, et c’est celui de la croissance, c’est de savoir qui la paye. Qui a payé la fabuleuse croissance de décembre 1999 dont nous nous serions bien passés ? Il était piquant de voir Nicolas Sarkozy critiquer François Hollande et ses centaine de milliers de fonctionnaires supplémentaires alors qu’embaucher des fonctionnaires augmente le PIB puisque, rappelons-le, pour l’INSEE l’administration rapporte ce qu’elle coute. C’est moins intéressant pour l’Etat car il n’y a pas de TVA mais l’emploi et la croissance s’y retrouvent.

Les politiques et les « économistes » n’osent pas demander qui paye la croissance. Ils disent « Il faut la financer » et pour tenir dans ce monde aberrant ils ont besoin de partenaires qui sont le système bancaire international qui tient le rôle d’usurier en prêtant l’argent qui fait croire que nous sommes riches et que la croissance crée des richesses comme a le culot de l’écrire l’INSEE. Jean-Luc Mélenchon disait lors de sa campagne que la France n’avait jamais été aussi riche de toute son histoire. En réalité elle n’est riche que de ses dettes et elle s’est vendue au système financier mondial pour permettre à la SPP (Société Protectrice des Politiques) de sauver la classe politique droite et gauche confondues. Ils veulent tous la croissance et donc qu’il faut dépenser plus. Mais ils disent tous qu’il faut rembourser les prêts et donc qu’il faut dépenser moins.

Ils continuent tout de même à se différencier pour pouvoir se combattre et apporter au peuple ces jeux du cirque qu’il affectionne. Ceux qui se disent de gauche prétendent qu’il faut dépenser plus pour dépenser moins (consommation moteur de la croissance) pendant que ceux qui se disent de droite affirment qu’il faut dépenser moins pour dépenser plus (investissement moteur prudent de la croissance). Il n’y a que François Bayrou à vouloir faire les deux.

Ils veulent tous revenir à l’intelligence suprême de Maastricht qui est de ne dépenser que 103 % du PIB sachant que Guy Abeille haut fonctionnaire à la direction du budget avoue dans le Parisien du 28 septembre 2012 avoir sorti à l’époque de son chapeau ces 3% « chiffre né sur un coin de table » à la demande de Mitterrand qui voulait « une règle facile qui sonne économiste ». Il dit avoir choisi un pourcentage du PIB parce qu’en « économie tout le monde se réfère au PIB ». Bonjour Panurge ! Dès que l’on comprend que le PIB est la dépense, on comprend que nous nous sommes engagés, droite et gauche confondues, à ne pas dépenser plus de 103 % de… ce que nous dépensons.

Ce système aberrant est pourtant farouchement défendu par la classe politique car il permet de faire croire au peuple que le fait de vivre mieux que nos grands-parents est dans l’ordre naturel des choses. Ils sont tous farouchement opposés au protectionnisme qui nous mettrait en face de nous-mêmes et de nos contradictions. Je regrette déjà le conditionnel de ma phrase car c’est un futur inéluctable. Le protectionnisme nous mettra en face de nous-mêmes et de nos contradictions. Soit en douceur et avec intelligence, soit en un instant par la guerre.

Au royaume des aveugles les borgnes sont rois

La complicité objective des peuples et de leurs dirigeants, cachée sous le beau mot de démocratie, est en Occident le frein essentiel à toute solution douce de ce que le monde médiatico-politique appelle la crise. Faut-il pour autant condamner les aveugles ou reprocher aux borgnes d’être des cyclopes ? Non mais tenter de leur ouvrir les yeux n’est pas défendu.

D’un côté, les peuples occidentaux sont ravis de croire que le progrès et la croissance leur font vivre un confort que très peu de leurs aînés connaissaient. Ils n’en profitaient d’ailleurs que par héritage ou par un travail efficace, rude et acharné. Aujourd’hui les peuples occidentaux sont prêts à envisager des pauses dans l’augmentation permanente de leur confort mais font semblant de croire qu’un retour à la dureté réelle de la vie est impossible. Un chauffeur de taxi tunisien disait avec grand bon sens : « Chez nous si on ne travaille pas, on ne mange pas. Ici qu’on travaille ou qu’on travaille pas, on mange. Alors on vient tous ici ». Mais cette croyance n’est que superficielle et chacun sait bien que tout cela est provisoire et fait peur. Cette peur se transforme en haine de soi ce qui fait la fortune des psys, ou/et en haine des autres ce qui fait monter la violence lentement mais sûrement.

De l’autre côté, les classes dirigeantes se servent du côté assez inique du confort par héritage pour faire croire qu’elles vont l’offrir à tous sans que la pénibilité du travail soit une nécessité. Pour cela, avec l’appui intéressé de la fausse science économique, elles utilisent l’énergie sociale qu’est l’argent pour assouvir les désirs du peuple. Plaire ou conduire, il faut choisir, et les Politiques ont choisi. Ils cherchent à plaire en berçant le peuple par la survie assurée et le plaisir anesthésiant, « Panem et circences » comme l’écrivait le trop méconnu Juvénal qui décrivait la société romaine décadente et si proche de la nôtre.

Certains Politiques sont de bonne foi et croient réellement qu’en changeant le temps avec la recherche et l’innovation, qu’en changeant l’espace avec l’Europe et le mondialisme, qu’en changeant les hommes avec la formation, Dieu nous récompensera en nous envoyant la Croissance qui nous donnera enfin l’argent que nous empruntons en attendant Godot. Ils réalisent mal que toutes les idéologies (fascisme, communisme, capitalisme) sont expansionnistes et se veulent universelles comme maheureusement certaines religions comme le catholicisme, certain protestantisme et l’islam. Les idéologies restent les spécialistes du faire-croire et au bout du compte elles échouent systématiquement, et à convaincre, et à imposer.

D’autres Politiques sont cyniques et savent très bien que cela ne mène nulle part mais hésitent entre le « Je suis leur chef, il faut bien que je les suive » du maréchal de Saxe et le « Après moi le déluge » de Louis XV. Ils se recentrent sur leur cœur de métier qui est l’élection. Ils sont attentifs à toujours dire ce qui plait à leur électorat.

Tous, honnêtes hommes de fond ou de forme, utilisent la boite de Pandore ouverte en août 71 qui a déconnecté les monnaies de toute valeur objective et a rendu surpuissants tous ceux qui traînaient dans leurs circuits. Plus personne ne sort de la phrase imbécile « au début était le troc et un jour c’est devenu trop compliqué et on a inventé la monnaie » et ils créent sans arrêt par des moyens de plus en plus sophistiqués l’argent dont ils ont besoin pour acheter leur peuple.

La crise est la confrontation entre leur rêve impossible et la réalité. Nous sommes dans la période difficile où tous les efforts sont demandés aux peuples pour faire durer encore un peu le faire-croire.

Les axes de réflexion pour minimiser les risques de guerre sont tous rejetés par le peuple qui sans le savoir prépare sa propre tombe. Il faut tout de même que ceux que la vraie politique intéresse les regardent en face.

Il faut :

1) Donner une définition compréhensible de l’entité géographique et humaine à laquelle nous appartenons en se souvenant de « La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf ». Du village à l’Europe quelle est l’entité primordiale ? Ne serait-ce pas la France ?

2) Reconnaître des définitions communes du Beau, du Bien et du Vrai comme constitutives d’un groupe. L’approche commune de leurs trois mariages deux à deux, le Riche, le Juste et le Pur, est le lien social d’un groupe vivant. L’harmonisation fiscale et sociale en est naturellement l’une des conséquences et si elle n’existe pas, n’est-ce pas la preuve de la fictivité du groupe ?

3) Protéger cette entité pour que ses membres aient tous le travail auquel ils ont droit mais soient mis en face d’eux-mêmes et qu’ils puissent affronter puis résoudre leurs contradictions que révèlera la hausse des prix inhérente au protectionnisme.

4) Renoncer à la fausse démocratie du « un homme, une voix » qui ne donne le pouvoir qu’à l’argent pour travailler les deux axes possibles de la vraie démocratie à inventer : le permis de voter et le tirage au sort.

5) Renoncer au laminage intellectuel de la prétendue Education Nationale qui limite l’éducation à l’accumulation de connaissances en se faisant concurrencer par internet, pour ajouter à nouveau les compléments indispensables de l’expérience et de l’apprentissage du discernement.

Il reste pour éviter la guerre à répondre à la question : faut-il convaincre le peuple pour convaincre ses dirigeants ou faut-il convaincre les dirigeants pour convaincre le peuple ? Et qu’en pensent les médias ?