Il y a presque 5 siècles Etienne de la Boétie écrivait avec une érudition et un recul incroyables pour les 18ans qu’il avait à l’époque, le discours de la servitude volontaire. Il y expliquait qu’un pouvoir est incapable de dominer durablement une société sans la complicité, active, fataliste ou résignée, d’une partie importante de la population. Il observait que les tyrans, quelle que soit leur façon d’accéder au trône, étaient en opposition avec leur peuple. « S’ils arrivent au trône par des moyens divers, leur manière de régner est toujours à peu près la même. Ceux qui sont élus par le peuple le traitent comme un taureau à dompter, les conquérants comme leur proie, les successeurs comme un troupeau d’esclaves qui leur appartient par nature. »
Le pouvoir étant depuis deux siècles en occident théoriquement donné au peuple, ses élus le traitent comme un taureau à dompter par des moyens divers. La flatterie par les fausses promesses, la violence par la maréchaussée et la corruption par les subventions ont été les moyens les plus utilisés mais ont toujours eu l’inconvénient de créer à terme lassitude puis réaction.
Edward Bernays fut le premier à utiliser aux USA les nouvelles techniques de communication du XXe siècle pour manipuler l’opinion du peuple par la propagande. Goebbels s’en est beaucoup inspiré pour dompter son peuple et lui faire choisir le nazisme. Mais là encore les réactions ramenèrent rapidement à l’efficacité concrète de la flatterie, de la violence et de la corruption.
Il a fallu attendre la fin de la deuxième guerre mondiale pour que se mette en place un système encore plus pernicieux venant également des USA : la création ex nihilo d’une corne d’abondance illimitée accompagnée par la mise en place de son ignorance volontaire par le peuple. Il est essentiel de bien en comprendre le mécanisme.
Les monnaies avaient toujours été limitées, soit parce qu’elles étaient elles-mêmes une richesse reconnue comme l’or, soit parce qu’elles étaient liées à une telle richesse. La corne d’abondance, c’est la suppression de la limite tout en continuant à faire croire que ce qui en sort est une vraie richesse, et en refusant volontairement d’en assumer les conséquences.
Ce fut enclenché par les accords de Bretton Woods en 1944 qui liaient les monnaies au dollar lui-même officiellement lié à l’or. Les USA ont trahi immédiatement ces accords et ont fabriqué, devant le gendarme officiel FMI, créé pour le contrôler mais qui regardait volontairement ailleurs, 5 fois plus de dollars qu’ils n’avaient d’or, pour payer le plan Marshall, les guerres de Corée et du Vietnam, et la conquête spatiale. Comme tous les petits malins de la Terre rapportaient des dollars pour repartir avec de l’or, Nixon a dû en 1971 déconnecter sa monnaie d’une richesse aussi facilement transportable que l’or. Il aurait alors pu la lier à la terre américaine qui avait été durement récupérée sur les autochtones et qui était une richesse intransportable mais réelle. Il a eu le coup de génie de la délier de l’or pour la relier … à rien, une première dans toute l’histoire de l’humanité. La corne d’abondance imaginaire fonctionne aux USA depuis 1944. Elle est devenue officielle en 1971 et imitée en Europe avec la création de l’euro, lié à des monnaies qui n’étaient plus liées à rien. La valeur d’une monnaie n’est plus que le regard changeant que l’on porte sur elle. Nous avons inventé, dans la deuxième partie du XXe siècle, un instrument de mesure élastique qui fausse quasiment tout en laissant croire à un instrument de mesure de précision.
Les médias, les politiques et les intellectuels se sont naturellement alliés par intérêt pour faire croire au peuple que dépenser c’est s’enrichir et que le PIB qui chiffre réellement les dépenses, chiffrait une création de richesses à utiliser.
Je me suis longtemps demandé pourquoi rien ne passait en répétant mille fois la même chose, quitte à en devenir lassant. Et j’ai réalisé que, si rien ne passe, c’est qu’il y a une volonté farouche de tout ignorer, tellement la corne d’abondance est agréable et qu’en être crédule devient presque vital alors que c’en est mortel. Tout le monde savait le scandale racial du nazisme mais accepter d’en prendre réellement conscience avait de telles conséquences que personne ne prenait le temps de s’y intéresser. Tout le monde sait qu’il n’y a pas de corne d’abondance mais accepter d’en prendre réellement conscience a de telles conséquences, que personne ne trouve le temps de s’y intéresser. La culpabilité de laisser un monde abominable aux suivants est combattue voire effacée par la jouissance de se prendre pour des dieux, d’être à la fois opulents et généreux, de se croire plus forts que la mort et suprêmement intelligents. Les véritables fortunes que se font tous ceux qui pilotent l’occident actuellement, ont comme triple conséquence de ne rien affronter, de créer une fracture entre les peuples et eux, et d’aspirer en leur sein les moins intéressants. Plus nous dépensons de fausse monnaie, plus nous faisons du PIB, plus nous nous croyons riches et capables de dépenser une nouvelle fois, ce que nous avons déjà dépensé. Et cela ne semble gêner personne.
Nos dirigeants ont choisi la guerre pour sortir de l’impasse dans laquelle ils nous ont menés comme nous la voyons venir de partout. La guerre a toujours été un bouc émissaire commode en apportant une explication facile aux conséquences de l’arrêt de la corne d’abondance que la guerre arrête évidemment, le rêve n’y étant plus d’actualité. Ne pourrait-on tenter de sortir de l’impasse autrement que par la guerre, en évitant ses innombrables morts, en en sortant par la raison et l’affrontement des conséquences de l’absence de corne d’abondance ? Sortir de l’ignorance volontaire devrait être, pour elle-même, le premier devoir de la jeunesse alors qu’elle se laisse aveugler par les peurs débiles climatiques, sanitaires ou autres.
Si l’on voulait réagir sans laisser la guerre faire le travail, il faudrait commencer par rendre inconstitutionnels les budgets déficitaires, puis revoir tout ce que la corne d’abondance nous a fait croire possible en moins de trois quarts de siècle et que les budgets équilibrés nous forceraient à affronter.
Socialement
L’homme et la femme sont passés d’égaux complémentaires à identiques concurrents.
La mort est devenue un ennemi à combattre et la vie n’est plus un échange.
La spiritualité collective n’est apparemment plus indispensable.
Economiquement
Nous appelons croissance économique l’augmentation de nos dépenses avec une monnaie qui n’est plus qu’une dette alors qu’elle était une créance.
Le travail n’est plus ni un droit ni un devoir alors qu’il est les deux, même dans notre constitution.
La responsabilité s’est dégradée en servitude volontaire.
Politiquement
Le monde entier quand il a un problème vient se rassasier à notre corne d’abondance imaginaire.
Le pouvoir occidental utilise la médecine pour faciliter l’avortement en occident et l’explosion démographique en Afrique.
Nous n’avons plus de cohérence et la cohérence islamique nous grignote naturellement.
Quel dommage qu’aucun Politique n’aie le courage de prendre le flambeau de la révolte qui gronde dans le peuple !