Nous ne savons plus trop à quel saint nous vouer en sentant, anesthésiés, que notre bateau est en train de sombrer.
La définition du bateau et surtout son contour posent déjà problème. C’est un espace de solidarité, cohérent et sacré, que l’on nommait Patrie, la terre des pères, chez les partisans du droit du sang et Nation, la terre où l’on est né, chez les adeptes du droit du sol avant de tout mélanger.
Quel est aujourd’hui cet espace : la Terre, l’Europe, la France, la province, la région, la ville, le village, la famille ? Nous ne savons plus car la solidarité, la cohérence et le sacré se sont disloqués et leur rassemblement qu’est la fraternité a disparu pour des recherches disparates, ici de la solidarité, là de la cohérence, ailleurs encore du sacré. Comme si l’on pouvait les dissocier ! Seuls semblent l’avoir compris le judaïsme en Israël et l’islam partout où il est vivant. En Asie le bouddhisme, le confucianisme et le taoïsme, tous trois nés au 6ème siècle avant JC et admirablement complémentaires, ont pourtant du mal à s’enrichir mutuellement et seul le bouddhisme a percé en occident car il est équilibrage personnel de notre individualisme triomphant. Quant au christianisme, habillage européen de la sagesse universelle, il décline inexorablement comme les corps qu’il habille en ne défendant plus qu’une solidarité assez hypocrite. Le christianisme recule en ne comprenant pas que, si l’on peut être solidaire d’un bloc de béton, on ne peut lui être fraternel car il manque les deux liens de la cohérence et du sacré.
La solidarité tellement à la mode aujourd’hui et l’éternelle repentance sont les mortifications que nous nous imposons pour nous cacher ou pour oublier notre incapacité à nous réveiller et notre plaisir à rêver. Nous nous rejouons la scène 2 de l’acte II de Tartuffe en disant à qui veut l’entendre avec des mots plus modernes « serrez ma haire avec ma discipline ». La mortification est souvent le rempart sécurisant contre la honte de vivre l’inverse de ce que nous prônons. L’humanitaire libéral mondialiste ne va retrouver le concret que dans la limite de sa famille survalorisée et le théoricien des erreurs du système ne va survivre qu’en utilisant le système qu’il exècre.
Commençons, avant d’aborder nos contradictions, à nous demander avec qui le faire. Sur quel espace voulons-nous construire ? Savoir que c’est l’espace sur lequel nous serons capables de combiner la cohérence, la solidarité et le sacré pourrait nous être utile.
Merci pour cet éclairage.
« Sur quel espace voulons-nous construire? » . Ici ! avons-nous le choix ? cet espace que nous habitons, provisoirement.
Ici, et maintenant, dans ce présent des orages et tempêtes.
Il faut vouloir construire ensemble , aussi… en dépit de la culpabilité de l’avoir si peu fait, si mal, jusqu’ici.
Il faut du courage, et beaucoup de hautes vertus.